Inscrire la réalité des familles monoparentales à l’agenda politique
La réalité des familles monoparentales n’est pas assez prise en compte, selon des associations de terrain qui ont formulé 10 recommandations. Ces associations en discuteront ces mardi et jeudi avec des représentants politiques.
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Publié le 23-05-2023 à 06h00
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Une famille sur trois en Wallonie et à Bruxelles. Une famille sur 4 en Flandre. La monoparentalité est la réalité de nombreux Belges. Pourtant, selon des associations de terrain, elle est trop peu prise en compte par le monde politique notamment.
Or, "les familles monoparentales ont les mêmes enjeux si ce n’est qu’une seule personne doit les prendre en charge au lieu de deux", pointe Alan Keepen, responsable administratif de la Maison des Parents Solos à Bruxelles, un centre d’aide aux familles monoparentales qui existe depuis 2019.
Parcours du combattant pour accéder au logement, difficultés financières (40% de ces familles vivent ou sont en passe de vivre sous le seuil de pauvreté)… c’est pour sensibiliser à la réalité des familles monoparentales et mettre cette problématique à l’agenda des élections 2024, qu’une quinzaine d’associations (Maison des Parents Solos, Samusocial, Fédération des maisons d’accueil et des services d’aide aux sans-abri, etc.) ont élaboré un mémorandum avec 10 recommandations à destination du politique. À la base: un projet… Ikea ("Bienvenue chez vous") en faveur des familles monoparentales qui a permis de rassembler ces acteurs autour de la table l’an dernier.
Déjà discutées en Flandre, des débats auront lieu ce mardi à Liège et ce jeudi à Bruxelles, autour de ces revendications en présence de représentants politiques et associatifs.
Statut et droits
Parmi ces recommandations: centraliser les informations indispensables aux familles monoparentales et éviter ainsi le non-recours aux droits. "Ces familles sont souvent à court de temps et d’énergie", justifie Alan Keepen.
Les associations proposent également un statut "famille monoparentale". "Il ne s’agit pas d’un état civil mais d’un statut qui permettrait d’identifier ces familles, avec des droits associés", note le responsable de la Maison des Parents Solos. Le mémorandum recommande à ce propos "la création ou l’harmonisation de nouveaux droits spécifiques à ces bénéficiaires tels que des allocations familiales majorées, une fiscalité immobilière adaptée, […], une priorité dans les milieux d’accueil de la petite enfance […], des facilités plus grandes pour une aide ménagère, du baby-sitting, etc.", et "l’automatisation" de ces droits.
Les associations pointent aussi la nécessité de garantir l’accès aux soins pour les familles monoparentales (octroi du tiers payant, remboursement plus conséquent pour la logopédie, etc.). "Et puis, qui s’occupe des enfants si le parent solo doit aller chez le médecin ou à l’hôpital ? Trop peu d’associations offrent un relais aux familles monoparentales", insiste Alan Keepen.
Accès au logement
L’accès à un logement décent et abordable fait aussi partie des préoccupations énoncées. "C’est un énorme problème pour les familles monoparentales", estime le responsable de la Maison des Parents Solos.
Selon une étude de la Ligue des familles, 24% des parents (entrés en monoparentalité) ont mis plus de 6 mois à trouver un nouveau logement stable (12%, plus d’un an).
"Le marché des logements sociaux est fort saturé. Ces familles doivent alors se tourner vers le marché locatif privé, indique Alan Keepen. Là, il faut pouvoir déconstruire les préjugés que certains propriétaires peuvent avoir sur les familles monoparentales."
Toujours selon l’étude de la Ligue, "de nombreux parents finissent par devoir habiter un logement très cher par rapport à leurs revenus": une famille monoparentale sur 5 y consacre plus de la moitié de son revenu (sans les charges).
Les associations préconisent également la mise en place de projets de co-housing (chacun son logement mais avec un espace commun partagé) et la suppression du taux cohabitant – qui se traduit par une baisse des aides sociales – et qui met à mal ce type de solution. L’encadrement du prix des loyers, l’amélioration du réseau de transports en périphérie des villes et la création d’un tarif social pour les transports publics sont en outre recommandés par le terrain.
Enfin, le mémorandum plaide pour la disponibilité rapide d’un revenu de transition en cas de nécessité (maladie,...). "Il peut y avoir un décalage administratif pour l’arrivée de l’aide, des délais à attendre, observe Alan Keepen. Il faut un revenu de transition pour éviter cet entre-deux qui peut plonger ces familles dans la précarité."
Pour Alan Keepen, les familles monoparentales – et les défis auxquels elles sont confrontées – doivent être au centre des politiques publiques pour le prochain mandat. "C’est un problème tellement systémique, qui touche tellement de monde. Or, en politique, c’est à peu près la compétence de tout le monde et la compétence de personne. Il faut tendre vers une meilleure coordination et pourquoi pas prévoir une taskforce sur la question."