Prostitution des mineurs : "Une priorité absolue"
Un rapport alarmant dresse le panorama de la situation des victimes mineures de l’exploitation sexuelle.
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Publié le 18-03-2023 à 06h00 - Mis à jour le 18-03-2023 à 15h15
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Elles ou ils ont 15 ans, en moyenne. Mais selon les associations du terrain, qui dressent un constat "alarmant" de l’exploitation sexuelle des mineurs en Belgique, les victimes "sont de plus en plus jeunes. Aux alentours de 13, 14 ans. La plus jeune qu’on a eu est entrée en prostitution à 12 ans", ressort-il d’un témoignage dans une maison d’accueil, cité dans l’étude publiée par ECPAT Belgique, antenne du réseau international dédié à la lutte contre l’exploitation sexuelle des enfants.
Combien de victimes ?
Faute de centralisation des données, de toute façon lacunaires, le rapport de 100 pages transmis à la Fédération Wallonie-Bruxelles évalue à 1680 le nombre de victimes d’exploitation sexuelle, uniquement parmi les mineurs accompagnés par l’aide à la jeunesse. Mais il ne s’agit là que d’une extrapolation des chiffres français, qui montrent que 4,7% des mineurs suivis par l’aide sociale reconnaissent être en situation d’exploitation sexuelle avérée.
”Si je ne m’exécutais pas, ils me menaçaient” : l’incroyable témoignage d’une Belge victime d’un réseau de traite des êtres humains, dont des mineuresLe "chiffre noir", qui "cache très probablement un nombre très élevé de victimes", serait bien plus effrayant. "Les comportements prostitutionnels de mineurs belges ne sont pas des cas isolés, il existe un réel mouvement qui prend de l’ampleur chez les jeunes." ECPAT, en partenariat avec Defense des enfants international Belgique, a recueilli une soixantaine de témoignages dans la société civile, les milieux associatifs concernés, la police ou la Justice, et questionné 81 personnes au sein des centres PMS, de planning familial et de prises en charge des violences sexuelles. Près de la moitié des répondants disent avoir rencontré des cas d’exploitation sexuelle de mineurs au cours de l’année passée.
Des filles le plus souvent
"Ce sont souvent des jeunes filles en errance, avec des carences affectives, qui ont un écart d’âge avec leur partenaire et une faible structure familiale", explique un des témoins. Mais les garçons ne sont épargnés, même s’ils sont plus "invisibilisés" en raison du tabou et de la stigmatisation autour de la prostitution masculine. C’est notamment le cas de nombre de mineurs étrangers, en errance ou en transit en Belgique, maghrébins ou afghans notamment, qui "vivent en rue" et sont "presque exclusivement de jeunes garçons".
Le rapport dénonce la situation des MENA, mineurs non accompagnés. "Avoir une place en centre d’accueil n’est malheureusement pas synonyme de sécurité. Il est probable que de jeunes MENA (fille ou garçons) se retrouvent exploités sexuellement au sein même d’un centre d’accueil" souligne l’étude, sur base des témoignages recueillis. Et les victimes sont parfois, aussi, les auteurs. "Des jeunes filles placées dans des structures d’hébergement recrutaient en interne d’autres victimes."
La fugue, voie commune
Il existe en Belgique des réseaux de prostitution qui exploitent des mineurs. Albanais, vietnamien, nigérian, afghan, roms, bandes urbaines… Mais parmi les nombreux facteurs à risques listés dans l’étude (sans-abrisme, parcours migratoire engageant une dette, vulnérabilité affective, faible structure familiale et violences…), l’errance et la fugue sont des dénominateurs communs.
"Pour ce public, ce sont des fugues à répétition, des parents absents ou sous assuétudes." Ou encore: "Systématiquement, on retrouve de la maltraitance dans leur passé." Mais la majorité des intervenants s’accordent néanmoins à dire qu’il n’existe pas de "profil-type" des potentielles victimes.