Avis de tempête syndicale sur le Pacte pour un enseignement d’excellence
Quatre des cinq organisations syndicales menacent ce lundi 6 février 2023 de claquer la porte du Comité de concertation du Pacte, lequel réunit les acteurs de cette vaste réforme systémique.
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Publié le 06-02-2023 à 14h33 - Mis à jour le 06-02-2023 à 14h37
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Depuis 2016, les cinq formations syndicales du secteur participent, de façon hebdomadaire, aux réunions du Comité de concertation du Pacte, organe qui réunit l’ensemble des acteurs de l’enseignement obligatoire en Fédération Wallonie-Bruxelles autour des enjeux et des chantiers initiés dans le cadre de cette vaste réforme systémique.
" Il a le mérite d’instaurer un processus de consultation unique", pointe Roland Lahaye (CSC-Enseignement).
Mais depuis quelque temps, le climat qui y règne tend à s’assombrir. Et le dossier chaud du moment, à savoir le projet de l’évaluation des enseignants, n’a fait que noircir un peu plus le tableau.
"L’objectif de ce Comité est de permettre au politique de nous présenter les projets de réforme avant qu’ils n’arrivent au gouvernement, de sorte à tâter le terrain auprès des acteurs du secteur. Or, ce n’est pas utilisé comme ça par le politique. On est concerté, mais il n’y a pas vraiment de suite ni de prise en compte des avis", resitue Joseph Thonon (CGSP-Enseignement). Plusieurs formations syndicales se disent dès lors persuadées que cette structure "sert de prétexte au gouvernement, à WBE et aux fédérations de pouvoirs organisateurs pour cautionner une prétendue adhésion de tous les acteurs de l’enseignement et enfermer ceux-ci dans une prétendue démarche de co-construction", indiquent ce lundi de concert la CGSP-Enseignement, le SETCa-Sel, le SLFP-Enseignement et la CGSLB-Appel par voie de communiqué.
Évaluation
Les quatre syndicats dénoncent notamment le fait que le sulfureux dossier de l’évaluation des enseignants ait été inscrit en première lecture au gouvernement, sous la forme d’un avant-projet de décret, alors même que les négociations officielles sur le texte viennent seulement de débuter. Et que le volet sanction du texte reste, à leurs yeux, imbuvable en l’état.
"Deux passages nous posent problème, précise Joseph Thonon. Le fait que de la “mauvaise volonté manifeste” puisse entraîner une sanction et l’idée qu’une “incompétence manifeste” puisse entraîner un licenciement, sans aucune autre forme de sanction intermédiaire. Il existe déjà sept sanctions disciplinaires, qui vont du blâme simple à la fin du contrat de travail. Et les directions ont déjà la possibilité d’émettre des rapports sur certains aspects pédagogiques ou de faire appel aux services de l’inspection. Pourquoi instaurer un deuxième régime de sanction ? Cela ajoute une pression supplémentaire."
Responsabilités
Après une première réunion de négociations officielles tenue jeudi dernier, CGSP, SETCa-Sel, SLFP et CGSLB mettent désormais la pression sur les épaules du gouvernement : "Nous devons nous revoir ce jeudi. Si le gouvernement se montre ouvert à nos propositions de pistes d’aménagement, alors nous poursuivrons le dialogue. En revanche, si ce n’est pas le cas, nous prendrons nos responsabilités et nous mettrons les pieds dans le plat, nous quitterons le Comité de concertation du Pacte", avertit Joseph Thonon.
À la CSC-Enseignement, on préfère temporiser
Du côté de la CSC-Enseignement, l’avant-projet de décret sur l’évaluation des enseignants apparaît tout aussi imbuvable.
"Nous ne sommes pas contre une évaluation, mais nous sommes contre une évaluation sanction qui casserait du prof ", rappelle Roland Lahaye. Et ce, même si certaines avancées ont pu être obtenues par les formations syndicales : "On ne peut pas nier que, depuis deux ans, le texte n’a pas évolué. Mais il n’a pas assez évolué à notre goût".

Si elle apparaît donc sur la même longueur d’onde que les autres formations syndicales dans cet épineux dossier, la CSC préfère toutefois temporiser au moment d’évoquer un éventuel retrait du Comité de concertation du Pacte : "On se donne un peu de temps. Nous avons formulé un certain nombre de questions jeudi dernier et nous attendons désormais que le gouvernement revienne avec des réponses".
Consultation
Surtout, la CSC-Enseignement ne veut pas risquer quelque chose qu’elle pourrait ensuite regretter.
"Lorsque nous avons été conviés à participer à ce comité, nous avions fait le choix d’y aller après avoir largement consulté nos affiliés ; c’est pourquoi une éventuelle décision de quitter à présent ce comité ne sera prise qu’après avoir à nouveau largement consulté nos affiliés, explicite Roland Lahaye. Nous ne prendrons en tous les cas pas ce genre de décision dans la précipitation. D’autre part, nous sommes et nous voulons rester un syndicat de propositions. Car si nous remettons en cause cette réforme, nous ne nions pas non plus les grosses difficultés auxquelles doit faire face l’enseignement en Belgique francophone et qui nécessitent que nous puissions formuler des propositions."
Le secrétaire général ne nie cependant pas pour autant les difficultés rencontrées par sa formation au sein du Comité de concertation.
"Que le politique le veuille ou non, ce Pacte engendre dans le contexte actuel un grand nombre de pressions. La confiance s’effrite et l’adhésion diminue. En raison des crises, mais aussi à cause d’un manque de communication. Le Comité de concertation impose la confidentialité, ce que l’on peut comprendre dans une certaine mesure, mais ça nous met en difficulté vis-à-vis de nos affiliés : ceux-ci peuvent parfois penser que nous leur cachons des choses. Il est donc nécessaire de s’entendre sur le moment où l’on peut lever le voile et communiquer vers nos affiliés."