Covid: fermer les écoles a accru un sentiment d’insécurité chez les jeunes
Éloignés de leurs camarades, mais aussi du cadre inamovible que représentait jusqu’en mars 2020 l’institution scolaire, de plus en plus de jeunes souffrent de la situation: tel est le constat posé sur le terrain scolaire par les centres PMS.
Publié le 24-01-2022 à 12h00
/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/DCIHWN3CYVFZBORVVYRHBGOEBY.jpg)
En novembre 2020, une étude menée par le professeur Fabienne Glowacz, directrice de l'Unité de recherche ARCh et du service de Psychologie clinique de la délinquance de la Faculté de Psychologie à l'Université de Liège, révélait que les jeunes (12-18 ans) avaient vécu ce qui n'était encore que le début de la crise et des mesures sanitaires comme de véritables "chocs". Augmentation de l'anxiété chez 80% des adolescents interrogés, symptômes de dépression pour 20% d'entre eux et pensées suicidaires pour 9% de ces jeunes: les constats avaient de quoi alarmer.
"Et tout le monde le constate: les jeunes vont de plus en plus mal", glisse Maria Di Stefano, vice-présidente du Conseil supérieur des centres psycho-médicaux-sociaux en Fédération Wallonie-Bruxelles et représentante de Wallonie Bruxelles Enseignement (WBE).
Tous les élèves touchés à différents niveaux
Premiers témoins de ce mal-être grandissant au sein des écoles, les centres PMS ne comptabilisent pas le nombre d’étudiants qui ont récemment frappé à leurs portes pour exprimer de telles pensées.
"Mais toutes les situations qui étaient jusque-là compliquées se sont aggravées avec la crise", observe Gengoux Gomez, lui aussi vice-président du Conseil supérieur des centres PMS où il représente le réseau libre. "Par ailleurs, il y a énormément de familles que l'on n'attendait pas qui frappent désormais aux portes de nos centres. À l'instar de ce virus qui touche tout le monde à différents niveaux, on constate dans les écoles que tous les jeunes ont souffert ou souffrent toujours de cette crise, mais de façons différentes. Et, heureusement, certains se portent bien aujourd'hui."
Maria Si Stefano rembobine: "Au début, cela concernait surtout les jeunes des deuxième et troisième degrés du secondaire (NDLR: pour qui l'enseignement en hybridation avait été rendu obligatoire). Mais les autres élèves ont été également touchés. Le port du masque, la distanciation et les autres règles qui les ont empêchés de s'épanouir à des moments cruciaux ont fortement affecté ces élèves. Cela continue aujourd'hui et cela va encore se marquer dans le futur."
Un cadre qui a volé en éclats
Ce qui transpire dans toutes les observations réalisées sur le terrain scolaire, c’est que les jeunes ont en quelque sorte perdu leurs repères, souffrent de l’absence d’un cadre mis à mal.
"Jusqu'en mars 2020, beaucoup de jeunes n'auraient jamais remis en question le rôle de l'école", reprend Gengoux Gomez. Mais la crise et les mesures qui en ont découlé ont bouleversé cela. "L'école représentait un cadre bien établi. En remettant en question le rôle de celle-ci, c'est un sentiment d'insécurité que l'éloignement de l'école a provoqué chez de nombreux jeunes. Il n'y avait plus d'école, et donc plus de cadre, plus de limites face auxquelles se construire."
Le besoin d’être acteurs de leur vie
Cet éloignement de l’école a évidemment complètement chamboulé les contacts que les jeunes opéraient entre eux, ainsi que la vision que ceux-ci avaient de leur place au sein de la société.
" En 2019, les jeunes étaient portés par un mouvement qui les réunissait autour des enjeux climatiques, ils se sentaient appartenir à quelque chose et faire partie de quelque chose qui pouvait apporter un mieux pour la planète." Quelques semaines plus tard, les mesures dictées par la crise les coupaient dans ce bel élan et les renvoyaient chez eux. "Les jeunes ont besoin d'être acteurs, de se réapproprier leur vie. "