Baromètre Covid: le secteur culturel souffle le chaud et le froid
Le baromètre covid qui entrera en vigueur le vendredi 28 janvier prochain suscite des réactions divergentes au sein du secteur culturel.
Publié le 21-01-2022 à 22h39 - Mis à jour le 22-01-2022 à 08h47
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Avant de lire les deux réactions récoltées ce soir, un petit rappel s’impose. Le baromètre covid qui prendra effet vendredi prochain en code rouge permet à toutes les salles de moins de 200 personnes d’être ouvertes. Au-delà de cette capacité, les salles pourront être remplies à 70% voire 100% si certaines conditions de qualité de l’air sont remplies.
Pour Françoise Havelange, présidente de la Fédération des Employeurs des Arts de la Scène (FEAS), l’instauration de ce baromètre est positive. "Cette réouverture à 70% de capacité de jauge, avec possibilité d’ouvrir d’avantage si on a les mesures de ventilation qui sont correctes, permet d’envisager une reprise pour une majorité d’opérateurs culturels, estime notre interlocutrice. C’est une décision que nous considérons comme positive. Cette fois, le politique fait réellement une gestion de risque. Il n’a pas pris une décision illégitime et discriminatoire comme il l’avait fait en décembre dernier. C’est prudent et raisonnable, et cela donne une perspective."
Tous les petits lieux vont pouvoir continuer
Pour la présidente de la FEAS, c’est important de garder cette jauge minimale de 200 pour les petits lieux sans considération de ventilation ou autre. "Tous les petits lieux vont pouvoir continuer. Ce soir, j’étais dans une salle où il pouvait accueillir 500 personnes, et nous étions 200. Dans une semaine, ils pourront en accueillir 350."
D’une manière générale, Mme Havelange estime que c’est un signal positif envers la population. "C’est clairement reconnaître que les lieux de culture ne sont pas des lieux de contamination. Ce sont des lieux sûrs. C’est aussi important en termes d’adhésion de la population aux règles. Si on met trop de pression, le couvercle saute. Maintenant, on ne demande qu’une chose, c’est que le public revienne."
La présidente de la FEAS nous indique qu’il s’agit d’une réaction à chaud, et qu’il faut qu’elle se penche sur les points techniques, notamment en matière de normes de ventilation. "On verra ceux qui peuvent y arriver, et ceux qui devront peut-être s’équiper différemment. On a un peu de temps pour analyser."
Pierre-Alain Breeveld: «Trop de flou persiste»
Pierre-Alain Breeveld, président de la Fédération de la Culture indépendante (FCI), lui, est moins convaincu par ce baromètre covid. Pour notre interlocuteur, "trop de flou persiste". Et vendredi prochain, quand le baromètre entrera en application, cela ne devrait selon lui pas changer grand-chose pour le secteur culturel.
"Tout ce qui est sold out ne pourra pas redémarrer, car la plupart des responsables de salles avec qui j’ai été en contact m’ont dit que la norme ventilation de 900 ppm, ils ne l’atteignent pas. Même les salles les plus modernes n’ont pas ce taux-là. Donc, le 100% de capacité n’existera pas, dans les trois semaines qui viennent (NDLR: date du prochain Codeco)mais même dans le mois à venir, car si les choses changent lors du prochain Codeco, il faudra le temps de s’organiser et de relancer les choses"
Dans une salle à vide sans aucun spectateur, on est déjà à 700 ppm. Arriver à 900 ppm, c’est une aberration.
M. Breeveld conteste d’ailleurs cette norme de 900 ppm. "C’est une norme édictée pour le bien-être au travail pour des gens qui vont au bureau 38 h par semaine. Ici, on parle de gens qui vont passer deux heures dans une salle… Dans une salle à vide sans aucun spectateur, on est déjà à 700 ppm. Arriver à 900 ppm, c’est une aberration. Vous tirez des feux d’artifice dans une salle vide, vous arrivez déjà à 1200 ppm…"
Pour ceux qui envisageraient de rouvrir à 70%, ce n’est pas encore clair non plus. "Il faut voir quelles sont les conditions qui figureront dans l’arrêté royal. De toute façon, tous les concerts avec du public debout restent interdits. Pour le public assis, il faudra voir: est-ce que c’est 70% de la capacité totale de la salle, ou est-ce 70% qui s’ajoutent à la jauge de 200 personnes déjà autorisée? Je vais prendre l’exemple d’une salle de 300 places. 70% d’une salle de 300 places, cela signifie 210 personnes. Par contre, si 70% du résidu au-dessus de la jauge de 200, cette salle peut accueillir 270. Cela change tout. Là, on a vraiment besoin d’informations."
Contrairement à ce que dit M. De Croo, ce baromètre n’est pas quelque chose qui nous éclaire et nous donne des perspectives
Autre déception pour M. Breeveld concernant le baromètre: la jauge des personnes en unité de soins intensifs (usi) n’a pas été revue, comme le demandait le secteur. "On attend toujours des précisions quant aux paramètres qui font que l’on passe d’une phase à l’autre. On parle de deux paramètres: le nombre de gens en soins intensifs et le nombre d’hospitalisations. Or, pour l’instant, nous sommes dans une situation paradoxale puisque les soins intensifs diminuent mais les hospitalisations augmentent. Pour nous, ce point-là n’est vraiment pas clair. Et donc, contrairement à ce que dit M. De Croo, ce baromètre n’est pas quelque chose qui nous éclaire et nous donne des perspectives."
Une réunion technique est prévue lundi. "Je suppose que nous serons invités", avance le président de la FCI, qui a des craintes concernant une petite phrase de Pedro Falcon, le commissaire corona. Ce dernier a indiqué que le Codeco pouvait à tout moment prendre des mesures plus sévères. "Cette phrase n’est pas anodine. Cela laisse la porte ouverte à beaucoup de choses, et encore moins à la prévisibilité."
Enfin, plus largement, M. Breeveld estime que le secteur culturel est toujours particulièrement visé. "Au départ, cette idée de baromètre devait être valable pour l’ensemble de la société. Je sais qu’ils ont dit que d’autres secteurs seront contraints à d’autres mesures, mais une fois de plus, on constate que les mêmes secteurs sont ciblés, alors que d’autres ne le sont pas."