Placements: 76% des fonds supposés "durables" cotés 0/10 par Financité
L'offre de produits durables explose en Belgique, les montants investis aussi: +40% en un an. Sauf que l'appellation masque des réalités moins reluisantes, dénonce le réseau Financité dans un rapport.
Publié le 16-07-2020 à 10h00
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Soixante milliards d’euros. C’est le montant qui était investi dans des produits d’investissement socialement durables (ISR) à la fin de l’année dernière. Un chiffre, en augmentation de 40% sur un an, qui devrait réjouir le Réseau Financité, auteur du rapport rendu public ce jeudi. Sauf qu’une part de ces fonds n’a de réellement durable que le nom.
Le Belge est en attente de placements plus respectueux de l’environnement mais aussi des conditions de vie des travailleurs. Les mentalités évoluent et le temps où le client confiait son argent à un banquier sans trop être regardant semble en partie révolu.
L’an dernier, ce sont donc 59,94 milliards d’euros qui fructifiaient dans des fonds (52 milliards), des comptes d’épargne (2,57 milliards) ou des produits d’épargne durables (4,9 milliards).
«Tout le monde a bien compris que les produits financiers devaient être plus durables», se réjouit Charlaine Provost, chargée de projet chez Financité et co-autrice du rapport. Commission et Union européennes en tête, elles qui planchent sur une réglementation de la finance durable.
La demande est bien présente. Les banques l’ont compris et ont accru l’offre pour y répondre. Notamment BNP Paribas qui s’arroge à lui seul 31% du gâteau. Un marché dominé à 70% par la banque française, Candriam, KBC et NN Investment.
Actifs sur liste noire
Cet appétit des banques pour les produits durables devrait réjouir le réseau Financité qui a attribué une cote à chaque fonds. Et force est de constater que derrière cette croissance se cache une autre réalité. L’étiquette durable des 775 fonds passés à la loupe ne tient, pour une majorité d’entre eux, pas toutes les promesses.
«On ne sait pas pour 40% de ces fonds dans quel secteur ils investissent, décrypte Charlaine Provost. Mais ce n'est pas le problème le plus important. L'autre problème, c'est que pour 36% des fonds répertoriés, soit 259, on y retrouve des actifs qui sont sur liste noire, qui violent les conventions signées par la Belgique.»
Pire, «au moins un tiers a reçu le label ''Towards Sustainability'' de Febelfin, (la fédération du secteur bancaire, NDLR)», déplore la chargée de projet. Cette appellation lancée en 2019 est censée assurer que l'argent investit dans ce produit ne profitera pas à des «activités nuisibles pour les êtres humains, les animaux, la société ou la planète», dixit Febelfin.
Une définition précise d’un produit durable
Au final, seuls 184 (sur 775) ont reçu une note supérieure à zéro, en moyenne de 7,1 sur 10 (7,7 si l'on pondère en fonction des encours). Mais aucun ne dépasse la barre des 60%. «La plus grande partie des fonds étudiés (89 fonds) se situe dans la catégorie moyenne entre 21 et 44 (sur cent)», explique Financité.
Si le réseau souligne le glissement vers «une finance éthique et responsable », il rappelle qu'il «reste d'énormes efforts à fournir par le secteur pour parvenir à atteindre les objectifs qu'ils affichent ».
Et de lancer un appel aux politiques: «La Belgique a pris de l'avance à un moment donné. Il y a maintenant un réel besoin qu'elle avance en se coordonnant et qu'elle mette en place une définition précise de ce qu'est un fonds durable», insiste Charlaine Provost.