Genre: les stéréotypes sortiront renforcés
Les stéréotypes hommes-femmes n’échappent pas au confinement. On craint même que la crise les ait renforcés.
/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/DYTMCSUESZD7XCNAQT2XRKE22U.jpg)
- Publié le 11-04-2020 à 06h00
:focal(507x382.5:517x372.5)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/GJCDFBWHNNFSRIHQDXEPWK6ZIE.jpg)
Par la force du confinement, la cellule familiale est redevenue le «noyau central» de l’organisation sociale. Hommes et femmes cloîtrés à la maison, chacun dans son «rôle désigné» le plus souvent.
«Ce qu'on voit, c'est le retour d'une certaine idéologie familiariste. Face au coronavirus, la maison est un endroit protégé, et la famille un espace d'entraide», constate David Paternotte, sociologue de l'ULB, spécialisé dans les questions de genre.
Pour le meilleur?
«La cellule familiale est remise sur le devant de la scène, acquiesce Laura Merla, sociologue de la famille à l'UCL. Ce sont les ménages qui affrontent le confinement, mais les familles d'aujourd'hui sont très diverses. Et les liens intergénérationnels, eux, sont mis sous tension, parce qu'on ne peut plus visiter les grands-parents, sauf si on doit leur venir en aide pour les courses par exemple.»
C'est donc le couple, le plus souvent, qui encaisse la crise, avec les enfants. Pas toujours pour le meilleur, pas toujours pour le pire non plus. «Le travail domestique ne peut plus être fait par quelqu'un d'autre, puisque les contacts sont limités», souligne David Paternotte. Et sur ce plan, pas de miracle.
«On sait que, par habitude, les tâches ménagères vont retomber sur les femmes. On craint que les stéréotypes de genre sortent encore renforcés de cette crise», souligne le sociologue de l'ULB qui, avec ses étudiants, a ouvert un blog (*) où les témoignages publiés ne laissent guère de doute sur le fait que les stéréotypes de genre ont la peau dure.
«Le témoignage qu’on a, c’est que les choses n’ont pas trop bougé. Les hommes font certaines tâches qui sont leur apanage, comme la vaisselle ou allumer le barbecue, on en voit beaucoup dans les magasins pour faire les courses, mais s’ils ont souvent l’impression d’en faire beaucoup, en nombre d’heures, ce sont les femmes qui en font le plus.»
«Les hommes sont plongés dans le bain, mais dans un bain avec beaucoup de remous, constate de son côté Laura Merla. Certains couples étaient déjà dans le partage des tâches. Maintenant, tout est concentré dans les murs de la maison, avec la difficulté particulière qu'il faut en plus occuper les enfants confinés.»
Redéfinir sa place
Cette situation va-t-elle redistribuer les rôles? «Quand on a perturbé un système, il faut redéfinir la place de chacun, répond la sociologue. La durée du confinement sera importante, mais on ne sait pas du tout à quoi va ressembler la sortie de crise. Ça peut renforcer les inégalités de genre, mais il y aura aussi des mamans qui, par la suite, vont vouloir faire un gros break, ou externaliser toutes les tâches ménagères.»
«C'est très compliqué de prédire ce qui va se passer, estime aussi son collègue de l'ULB. On peut imaginer que cela pourrait amener un "on ne peut pas continuer comme cela", que les gens auront envie, quand ce sera fini, de compenser et de récupérer un espace de liberté. Mais le plus probable, c'est de voir les routines du quotidien se reproduire.»
(*) Blog «Sexe et genre sous confinement».