«J’aurais pu arrêter l’élevage»
Adrien Paquet ose le dire: «Si les résultats des recherches avaient été négatifs, j’aurais sans doute arrêté l’élevage, parce qu’il n’y aurait plus eu d’avenir.»
- Publié le 30-03-2019 à 06h00
:focal(507x419:517x409)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/RXPRSRGT7JCANIOPSQTARRTXTE.jpg)
Agriculteur dans une ferme mixte – cultures et production de blanc-bleu – à Dorinne, dans le Condroz namurois, il a accepté en 2010 de placer ses prairies sous le monitoring des chercheurs de Gembloux Agro Bio Tech.
Objectif? Établir un bilan complet des gaz à effet de serre de ses prairies permanentes où pâturent 230 bovins. Respiration du sol et de la végétation, photosynthèse, méthane émis par les animaux… tout a été mesuré par de multiples capteurs et une station météo installée sur place. Les résultats complets de cette étude ne sont pas encore publiés mais faisaient l’objet d’une défense de thèse hier à la faculté d’ingénierie biologique.
«Mais en gros, on peut déjà conclure que pendant la période de pâturage, entre avril et novembre, le bilan des émissions de gaz à effet de serre (GES) est neutre, voir légèrement négatif», note l'éleveur namurois. Et si pendant l'hiver on valorise l'herbe en fourrage pour le bétail, on peut clairement dire que les prairies sont un puits de carbone, avance-t-il.
Pour Adrien Paquet, ces résultats plaident pour le maintien d'un élevage lié à l'herbe et battent en brèche ceux qui veulent moins de viande dans l'assiette. «Je pense plutôt qu'on mangera «mieux» et donc que la part de viande telle qu'on la produit en Wallonie va augmenter. Car si on ne peut plus exploiter ces prairies, que fera-t-on? On va les retourner pour y mettre des cultures et, là, on va clairement augmenter le bilan carbone.»
Pour autant, Adrien Paquet ne dit pas que ces résultats doivent dédouaner le monde agricole de tout effort dans la lutte contre le réchauffement climatique. Au contraire, cela le pousse à améliorer ses techniques et la gestion de sa ferme. Parce que c’est aussi une nécessité économique, dit-il. Comme beaucoup d’agriculteurs wallons, il a ainsi fortement augmenté l’autosuffisance alimentaire pour son bétail.
Le même raisonnement économico-environnemental influence aussi ses pratiques culturales. «Je produis ainsi plus de compost, car il émet moins de GES que le fumier. J'ai aussi expérimenté l'agriculture de conservation.» Une technique apparentée à la permaculture où l'on travaille peu le sol, où on le couvre au maximum avec des légumineuses et où l'on pratique les cultures associées.
«J'ai eu de très bons résultats en semant du froment dans le colza, dit-il. Je pense que ces techniques peuvent même avoir un impact positif plus fort que le bio. Mais je suis prudent, j'expérimente encore car c'est aussi mon revenu qui est en jeu.»