La Belgique joue sa crédibilité

En pleine tourmente nationaliste, la Belgique endosse la présidence de l'Union européenne. Yves Leterme dit tirer sa légitimité du consensus des Régions.

Catherine Ernens

Un parterre de dizaines de journalistes. Un logo stylé aux couleurs de la Belgique sur des écrans géants. Les langues de l'Europe entière se saluent et se croisent. La salle de presse du Juste Lipse, au coeur du district européen installé à Bruxelles, fait le plein.

Yves Leterme vient présenter la présidence belge de l'Union européenne. À sa droite, son colistier du CD&V, ministre des Affaires étrangères, Steven Vanackere. À sa gauche le secrétaire d'État aux Affaires européennes, le MR Olivier Chastel.

« La présidence permanente, on l'a déjà avec mon prédécesseur, Herman Van Rompuy. La présidence rotative arrive », sourit Yves Leterme, le Premier ministre démissionnaire. La Belgique présente un programme sobre et ciblé. « La Belgique endossera un rôle de facilitateur dans le processus de codécision européen », annonce l'homme qui avait fait 800 000 voix.

La Belgique veut assurer la stabilité, mettre en place concrètement le traité de Lisbonne et s'attaquer au gros souci qu'est la crise financière et sociale. En gros. Yves Leterme parle de « nos citoyens qui ont trop souffert des spéculations honteuses » et du retour à la croissance comme priorité ». Il prône d'aller vers une « économie verte compétitive ».

« La Belgique est fin prête. Nous avons mis un soin particulier pour préparer cette présidence depuis deux ans. C'est notre douzième présidence », vante le Premier ministre intérimaire. Et de rappeler au passage son passé de fonctionnaire européen.

Puis, comme pour évacuer un malaise diffus sur sa propre légitimité et celle de son gouvernement démissionnaire, il argue : « Ceci est le programme mis au point avec les Régions et les Communautés. Il y a un vrai consensus entre les différents pouvoirs belges » . Des murmures s'échangent, des rires échappent. Yves Leterme continue : « Quand on traduit le résultat des élections, ce programme bénéficie à la Chambre du soutien de 130 des 150 députés belges ». Là, les journalistes étrangers font des yeux ronds ou battent des cils. De quoi parle-t-il, le Premier ministre belge, là ?

Plus tard, le journaliste flamand fondateur du « Morgen » et aujourd'hui chef du bureau européen de l'agence Belga, saisira la balle au bond. « La Belgique devra répondre à la question : croit-elle encore en l'Europe au vu de ce qui se passe dans le pays. L'Europe c'est l'unité dans la diversité, le contraire de ce qui se passe en Belgique. Cette présidence est un vrai test de crédibilité » . Le trio ministériel s'éponge le front.

Cependant, pas un seul journaliste étranger ne poursuivra l'équipée belge sur les remous politiques internes. Le principal intérêt de la presse européenne porte sur l'adhésion possible de nouveaux pays membres, notamment les Balkans, et la position belge en la matière. Dans l'atmosphère lisse de l'Union européenne, tout glisse, tout se lisse.

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