La France va-t-elle légaliser l’euthanasie et le suicide assisté ?
La France ouvrira-t-elle la voie à la légalisation de l’euthanasie, comme le demande une Convention citoyenne ? Macron a demandé ce lundi au gouvernement un projet de loi sur la fin de vie d’ici l’été 2023.
/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/CRSZYERFAVBHFGMG65NHVI5IJI.jpg)
- Publié le 03-04-2023 à 17h10
- Mis à jour le 03-04-2023 à 17h22
:focal(544.5x371.5:554.5x361.5)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/ILLFVUYMBRBOPM53UQZCTQVOFU.jpg)
Ils étaient 184 à l’Élysée ce lundi matin. 184 citoyens et citoyennes français à venir présenter au président de la République le fruit de leur travail. Tirés au sort, ces citoyens ont participé à une Convention citoyenne (la 2e du genre) sur la fin de vie. Au total, 27 journées de débat, d’auditions d’experts en tout genre. Le tout, en 4 mois. Pour finalement se positionner majoritairement (76 %) en faveur de l’aide active à mourir, à savoir l’euthanasie et le suicide assisté (interdits aujourd’hui en France).
"C’est la modalité la plus adaptée pour respecter la liberté de choix des citoyens et combler les insuffisances du cadre légal actuel, notamment les limites de la sédation profonde et continue", ont indiqué les deux citoyens qui ont pris la parole.
Une ouverture assortie de conditions strictes et de contrôle. Des critères ont d’ailleurs été jugés prioritaires par les 184 citoyens: le discernement, l’incurabilité, le pronostic vital engagé,… Avec également la nécessité d’un parcours d’accompagnement et d’une clause de conscience pour le personnel soignant.
23,2% des citoyens se sont prononcés contre, soulignant les risques de dérives pour les personnes vulnérables notamment. 21,7% ont par contre plaidé un accès universel (sans autre condition que la volonté du patient).
Quant à l’accès pour les mineurs, les avis étaient trop partagés, selon la Convention citoyenne qui a par ailleurs plaidé pour un renforcement de l’accès aux soins palliatifs.
"Un premier pilier"
En guise de réponse, Emmanuel Macron a tout d’abord annoncé lundi, devant ces 184 citoyens, un "plan décennal national" pour les soins palliatifs, "avec les financements qui s’imposent".
Et de rappeler que si les lits palliatifs sont passés en France de 7 500 en 2019 à 9 526 en 2022, "la progression est trop lente et inégalement répartie. […] 21 départements de plus de 100 000 habitants ne disposent pas de tels lits".
Emmanuel Macron veut aussi avancer sur la formation des professionnels de la santé, fixer un seuil de lits palliatifs par territoire, poursuivre le développement des soins palliatifs à domicile et mieux soutenir les aidants.
"Opinion personnelle"
Quant à l’aide active à mourir, le président a dit souhaiter la mise en place d’un "modèle français de la fin vie". Il a chargé le gouvernement de préparer un projet de loi d’ici la fin de l’été, "sur base de cette référence solide qui est celle de la Convention citoyenne".
Le chef d’État a rappelé les balises (discernement, clause de conscience, etc.) émises par les citoyens: "ces lignes rouges paraissent utilement encadrer l’hypothèse d’un modèle français de la fin de vie et constituent un point de départ", a-t-il dit, tout en fermant la porte à l’aide à mourir pour les mineurs.
Souvent interrogé sur sa position, le président a rappelé avoir une "opinion personnelle qui peut évoluer", mais en tant que chef de l’État aussi une "responsabilité de concorde et une volonté d’apaisement".
Le dossier est désormais entre les mains du politique. Si la légalisation de l’euthanasie et du suicide assisté trouve les faveurs de la gauche et d’une partie du centre, elle se heurte à de larges réticences à droite. Sans parler de l’opposition de l’Église catholique de France.
En attendant, alors que la colère gronde dans la rue sur la réforme des retraites, Emmanuel Macron n’a pas hésité ce lundi – au lendemain même des conclusions de la Convention citoyenne – à saisir l’occasion de se montrer à l’écoute des citoyens. Encore faut-il désormais traduire les attentes en texte concret.
D’autres Conventions citoyennes
Il a d’ailleurs dit vouloir étendre les Conventions citoyennes à d’autres sujets.
S’il avait été reproché au gouvernement français d’avoir négligé les conclusions d’une première Convention sur le climat (2019-2020), Emmanuel Macron a reconnu "des imperfections liées à la méthode, au suivi" mais estimé que cette Convention sur la fin de vie avait "bénéficié" des leçons tirées.
Pour rappel, la Belgique a été l’un des premiers pays européens à autoriser l’euthanasie en 2002, il y a plus de 20 ans. L’euthanasie est également légale aux Pays-Bas, au Luxembourg et en Espagne.