Débat présidentiel: Macron à l’aise, Le Pen à la peine
Le débat de l’entre-deux-tours de l’élection française a très vite viré à l’avantage du président sortant.
Publié le 21-04-2022 à 08h27 - Mis à jour le 21-04-2022 à 10h01
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C’est le rendez-vous incontournable dans une élection présidentielle française: le débat d’entre-deux-tours, qui depuis 1974 confronte, en direct à la télévision, les vues des deux prétendants au poste suprême. Avec une exception notable en 2002, lorsque Jacques Chirac, le président sortant d’alors, refusa de débattre avec Jean-Marie Le Pen, fondateur du front national et invité surprise au second tour de l’élection présidentielle. Vingt ans plus tard, c’est sa fille, Marine Le Pen, qui – comme en 2017 – affrontait ce mercredi soir le président sortant, Emmanuel Macron.
Faux départ pour Le Pen
Pour débuter ce show "millimétré", où même la température du studio doit faire l’objet d’un accord des équipes des candidats ( lire notre édito ), c’est Marine Le Pen qui a été tirée au sort en vue d’entamer les hostilités, et sur un thème qu’elle cultive depuis le début de sa campagne: le pouvoir d’achat. Il s’agissait donc pour elle de faire mouche d’emblée, alors que les thèmes susceptibles de la mettre en difficulté (international, environnement, jeunesse) n’arrivaient que plus tard.
Or, dès l’entame, Marine Le Pen a trébuché: juste avant de parler pouvoir d’achat, il était en effet attendu qu’elle présente brièvement son projet pour la France. Une petite introduction "zappée" par la candidate, qui commença à disserter sur le pouvoir d’achat… dans le vide. "Oserais-je vous interrompre?" , lança timidement le journaliste Gilles Bouleau, l’invitant à présenter une synthèse de son projet au préalable. Un faux départ de mauvais augure. Marine Le Pen expliqua donc vouloir rassembler les Français autour d’un projet "de concorde" , quand Macron rappela l’heure grave traversée par le pays et l’Europe, en particulier la guerre en Ukraine.
L’économie, c’est du sérieux
Passés ces entrefaites, la candidate d’extrême droite put dérouler ses projets concernant le pouvoir d’achat, afin de "restituer leur argent aux Français" , en s’appuyant par exemple sur le blocage des prix (notamment de l’énergie), hausse des salaires, etc.
Mais, comme en 2017, la candidate s’est très vite retrouvée en difficulté sur ces questions économiques. L’ancien banquier corrigea vite Marine Le Pen: sur les chiffres (inflation, croissance, chômage), mais aussi sur les positions passées de son parti, en particulier sur… le blocage des prix.Ce qui suscita peu de contestation de la part de Marine Le Pen. "Ce que vous avez dit est factuellement faux" , a conclu Macron au terme d’une longue démonstration, ajoutant: "vos mesures ne sont pas ciblées du tout, pas efficaces, injustes."
Le pire était à venir pour la candidate d’extrême droite, le thème suivant touchant au "rôle de la France dans le monde". Emmanuel Macron rappela à cette occasion la gravité de la situation en Ukraine, et surtout se montra extrêmement offensif à l’égard de Marine Le Pen à propos de la Russie, et du prêt contracté par son parti, le RN, auprès d’une banque proche des milieux poutiniens. "Vous dépendez de Poutine car vous dépendez d’une banque russe. Vous parlez de votre banquier quand vous parlez de la Russie" , lança Emmanuel Macron.
Pour prouver son soutien à l’Ukraine, Marine Le Pen a fini par brandir un tweet qu’elle aurait écrit en 2014, plaidant pour une Ukraine délivrée des influences russe, américaine ou européenne. Cette année-là (2014), Marine Le Pen avait salué le référendum en Crimée, qui avait servi de prétexte à Poutine pour annexer cette région.
Les questions d’écologie et de réchauffement climatique semblèrent arriver bien tard dans ce débat au prémisses un brin techniques. "Vous êtes climato-sceptique" , attaqua de nouveau le président sortant, pointant le vide du programme de la candidate sur ce sujet. Celle-ci traita pour sa part son interlocuteur de "climato-hypocrite" , estimant que les mesures écologiques proposées par Emmanuel Macron pénalisaient les classes moyennes et modestes - une référence à peine voilée aux gilets jaunes.
Sans surprise, les questions liées à la laïcité ont permis à Marine Le Pen d’afficher sa xénophobie, en particulier à l’égard des musulmans. « Vous allez créer une guerre civile » , a prévenu Emmanuel Macron.