Le fret maritime en quête d’alternatives
Le blocage prolongé du canal de Suez déroute des navires par le cap de Bonne Espérance. Et la Russie promeut la «Route du Nord».
Publié le 27-03-2021 à 06h00
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Faudra-t-il quelques jours ou quelques semaines pour débloquer le canal de Suez? Une opération visant à renflouer le porte-conteneurs de 400 mètres de long qui y est coincé «n'a pas réussi» ce vendredi, a indiqué la Bernhard Schulte Shipmanagement (BSM), basée à Singapour qui assure la gestion technique du navire. «Deux remorqueurs supplémentaires de 220 à 240 tonnes» arriveront sur place d'ici à dimanche pour aider à la remise à flot du navire, a-t-elle annoncé.
Embouteillages
L’incident, survenu mardi sous l’effet de vents violents combinés à une tempête de sable, selon différentes sources, a entraîné des embouteillages massifs.
D'après la revue spécialisée Lloyd's list, plus de 200 navires sont bloqués aux deux extrémités et dans la zone d'attente au milieu du canal, entraînant d'importants retards dans les livraisons de pétrole et d'autres produits.
Le géant du transport maritime Maersk et l'allemand Hapag-Lloyd ont dès lors indiqué jeudi qu'ils envisageaient de dérouter leurs navires et de passer par le Cap de Bonne Espérance, soit un détour de 9 000 kilomètres et 10 jours supplémentaires autour du continent africain.
Or, les coûts globaux sont élevés dans le domaine du transport maritime. Selon Lloyd's list, le porte-conteneurs de plus de 220 000 tonnes coincé bloque chaque jour l'équivalent d'environ 9,6 milliards de dollars (8,1 milliards d'euros) de marchandises.
Une importante marée haute, prévue en début de semaine prochaine, pourrait peut-être aider à le débloquer.
Près de 19 000 navires ont emprunté le canal en 2020, selon l'autorité égyptienne qui le gère (SCA), soit une moyenne de 51,5 navires par jour. Et selon un rapport de l'assureur Allianz Global Corporate & Speciality sur la sécurité maritime, «le canal de Suez présente un excellent bilan de sécurité dans l'ensemble».
L’alternative russe
Mais selon un responsable de la diplomatie russe, Nikolaï Korchounov, le blocage du canal de Suez «a mis en lumière la nécessité avant tout de la poursuite du développement de la Route maritime du Nord», voie maritime à travers l'Arctique russe.
À mesure que la banquise y recule sous les effets de la hausse des températures, la Russie y développe une voie commerciale qui relie de manière fiable l’Europe à l’Asie. Mais si le changement climatique rend le projet plus réaliste, ce trajet est très coûteux et ne peut pas encore être suivi par des navires commerciaux classiques.
Et la médaille a un gros revers: la fonte du pergélisol (ou permafrost) menace des infrastructures stratégiques et risque de libérer de volumes de méthane et de CO2 dans l’atmosphère qui peuvent aggraver le dérèglement climatique, et générer des catastrophes naturelles – incendies, inondations, arrivées d’espèces invasives – déjà en augmentation.