Brexit: messieurs les Anglais, tirez les premiers…
Aujourd’hui, le Brexit sera officiellement «activé». Neuf mois après le référendum de sortie de l’Union, on va commencer à négocier le divorce.
Publié le 29-03-2017 à 07h27
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Le 23 juin 2016, le jour où 52% des Britanniques ont choisi par référendum de quitter l’Union européenne, on a parlé de cet article 50 du Traité de Lisbonne.
C’est lui qui déclenche officiellement le processus de retrait volontaire et unilatéral d’un État membre. Il sera activé ce mercredi 29 mars, pour la première fois dans l’histoire de l’Union. Les négociations vont pouvoir commencer.
1. On va négocier quoi?
«On va d'abord négocier un accord de retrait, c'est-à-dire un accord sur les modalités du divorce», explique Marianne Dony, professeur de Droit européen à l'ULB. Les deux parties, Royaume Uni et Union européenne, ont deux ans pour clôturer une relation de 43 ans. Ils vont discuter de l'avenir des fonctionnaires britanniques à Bruxelles, du budget, de la dette, des différents fonds dont bénéficient les Britanniques…
2. Et après le divorce?
Une fois l'accord de retrait sur la table, ce n'est pas fini. «Ce premier accord doit régler les affaires du passé. Mais il faut aussi négocier les relations futures» Et ça va prendre encore un certain temps. Comme dans un divorce, donc, une fois qu'on sait qui garde la voiture et à combien est estimée la maison, on tente de se mettre d'accord sur la façon dont on va continuer à se voir. «Parce qu'il faut continuer à se parler, trouver les meilleures relations possibles sur une base de réciprocité, de donnant-donnant », précise Marianne Dony. Le tout pourrait prendre 5 ans, estime Nathalie Brack, politologue au Centre d'étude la vie politique (Cevipol, ULB).
3. Qui va négocier?
Une fois que la Commission européenne aura reçu mandat du Conseil européen (à qui est destiné le courrier actant le Brexit), c'est le Français Michel Barnier qui va s'asseoir à la table face au Royaume Uni. Il est le négociateur en chef de la Commission européenne pour le Brexit. « Il aura évidemment toute une équipe à ses côtés», rassure Marianne Dony. Mais il n'aura pas carte blanche, ajoute Nathalie Brack: « Il est en effet probable que son mandat sera strict, avec une marge de manœuvre étroite ».
4. Avec quels arguments?
Dans le jeu des Britanniques, il y a clairement deux axes: la libre circulation des citoyens contre l'accès au marché économique. «Au Royaume-Uni, les gens sont prêts à accepter une certaine libre circulation des personnes, même si ça reste très sensible, en échange d'un accès relatif au marché européen », résume Nathalie Brack. Et du côté de l'Union? «Jusqu'à présent, c'est le black-out complet. On ne dévoile rien de la ligne de négociation de l'Europe», constate Marianne Dony. Pour des raisons stratégiques évidentes: pas question de montrer son jeu alors qu'on n'a rien demandé. C'est une version moderne du «Messieurs les Anglais, tirez les premiers…» Un Conseil européen spécial se tiendra sans doute à la fin des vacances de Pâques pour définir les grandes orientations.
5. Et si les négociations échouent?
« C'est envisageable, confirme Marianne Dony. S'il n'y a pas d'accord de retrait, il n'y a pas de transition et encore moins d'accord définitif». Ça ferait des dégâts. Du jour au lendemain, les Britanniques cessent de contribuer au budget européen. « Mais, à l'inverse, les agriculteurs britanniques ne reçoivent plus un centime. Après tout, ils trouveront peut-être plus intéressant de tout solder en une fois. Le Royaume Uni est un contributeur net de l'Union (il donne plus qu'il ne reçoit, comme tous les États membres les plus riches)».