Le Congo s'en met-il plein les poches?

ANALYSE ET TABLEAU | Les déclarations du ministre De Gucht jettent la suspicion sur l'argent de la coopération versé au Congo. Mais c'est à tort. Explications.

Catherine Ernens
Le Congo s'en met-il plein les poches?
115718 ©(photo Belga)

L'argent que la Belgique verse au Co ngo valse-t-il dans la poche du gouvernement Kabila ou d'autres potentats locauxcongolais? Depuis les déclarations du ministre des affaires étrangères, Karel De Gucht, l'idée est dans l'air. Nous avons tenté d'y voir plus clair.

Le Congo est le pays qui reçoit le plus parmi les 18 nations prioritairement aidées par la Belgique. Soulignons au passage que le Congo compte grosso modo 70 millions d'habitants, ce qui est colossal et justifie en soi l'importance de la somme allouée.

Par ailleurs, il existe quatre systèmes dans la gestion de l'argent de la coopération. Pour le Congo, le système de versement de l'argent est celui qui est le plus protégé. Il s'agit de ce qu'on appelle une «aide en régie». L'aide en régie est utilisée dans les pays les plus déglingués en termes de démocratie. C'est le cas du Congo qui sort (difficilement) de longues années de guerre. L'argent versé cash est géré en circuit fermé par les coopérants belges.

Lorsque le Congo sera géré plus démocratiquement l'aide pourra relever de la «cogestion», comme cela se pratique actuellement entre la Belgique et le Rwanda par exemple. Dans ce cas, l'argent arrive sur un compte en banque où la cosignature du coopérant belge et du ministre compétent sont nécessaires.

Le troisième niveau, dans l'échelle de la confiance de la Belgique face au pays aidé, est «l'exécution nationale». Des avances de fonds sont alors faites par la Belgique sur base d'accords spécifiques avec des résultats à atteindre. C'est le système utilisé aujourd'hui dans l'aide belge apportée au Vietnam.

Enfin, quatrième étape, l'aide peut être directement versée au budget de l'État. Cela ne se fait, dans ce cas, qu'avec l'aval d'organisations internationales (comme le FMI) et en partenariat avec un ou plusieurs autres pays donateurs. La Belgique procède ainsi aujourd'hui en Tanzanie ou Ouganda pour des projets de santé.

Au Congo, on s'en tient au système le plus sécurisé. L'argent reste entre les mains des Belges. «Cela n'implique en rien une déresponsabilisation du gouvernement congolais. Les projets d'aide tiennent compte des cinq grands chantiers de Kabila, par exemple. Mais toute la gestion de l'argent est faite par la coopération technique belge (CTB). Les possibilités de détournement de fonds sont quasiment impossibles», explique Jean-Christophe Charlier, expert pour les questions de gouvernance et de coopération en Afrique au cabinet de la Coopération.

L'argent belge versé au Congo est-il détourné? La réponse est non. Les populations congolaises crèvent-elles la misère? La réponse est oui. Karel De Gucht a-t-il raison de dénoncer la corruption qui gangrène le Congo? Peut-être: c'est un choix diplomatique qui lui appartient. Oui, la corruption fait du mal au Congo, c'est une vérité. Mais il ne s'agit en rien d'un détournement d'argent belge. La nuance est de taille.

Pas d'angélisme pour autant: on avoue ici ou là des cas isolés de corruption au niveau de la coopération. Mais ils sont minimes, nous assure-t-on. Et surtout, ces cas ont été repérés et stoppés net grâce aux mécanismes de protections supplémentaires mis en place par notre pays.

  • 1. Congo (RDC) 177.049.368 €
  • 2. Rwanda28.134.133 €
  • 3. Burundi26.735.203 €
  • 4. Afrique du Sud 19.733.912€
  • 5. Sénégal 18.165.027 €
  • 6. Vietnam15.742.592 €
  • 7. Niger 15.077.302 €
  • 8. Equateur 13.648.951 €
  • 9. Palestine 13.492.332 €
  • 10. Pérou13.057.896 €
  • 11. Ouganda 11.827.106 €
  • 12. Tanzanie 11.708.092 €
  • 13. Bénin 11.340.999 €
  • 14. Mali 10.565.270 €
  • 15. Algérie 10.494.120 €
  • 16. Mozambique10.202.232 €
  • 17. Maroc 8.092.476 €
  • 18. Bolivie 6.069.574 €

La Belgique a recentré son aide sur 18 pays. Les montants indiqués comprennent la totalité de l'aide apportée, que ce soit en "bilatéral" (de pays à pays), via des ONG ou via des organisations internationales (chiffres de 2006). La République démocratique du Congo se taille la part du lion.

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