Covid et crise financière : le blues des professionnels du déguisement malgré le carnaval
En Wallonie, le carnaval constitue un ballon d’oxygène pour les commerçants spécialisés dans la location et la vente de déguisements, en difficulté depuis la crise du Covid.
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- Publié le 15-02-2023 à 18h26
“Ce n’est plus comme avant ! ” Au comptoir du magasin “Le Feu Follet”, Annick Firens attend les clients en ce lundi matin. À une semaine des premiers carnavals belges, la commerçante namuroise le constate à regret : “Depuis trois ans, on subit un ralentissement de l’activité. ”
“Le Covid a fortement impacté notre secteur. Les clients ne se déplacent plus : ils ont pris l’habitude d’acheter en ligne avant de se rendre en magasin”, résume celle qui loue et vend des déguisements depuis 33 ans. “On est de plus en plus souvent considéré comme la cinquième roue du carrosse : on vient vers nous quand la livraison fait défaut ou que la qualité du costume pose problème. ”
De moins en moins nombreux en Wallonie, les professionnels du secteur se sentent incompris. “Amazon est devenu notre principal concurrent. Pourtant, la qualité des costumes que la plateforme vend n’a rien à voir avec ce que nous proposons”, souligne Virginie Gelders de “Festy-Party”, à Rocourt. “Chez un commerçant, on paie aussi le service après-vente, ce qui n’est pas le cas des revendeurs en ligne où la rentabilité prévaut sur tout le reste. ”
Face à “la jeune génération qui privilégie principalement” les multinationales, mais aussi les clients dont “le budget a fondu de moitié” en raison de la crise économique des derniers mois, la demi-dizaine de professionnels interrogés reconnaît perdre désormais jusqu’à 20 % de son chiffre d’affaires. Pour Annick Firens, c’est clair : “À ce rythme-là, les affaires familiales sont vouées à disparaître… ” Ou à changer leur fusil d’épaule.
De plus en plus souvent axés sur la vente d’accessoires, moins chères que les costumes, les commerces de déguisements s’adaptent et “chouchoutent encore plus les habitués”. Comment ? “En les accompagnant dans leur choix et en trouvant des solutions adaptées à leur budget”, détaille la propriétaire du “Feu Follet” qui reconnaît que, “dans le contexte actuel, les fêtes de carnaval nous amènent de nouveaux clients” et un ballon d’oxygène bienvenu.
“Depuis quelques années, on modifie aussi notre façon de travailler en jouant sur les stocks”, poursuit Virginie Gelders. “Nous proposons toujours autant de déguisements mais on diminue le nombre de commandes. En clair, là où on possédait cinq tailles différentes en magasin pour un même ensemble, on n’en trouve plus que trois actuellement. ”
Avec ses 14.000 accoutrements en stock, “Au petit farceur”, à Tamines, mise aussi sur son offre colossale. “On est spécialisé dans la location de costumes pour de grands groupes. On peut donc fournir le même ensemble à plusieurs dizaines de personnes, de 2 ans jusqu’aux tailles les plus larges, sans que ça ne soit un souci”, explique le gérant Marc Clause. “Ce créneau, c’est notre force. C’est ainsi qu’on parvient notamment à se démarquer de la concurrence d’internet. ”
“Et puis, il y a l’entraide entre commerçants”, sourit Marc Clause. “Avec le “Feu follet”, on a noué de très bons contacts, par exemple. Si on ne parvient pas à satisfaire un client, on n’hésite pas à l’envoyer à Malonne où l’on sait qu’il trouvera son bonheur. Et Annick (Firens, NDLR) fait la même chose de son côté. ” Histoire que chacun puisse toujours trouver costume à sa taille.
Carnaval 2023 : “Le prix des costumes a doublé”
Résultat d’une concurrence de plus en plus exacerbée, certains costumes, très demandés, sont en rupture de stock à l’approche de carnaval. Exemple avec le déguisement de “Mercredi”, victime de son succès sur Netflix.
“Les grossistes ont été marqués par les crises successives. Aujourd’hui, ils ne veulent plus se retrouver avec des déguisements qui dorment dans les armoires”, explique Marc Clause, le propriétaire du magasin “Au petit farceur” à Tamines. “Pour limiter au maximum les pertes financières, les fabricants calculent donc au plus juste pour favoriser le turn-over. ” Résultat des courses ? Certains articles sont indisponibles plusieurs semaines avant les festivités… et leur prix s’envole. Des prix qui ont déjà pas mal augmenté en 2023.
“Les costumes sont plus chers maintenant”, reconnaît Virginie Gelders de “Festy-Party”, à Rocourt. “Dans certains nouveaux catalogues, on a vu des costumes doubler voire tripler de prix. ” Pour beaucoup de spécialistes, l’origine de cette hausse de prix est double : l’inflation, qui touche tous les secteurs, mais aussi la volonté des fabricants de “se refaire une santé” après des années compliquées sans festivités.