L’automobile européenne exige un sursaut de l’Union
Confrontés à un marché automobile déstabilisé, et à la concurrence soutenue de la Chine et des USA , les constructeurs européens sont inquiets. Ils le font savoir à la Commission européenne qui va présenter les grandes lignes de son green deal.
Publié le 31-01-2023 à 17h30 - Mis à jour le 31-01-2023 à 17h31
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L’électrification de l’automobile progresse: 25 constructeurs proposent désormais une quarantaine de modèles électriques, alors qu’ils n’étaient encore qu’une dizaine en 2012. Mais le manque d’infrastructures de recharge constitue un problème majeur en Europe: 2 000 bornes publiques sont installées chaque semaine, alors que la moyenne hebdomadaire devrait être de 14 000 si on veut assurer la transition vers la mobilité électrique prônée d’ici 2035, estime Luca de Meo, le nouveau président de l’Association des constructeurs automobile européens (Acea).
Les prix ne baisseront pas
"On ne peut pas empêcher les gens du sud de l’Italie ou de l’Espagne de conduire une voiture. Et c’est ce qui va arriver", s’alarme le patron milanais, qui est aussi le CEO de Renault. Actuellement, à peine 1,5% des 250 millions de voitures qui circulent sur les routes européennes sont full électriques, et les estimations tablent sur 25% en 2030. Mais les disparités sont fortes, avec des pays nordiques, l’Allemagne ou les Pays-Bas, largement en pointe. La demande de voitures électriques reste néanmoins insuffisante pour atteindre, dans le temps imparti, la masse critique nécessaire à la transition.
Et le prix des voitures électriques restera élevé, prévient-il, 80% du coût d’une batterie étant lié aux matières premières, dont l’Europe n’a pas la maîtrise. "On arrive avec une nouvelle technologie et on s’attend à ce que ce soit moins cher, mais ça ne marche jamais ainsi. La spéculation sur les matières premières ne permettra pas qu’il en soit autrement." D’ici 2030, 5% des matières premières nécessaires aux batteries proviendront d’Europe.
L’Acea s’oppose fermement à la norme Euro7 que prévoit la Commission européenne. Parce qu’au regard des coûts énormes que cette nouvelle norme va engendrer (en particulier pour les tests), le bénéfice environnemental, sur la courte période qui nous sépare de 2035 n’en vaut pas la peine. "Les moyens substantiels mis pour en revenir à développer des moteurs thermiques pourraient être mieux utilisés pour des technologies zéro émissions, exemptes de CO2 mais aussi de polluants", souligne le président de l’Acea. Pour le client, il estime que la norme Euro7 entraînera un surcoût de 2000€ à l’achat de sa nouvelle voiture.
Une stratégie claire
Tandis que la Chine et les USA ont mis en place des politiques agressives de soutien à leurs industries, l’Europe se perd dans les régulations, déplore l’Acea. Les autorités européennes s’apprêtent à dévoiler les grandes lignes du Green Deal, et Ursula von der Leyen a laissé entrevoir, à Davos, un assouplissement des aides d’État pour financer les technologies propres, mais l’association des constructeurs redoute malgré tout l’inertie du Vieux continent.
Les États-Unis ont mis 369 milliards de dollars sur la table dans le cadre de leur loi de réduction de l’inflation. Face à cela, l’Association des constructeurs européens — qui rappelle que son industrie représente 13 millions d’emplois, 32% de la recherche et développement et 374 milliards en taxes pour les gouvernements — exige de l’Europe une vision, un cadre stratégique cohérent, assorti d’échéances réalistes, permettant entre autres des investissements plus rapides. Luca de Meo ne plaide pas pour du protectionnisme, mais pour un marché ouvert où "l’industrie européenne a intérêt à être concurrentielle."