Micro-citadines: l’émergence d’une autre forme de mobilité
Voitures plus petites, peu puissantes, moins polluantes, agiles en ville. La micromobilité peut-elle s’imposer ?
Publié le 11-01-2023 à 04h00 - Mis à jour le 11-01-2023 à 06h43
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"Le salon sera la traduction de notre vision d’avenir. Aujourd’hui, 7 à 8% de notre business se fait en dehors de la distribution automobile, mais l’ambition est de monter à 30% en 2028. On sort de notre secteur pour prendre pied dans l’énergie. De distributeur automobile, on devient acteur de l’éco-mobilité individuelle, dont on veut devenir leader", résume Jean-Marc Ponteville, porte-parole du groupe D’Ieteren. Dans un Salon de l’Auto recentré sur la vente automobile (le salon Motos disparaît), l’importateur bruxellois joue, lui, la carte de la mobilité tous azimuts. Au centre du palais 11 occupé par les marques du groupe Volkswagen, seront regroupées les initiatives où s’investit l’importateur lui-même. Ce sont notamment les voitures partagées Poppy, le réseau de vente de vélos Lucien, les solutions de recharge solaire EDI et Go-Solar.
Parmi les pièces de ce "puzzle" de mobilité, il y a eu, début d’année, le rachat des taxis verts bruxellois, avec l’ambition d’accélérer la digitalisation et l’électrification du service. Puis l’importation de la Microlino, mini-voiture électrique développée par des Suisses, deux places assez originale avec son ouverture par l’avant. Prix: 17 500 €, TVAc.
En Allemagne et en Espagne, Microlino est vendue par le géant mondial de la distribution automobile Astara. Le même groupe espagnol qui a acquis les activités de Moorkens, et qui aux côtés de Hyundai, Suzuki ou SangYong, introduit en Belgique une microcar électrique fabriquée par Silence à Barcelone. Elle existe en versions 45 et 85 km/h.
Comme pour la Microlino, les ventes se feront sur le net, à un prix comparable, situé entre 13 150 € (hors TVA) pour la version de base et 14 390 € pour la premium. "Nous sommes convaincus que la majorité des ventes se fera via des solutions fleet", explique Maaike Van Den Berghe, brand manager. "Ce qu’on veut vendre, c’est un concept de mobilité. De nombreux concurrents arrivent sur ce marché, et cela va transférer des ventes de voitures classiques vers les microcars et les scooters."
Création italienne, la XEV Yoyo (15 770 € TVAc) est une autre petite électrique qui innove avec sa batterie amovible, et l’impression 3D pour sa personnalisation. Distribuée par le concessionnaire VJB de Hasselt, elle sera présentée dans le Concept Hall 9 du salon de Bruxelles après avoir débuté à Paris en octobre. Doté d’une autonomie de 150 km en ville, où l’engin est à l’aise avec son rayon de braquage de 8 mètres, la Yoyo est capable d’atteindre les 80 km/h.
Pure citadine dans un registre plus limité (à 45 km/h, donc conduisible en permis A), la Citroën Ami reprend, elle, l’héritage minimaliste de la 2 CV, comme le fait le concept Oli présenté au salon. "L’Ami est l’ambassadeur de ce segment qui connaît un succès énorme, aussi bien auprès des entreprises que des particuliers", affirme Wim Willems chez Citroën. Toutes les marques vont venir avec des projets de micromobilité. Ça deviendra de plus en plus important."
Évocation : retour vers le futur sur fond de crise

Avril 1955. Dans une Allemagne qui se relève du désastre de la guerre, une étrange bulle automobile, deux places, accès par l’avant, voit ses commandes affluer. La BMW Isetta fait sensation. Ce scooter carrossé développé par le patron d’Iso, un fabricant italien de frigos, permet à la firme de Munich de retrouver un peu d’air. Éclipsée par la Fiat 500 en Italie, l’Isetta est aussi produite au Brésil ou en France. Sa faible consommation, son prix attractif, son aspect ludique assurent en temps de crise un succès qui sera de courte durée. Avec les années ‘60, la hausse du pouvoir d’achat et l’arrivée de voitures plus accessibles, notamment en occasion, signent la fin des microcitadines. En 1962, l’Isetta sort du catalogue BMW. 160 000 unités ont été produites.
Renaissance au XXIe siècle
Salon de Genève 2018, le constructeur suisse de trottinettes électriques MMS relance une interprétation moderne de l’Isetta, qu’elle nomme Microlino. Elle est produite en Italie, chez Tazzari, partenaire d’un projet "revival" dont BMW a également rêvé. Deux ans plus tard, une version électrique est lancée en Italie. C’est cette citadine insolite qui arrive à présent sur les routes belges. Mais elle n’est pas la seule.
500 kg sur la balance, 2,5 m de long, une puissance de 12,5 kW et une autonomie de 90 à 230 km, la Microlino emmène aisément deux passagers. Elle se recharge en trois à quatre heures sur une prise classique. Cette facilité de charge est un des atouts des microcitadines par rapport aux voitures électriques classiques. Inscrite dans le segment des "quadricycles lourds" (L7e), dont la vitesse peut atteindre 90 km/h, la Microlino trouvera une sérieuse concurrente avec la Microcar de Silence, jolie citadine également présentée au salon de Bruxelles, sur le stand Astara. Ou encore avec la non moins mignonne Yoyo de l’Italien XEV, déjà présente sur 15 marchés européens.
Ces engins électriques "anti crise", limités en espace, en autonomie et en puissance, visent le créneau des purs citadins et des personnes en quête d’un moyen de déplacement plus confortable que le vélo, le scooter, la trottinette ou les transports en commun. Dotés d’un mini-coffre, ils devraient intéresser les livreurs urbains, dans des villes qui excluent de plus en plus les voitures. La particularité de la Silence est de disposer de batteries amovibles (comme la Yoyo) montées sur roulettes, qui peuvent se recharger au bureau ou à la maison, ou s’adapter sur les scooters de la marque. À Barcelone, Silence teste une formule de "urban store" où le client peut échanger une batterie déjà chargée. Des projets de location ou d’autopartage sont dans les cartons.

Silence introduira plus tard dans l’année une version bridée à 45 km/h, qui peut se conduire avec un permis AM. Un projet que couve aussi Microlino, qui l’a présenté à Paris. Ils entreront alors en concurrence avec les quadricycles légers (L6e) comme la eCity d’Aixam (15 890 €) ou la moins chère Citroën Ami (prix de 7 790 €, livraison non incluse), qui malgré son aspect basique, sa faible vitesse et son autonomie limitée à 75 km connaît un certain succès: plus d’un millier d’exemplaires vendus en Belgique depuis le lancement, 90 000 sur l’ensemble des marchés. Le pari semble réussir.