André Antoine : «La limitation dans l’exécutif est plus justifiée que dans le législatif»
André Antoine est devenu député pour la première fois en 1985. Avec 9 mandats à ce niveau, dont 7 successifs, il fait partie des «dinosaures» siégeant dans les Parlements.
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- Publié le 10-06-2023 à 04h01
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En 1985, il fallait avoir 25 ans pour prendre part aux élections législatives, lesquelles étaient alors encore nationales. «Je venais de les avoir quand je me suis porté candidat pour la première fois, sourit André Antoine (Les Engagés), le plus ancien parlementaire francophone en exercice. On m’appelait d’ailleurs Bébé Antoine à l’époque.» Ce dernier assume pleinement aujourd’hui son statut de «dinosaure» de la politique.
André Antoine, certains partis, dont Les Engagés, proposent de limiter dans le temps le nombre de mandats. Quelle est votre réaction?
Je suis très partagé. Je peux comprendre l’idée d’une certaine usure du mandat. On peut perdre le souffle, le contact. Et c’est aussi usant pour la famille. Mais il existe des parlementaires qui restent très actifs. Je suis dans trois assemblées, je travaille mes dossiers, je pose des questions,… J’ose dire que mon enthousiasme est intact.
La limitation dans l’exécutif est plus justifiée que dans le législatif à mon sens. Le degré de pouvoir y est différent et certains s’en rendent parfois malades. En 10 ans, vous en prenez 20… Le mode de fonctionnement de l’exécutif impose tellement de discussions, etc. Ma vie a été très différente lors de mes mandats comme ministre entre 2004 et 2014.
Y a-t-il un avantage à siéger aussi longtemps?
L’expérience est toute différente. J’ai pu me laisser berner dans les années 80, ce n’est plus le cas maintenant. Surtout après un passage par l’exécutif. Avoir de nouvelles têtes est important mais l’expérience l’est tout autant. Prenez l’exemple du budget. Il y a très peu de parlementaires qui osent s’y aventurer, cela nécessite une vision macro.
Et puis, de toute façon, l’électeur a toujours raison. Je suis là grâce à l’électeur, plus que grâce au parti.
Quel est selon vous le secret de votre longévité?
Je plaide toujours pour que les parlementaires puissent garder un pied au niveau local, dans la vie associative,… Ça vous permet d’être dans le concret, de rencontrer des gens, d’enrichir vos connaissances, de tester des textes législatifs. Et ça vous fait des parlementaires moins frustrés (rires). L’interaction est capitale. Je ne vais pas au Parlement pour voter. Il faut s’engager – sans mauvais jeu de mots – et ne pas seulement s’indigner. Quand vous vous présentez, c’est pour siéger. Il faut garder la foi et l’enthousiasme.
Même dans l’opposition?
Être dans l’opposition n’est pas une pénitence. C’est un moment de ressourcement, de liberté de parole. Et vous voyez qui travaille et qui ne travaille pas (rires).
En 2024, serez-vous candidat?
Je me félicite d’avoir toujours la confiance de ma structure provinciale. Au final, j’ai siégé partout. Pour ma mère, le Sénat fut le couronnement de ma carrière. Mais si elle avait vu comme c’est poussiéreux… (rires) Avant tout, je vais consulter mes proches, mes amis. Et ma santé! Car il faut un gros capital santé pour faire de la politique. Et il faut pouvoir donner aussi du temps à ses enfants et ses petits-enfants, car ce temps-là, il ne se rattrape pas. On verra bien!
Et le Parlement européen?
Ce serait extraordinaire mais ce n’est pas accessible pour moi…
Et si vous deviez quitter la politique, que feriez-vous?
Je voudrais que mon expérience politique puisse servir ailleurs : dans le milieu associatif. Pouvoir travailler en tandem avec des jeunes… Je m’occupe déjà aujourd’hui de crèches et d’une maison de repos. L’humain pour moi est le plus essentiel.
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Le 31 octobre 1985, André Antoine, 25 ans et quelques mois à peine, fait son entrée au sein de la Chambre des représentants, où il est élu sur la liste du PSC. Réélu lors de l’élection suivante (1987), il perd son siège en 1991, celui-ci revenant cette fois à un parlementaire bruxellois en raison des règles de l’apparentement.
Après un passage par le cabinet du ministre de la Communauté française en charge notamment de l’Enseignement supérieur Michel Lebrun, André Antoine fait son retour comme parlementaire en 1995, à l’occasion du premier scrutin régional au suffrage direct, chargé d’élire 75 députés wallons.
Réélu à ce niveau de pouvoir en 1999, 2004, 2009 et 2014 où il devient pendant 5 ans président du Parlement wallon, il a également obtenu un siège de député fédéral en 2007, préférant cependant laisser la place à sa suppléante Brigitte Wiaux, afin de poursuivre son travail entamé trois ans plus tôt dans l’exécutif de la Région.
En effet, entre 2004 et 2009, puis 2009 et 2014, il sera nommé ministre wallon du Logement, des Transports et du Développement territorial, puis du Budget, des Finances, de l’Emploi, de la Formation, des Sports et chargé de la politique aéroportuaire.
Depuis 2019, André Antoine est par ailleurs devenu sénateur communautaire.