Démotivés, insultés, dépassés: 22% des élus communaux ne veulent pas se représenter en 2024
À la veille de son assemblée générale, l’Union des Villes et Communes de Wallonie vient de présenter les résultats de son sondage sur le "blues des élus". Les bourgmestres, les présidents de CPAS et les échevins sortent tout ébouriffés de cette législature. Leur état d’esprit s’est nettement dégradé en 4 ans. Et sur le terrain, le climat dégénère sérieusement.
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Publié le 22-05-2023 à 15h31 - Mis à jour le 22-05-2023 à 18h43
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Ils ne sont pas tous au bord du gouffre. Près de 50% d’entre eux se disent d’ailleurs encore heureux et motivés. Mais la majorité des sondés semble d’accord sur un constat: les conditions de travail des bourgmestres, des échevines et échevines et des présidents et présidentes de CPAS se sont nettement détériorées.
Il y a les missions, toujours plus nombreuses et complexes, les sacrifices à accepter, le lot commun des insultes, mais aussi le harcèlement et un certain emballement de la violence et des menaces. Au cœur de la machine toxique: les réseaux sociaux.
C’est ce qui ressort d’un sondage en ligne sur le " blues des élus " organisé en février et mars dernier par l’Union des Villes et Communes de Wallonie, cogéré par l’Institut Dedicated. Sur 262 Communes, 483 élus locaux ont répondu, qu’ils en soient à leur premier mandat ou pas. Pas de conseillers communaux, juste des membres du pouvoir exécutif communal (bourgmestres, collèges et présidents de CPAS).
Nous en livrons les grandes lignes.
Ce qui va bien, malgré tout
On commence avec les bonnes nouvelles: un peu plus de la moitié (52%) des sondés mettent le curseur à 7/10 pour évaluer leur état d’esprit. Et même plus de 8/10 pour un bon quart (27%). Ils sont 49% à s’estimer heureux et motivés, 66% se disent enthousiastes, 78% confiants, 87% utiles et 84% efficaces. C’est beau.
Ils accordent toujours beaucoup de crédit au devoir à assumer envers le citoyen (96%). Presque tous sont fiers d’exercer la fonction de mandataire local (91%) et 65% considèrent que leur métier contribue à leur épanouissement.
Tout ça grâce avant tout à la proximité avec les citoyens, premier élément positif coché par 72% des répondants.
Mais…
"C’était plus facile avant"
Là où le ciel se couvre, c’est quand on évoque le "c’était mieux avant". Avant quoi ? "La crise Covid: 65% des répondants estiment que leur état d’esprit était meilleur avant", résume Maxime Daye, président de l’UVCW. Et plus frappant encore: 86% des bourgmestres disent que leur fonction était plus facile lors du mandat précédent.
Sacrifices, charge psychosociale, nombre de réunions, manque de soutien des autorités supérieures, sentiment de ne pas peser suffisamment dans la balance, etc.: 55% des élus ont déjà pensé arrêter leur mandat au cours de la législature et 23% se sentent dépassés.
Les réseaux sociaux ou l’exigence d’une réponse immédiate
Et ça se gâte franchement quand on passe au volet des relations avec les citoyens. Là aussi, quelque chose s’est abîmé au cours de ces dernières années. Pourquoi ? La pression des réseaux sociaux est citée en toute première cause par 92% des sondés. Viennent ensuite le phénomène du Nimby (l’intérêt personnel prime), le "tout, tout de suite" qui s’impose toujours davantage ("Si vous ne me répondez pas immédiatement, c’est que vous ne vous intéressez pas aux citoyens"), etc.
Pour 82% des sondés, les réseaux sociaux charrient injures, menaces et harcèlement, en plus d’un flux massif de fausses informations (84%).
Quelle relève pour 2024 ? Et surtout pour 2030 ?
Les prochaines élections communales sont programmées pour le 13 octobre 2024. Parmi les sondés, ils sont 61% a se déclarer à nouveau partants. Mais un cinquième (22%) pense ne pas y retourner. "Ça fait beaucoup, quand même", glisse Maxime Daye. Ce sont surtout les élus les plus "frais" qui pensent ne pas se représenter: 25% de ceux qui sont en charge depuis moins de 5 ans ne se voient plus candidats au poste. "C’est un problème pour le renouvellement de la démocratie", note-t-il. Et un mandataire sur 10 annonce sa volonté de quitter carrément la scène politique.
Pire encore, peut-être, si on se projette dans un futur proche: 75% des élus pensent que le mandat local ne suscitera plus de vocation durable à l’avenir. Ce sentiment est surtout perceptibles chez les bourgmestres. "C’est pessimiste et lourd de sens pour l’avenir. Les listes se feront encore en 2024, tant bien que mal, analyse Maxime Daye. Mais pour 2030…"
L’UVCW avance aussi une série de propositions. Nous y reviendrons.