Examen de chasse, épreuve pratique: le coup du bon chasseur
L’équivalence du permis de chasse français vit ses derniers jours chez nous. En quoi l’examen wallon lui est-il supérieur ? Banc d’épreuves. Suivez-nous à Marche-en-Famenne, au Camp Albert.
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Publié le 05-05-2023 à 19h50 - Mis à jour le 05-05-2023 à 19h55
Sous la pluie fine, brassard orange au bras, les candidats avancent dans la plaine qui s’étale à perte de vue. Prudents, concentrés.
C’est ici, au cœur du Camp Albert à Marche-en-Famenne, que l’administration wallonne organise les épreuves pratiques de l’examen de chasse. Les groupes se succèdent pour passer les quatre tests.
Le premier, c’est la chasse à la botte. Petit gibier.
Blanc ou orange ?
Sous les yeux des apprentis chasseurs, des silhouettes en deux dimensions surgissent dans les hautes herbes. Un homme, un chien: personne ne bouge. Une fausse Bernache du Canada se dresse sur la gauche. Cible autorisée. On peut tirer. Sauf quand une silhouette de chien apparaît soudain à côté. Sanglier ? Tirer, c’est la faute grave. On a dit "petit gibier".
Mais propulsez un disque blanc en argile, façon tir aux clays, et les fusils répondent instantanément. Dans l’air, les balles à blanc claquent comme des pétards de fête foraine. Un bon point pour les apprentis chasseurs: le disque blanc, c’est le gibier volant autorisé. Disque orange, c’est pas touche: espèce protégée, mauvais point.
Fin de l’équivalence
Chaque candidat est accompagné d’un agent du Département Nature et Forêts (DNF) et d’un observateur, issu d’une association de chasse. "Pour ces épreuves, 20 agents du DNF et 20 observateurs sont mobilisés", explique Valérie Duran, attaché qualifiée au DNF.
Depuis le 2 mai et jusqu’au 17 mai, pas moins de 600 candidats au permis de chasse vont défiler au Camp Albert. "C’est beaucoup, estime Valérie Duran. Votre annonce a peut-être fait son effet", lance-t-elle en souriant à Willy Borsus. Le ministre wallon de la Chasse a enfilé ses chaussures de marche pour assister aux épreuves.
Et l’annonce à laquelle l’attachée du DNF fait référence, c’est la décision prise en février par le gouvernement wallon de ne plus reconnaître l’équivalence du permis de chasse français en Wallonie. Aujourd’hui, un tiers des permis wallons sont décrochés sur simple présentation du document français. C’est comme ça depuis 2008. Le 17 mai, ce sera terminé.
"Le niveau du permis français est très insuffisant en termes de compétences", commente Willy Borsus. Trop peu de suivi et d’encadrement, pas de contrôle de l’adresse au tir, formation sommaire, examen trop rapide. "Ici, c’est tout de même autre chose", note le ministre, en observant les apprentis se frotter à la deuxième épreuve: la chasse en battue.
Tirer ou ne pas tirer ?
Ici, les animaux figés dans le paysage portent tous un numéro. Debout derrière le candidat, un agent du DNF pose ses questions: "Le 1, vous le tirez ? Et le 4 ? Et le 13 ? " Les deux mains serrées sur le canon de son fusil, le jeune homme assis répond rapidement. Et perd un point: il ne fallait pas "tirer" le sanglier, sous peine de ne pas respecter l’angle de 30° imposé (pour ne pas flinguer ses voisins de chasse).
Le brocard qui porte le numéro 13, c’est non aussi: "Il tourne le dos. On dit qu’il se présente “de cul”", confirme Valérie Duran. On va juste le blesser. Et le grand cerf, sur le petit remblai, on peut ? Bien positionné. Mais il y a un risque de ne pas pouvoir effectuer un tir "fichant": une balle qui n’atteint pas sa cible doit en principe pouvoir se "ficher" dans le sol. "Si la balle n’est pas enterrée, traduit Valérie Duran, elle risque de partir à 2 kilomètres…" Bigre.
La bonne cartouche
Troisième épreuve. Dans ce tout petit local, il faudra démontrer qu’on peut manipuler en toute sécurité les sept ou huit fusils du ratelier, les monter et les démonter, reconnaître parmi dix munitions celle qui est interdite en Wallonie (on sait, mais on ne le dira pas…), désigner la bonne cartouche pour du renard avec du calibre 16, etc. On est dans la précision, la rigueur, le détail.
À 20 mètres de là, un candidat grimpe prudemment sur l’échelle d’un mirador, fusil en bandoulière préalablement déchargé. C’est le quatrième test. On se concentre sur la chasse à l’approche et à l’affût. Les candidats sont invités à évaluer les distances entre eux et l’animal et déterminer si on tire ou pas.
Willy Borsus n’a jamais chassé de sa vie. "J’ai juste été traqueur en battue, quand j’étais gamin… " Il hoche la tête, manifestement heureux de constater la difficulté du parcours imposé. Le permis wallon, c’est désormais chasse gardée.