À l'occasion du 1er mai, Magnette et le PS rappellent De Croo à l'ordre sur les allocations de chômage, le PTB exhorte à "taxer les riches"

Pour la fête du travail, ce lundi 1er mai 2023, Paul Magnette a rappelé De Croo à l'accord de gouvernement sur la limitation dans le temps des allocations de chômage. Le PTB a remis en avant sa proposition d'une taxe des millionnaires.

Belga
-
Le PS et le PTB ont montré des objectifs différents lors du traditionnel discours du 1er mai. ©Collage EDA

Le chef du gouvernement fédéral avait salué la veille la proposition des socialistes flamands de Vooruit d'activer davantage les chômeurs de longue durée et de supprimer les allocations de chômage à ceux n'acceptant pas un emploi de base après deux ans sans activité. M. De Croo a dit vouloir remettre les propositions de l'Open Vld sur la table, au gouvernement, dans le cadre de la réforme fiscale.

Le MR et l'Open Vld confirment vouloir agir sur la limitation du paiement des allocations de chômage

"Quand on est Premier ministre, on n'oppose pas travailleurs et sans emploi, on se met au-dessus de la mêlée. Ce point n'est pas dans l'accord de gouvernement, donc nous n'en parlerons pas, punt aan de lijn", a répondu Paul Magnette, qui a axé son discours sur les conditions de travail, la justice fiscale et les salaires. Ce sera "la grande bagarre" de la campagne électorale, selon lui.

"Dresser les travailleurs contre les chômeurs"

Pour Paul Magnette, "on se heurte à une espèce d'offensive de la droite tous azimuts: Alexander De Croo nous dit que le problème en Belgique, ce ne sont pas les millionnaires aux larges épaules, mais les chômeurs qui ne veulent pas travailler, et qu'il faut sanctionner. Ce sont des propos qu'on attendrait plutôt dans la bouche d'un leader de la droite flamande".

Et Paul Magnette de se lancer dans une anaphore sur la fonction de chef de gouvernement. "Quand on est Premier ministre, normalement, on n'oppose pas les Flamands et les Wallons. Quand on est Premier ministre, on n'oppose pas les travailleurs avec les sans-emploi. Quand on est Premier ministre, on n'attaque pas ses partenaires de gouvernement. Quand on est Premier ministre, normalement, on se met au-dessus de la mêlée et on essaie de défendre l'intérêt général. Et quand on est Premier ministre, on respecte l'accord de gouvernement. Ce point n'est pas dans l'accord de gouvernement et donc nous n'en parlerons pas, punt aan de lijn".

Interrogé par Belga, en marge de ce discours, sur le message qu'il adresse, sur le même sujet, au président de Vooruit Conner Rousseau, Paul Magnette a répondu que tous deux en discuteraient au sein de la famille socialiste. "Je ne veux pas créer de polémique avec mes amis socialistes du Nord. On n'a pas tout à fait la même réalité du marché du travail, pas non plus la même réalité idéologique et stratégique. Je discuterai avec Conner Rousseau entre camarades et je ne vais pas exposer nos éventuelles divergences sur la scène publique".

Le président du PS aura axé son discours sur les conditions de travail, les salaires et la justice fiscale. Ce sera "la grande bagarre" de la campagne électorale, selon lui. "Nous voulons baisser les impôts sur les bas et moyens salaires pour que la moitié environ des travailleurs gagnent 100 à 200 euros nets en plus par mois. Ça coûte à peu près trois milliards, que l'on va chercher en doublant le taux de l'impôt sur le capital, en taxant les plus-values et par d'autres mesures". À ses yeux, la meilleure manière de lutter contre le chômage et atteindre le plein emploi est d'augmenter les salaires pour les rendre plus attractifs.

Contrairement aux dernières années, Paul Magnette ne s'en est pas pris directement au PTB, qui fait aussi de la taxation des plus riches son principal enjeu de campagne. À un peu plus d'un an des élections, il a valorisé les résultats engrangés par les ministres PS de l'Emploi en Wallonie (Christie Morreale) et au fédéral (Pierre-Yves Dermagne).

Il n'a pas manqué de rappeler la volonté du PS de supprimer le statut "indigne" de cohabitant, "qui conduit autant d'hommes que de femmes à devoir dépendre du conjoint ou d'un parent, sans avoir de moyens propres pour vivre, ou qui interdit à une personne de s'établir avec celle qu'elle aime parce qu'elle sera financièrement sanctionnée".

Hedebouw et le PTB exhortent à "taxer les riches"

Les communistes ont déposé au parlement une proposition de loi qui met en place cet impôt. La taxe, selon leur formule, serait de 1% sur les fortunes supérieures à un million d'euros, 2% au-dessus de 2 millions d'euros et 3% au-dessus de 3 millions d'euros. Quelque 8 milliards d'euros seraient ainsi prélevés, qui pourraient servir à financer les pensions, les soins de santé ou les services publics.

"Dans notre pays, les milliardaires paient 0 % d'impôts sur les plus-values qu'ils font avec leurs actions. Zéro. Alors que les travailleuses et travailleurs sont taxés jusqu'à la moitié de leurs revenus. Oui, la Belgique est un enfer fiscal pour les travailleurs. Mais un paradis fiscal pour les ultra-riches et les multinationales. Un petit club de super-riches s'enrichit de plus en plus, tandis que celles et ceux qui créent la richesse, les travailleurs, ont beaucoup de mal à boucler leurs fins de mois. Et que fait le gouvernement ? Il augmente les accises sur nos factures d'énergie. C'est pourquoi nous disons avec le PTB: ça suffit. Nous disons: tax the rich!" a déclaré le président, Raoul Hedebouw, au cours d'un meeting du 1er mai organisé à Bruxelles sur la place Anneessens.

Selon le PTB, il existe une majorité en Belgique pour faire contribuer les mieux nantis de la société. "Notre taxe peut être votée dès demain", a ajouté M. Hedebouw qui s'est notamment adressé au PS. La taxe sur les comptes-titres remise en place sous cette législature par la coalition Vivaldi n'est pas une option convaincante, estime-t-il, car les "super riches" l'évitent facilement.

Les communistes appellent à "changer le rapport de forces", au parlement mais aussi dans la rue avec les syndicats. "Il y a évidemment sur notre chemin les libéraux comme Georges-Louis Bouchez et son Mouvement des Riches. Nous les combattrons toujours. Mais le problème c'est qu'il y a aussi les socialistes comme Paul Magnette. Ceux qui font de grandes déclarations de gauche le 1er mai, mais qui les mettent à la poubelle le 2 mai", a lancé M. Hedebouw.

Ecolo veut un crédit d'impôt plutôt qu'un retour forcé au travail

Ecolo ne veut pas entendre parler de la proposition de Vooruit de limiter dans le temps les allocations de chômage, a-t-il fait savoir lundi à l'occasion de la Fête du travail.

"Plutôt que la politique de la gifle, qui semble revenir à la mode, nous voulons appliquer la politique de la main tendue vers les publics les plus éloignés du travail. La pression professionnelle grandissante a pour effet de conduire un nombre toujours plus important de travailleuses et de travailleurs vers le mal être et les maladies de longue durée. Cela ne fait que renforcer les difficultés budgétaires de la sécurité sociale", ont souligné les co-présidents Jean-Marc Nollet Rajae Maouane dans un communiqué.

L'amélioration du taux d'emploi passera aux yeux des Verts par un salaire net plus attractif qui permettra aux travailleurs, en particulier les femmes, de vivre dignement. Ecolo a proposé récemment la mise en place d'un crédit d'impôt qui permettrait une revalorisation des salaires bas et moyens allant jusqu'à 300 euros.

"C'est de cette façon que nous pourrons augmenter le taux de l'emploi, avec des jobs qui font sens, correctement rémunérés", ont affirmé les co-présidents.

Comme d'autres partis à gauche, Ecolo a exprimé sa solidarité avec les travailleurs de Delhaize mobilisés contre le plan de franchisation de l'enseigne au lion. La députée Cécile Cornet a déposé une proposition de modification de la procédure Renault afin d'éviter qu'elle ne soit contournée.

Chômage: Rousseau met le PS mal à l'aise et ravit les libéraux

La proposition, confirmée dimanche, du président de Vooruit, Conner Rousseau, de limiter les allocations de chômage dans le temps a occupé la plupart des discours du 1er mai. Les partis libéraux y ont vu l'occasion de mettre en avant une revendication refusée à gauche jusqu'à présent tandis que le président du PS, Paul Magnette, s'est montré clair: son parti bloquera le débat au gouvernement.

Intervenant à Louvain, le socialiste flamand a répété sa proposition de retirer les allocations de chômage aux demandeurs d'emploi qui refuseraient après deux ans d'inactivité un "emploi de base". L'idée a été saluée la veille, par le Premier ministre Alexander De Croo (Open Vld) qui, devant des militants libéraux, a annoncé que son parti remettrait la mesure sur la table à l'occasion des discussions sur la réforme fiscale. Ce discours est semblable à celui du président du MR, Georges-Louis Bouchez, qui recevait son homologue flamand, Egbert Lachaert, à Tour et Taxis à Bruxelles.

La proposition illustre à nouveau des orientations très différentes au sein de la famille socialiste depuis l'accession à la présidence de M. Rousseau. Des sorties sur l'immigration du socialiste flamand avaient déjà ulcéré les socialistes francophones de la capitale. Celle sur le chômage a suscité à nouveau leur colère. Ahmed Laaouej a dénoncé dimanche le "cynisme" d'une telle mesure, sans toutefois viser directement M. Rousseau. Le président du PS, Paul Magnette, a préféré s'en prendre aux libéraux et au Premier qu'il a accusé de sortir de son rôle. Quant aux explications avec les socialistes du nord, elles auront lieu entre quatre yeux.

Vous êtes hors-ligne
Connexion rétablie...