Procès des attentats | Abrini et Abdeslam: acteurs d'une pièce où ils estiment jouer les seconds rôles
Mohamed Abrini et Salah Abdeslam sont des copains de toujours. Abrini a regretté jouer un rôle où les principaux acteurs sont absents de ce procès. Abdeslam rappellent qu'il était en prison quand la décision de frapper Bruxelles a été prise.
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- Publié le 05-04-2023 à 16h13
- Mis à jour le 05-04-2023 à 20h54
"Tout ça, c'est un théâtre: il y a les costumes, les lumières..." Au cours de son interrogatoire, Mohamed Abrini a comparé le procès à un théâtre où il manque les principaux acteurs. "Vous n'avez pas le haut de la pyramide. On nous fait porter des vestes trop grandes pour nous." Qui manque-t-il dans ce casting? Ousama Atar: accusé de ce procès et présumé mort en Syrie. En l'absence des émirs de Daech, Abrini estime que ce sont les secondes mains qui se retrouvent dans le box des accusés. "S'ils avaient eu les chefs, je ne pense pas que les frères Farisi (accusés comparaissant libres) et Hervé (Bayingana) seraient dans le box. Si vous aviez eu Atar, on nous aurait appelé 'les petites mains'. Et je ne pense pas que Salah aurait eu la prison à vie (NDLR: en référence au procès des attentats de Paris)"
Dans cette sinistre pièce de théâtre, Abrini joue donc les premiers rôles, bien malgré si on l'entend. L'accusé estime que ce n'est pas la Cour d'assises qui pourra clarifier la complexité des attentats. "Vous voulez juger une affaire où des chefs d'Etat ont décidé des choses et où des chefs de l'Etat islamique en ont décidé d'autres..."

Abrini, c'est "un petit voleur", comme le qualifie la présidente au regard de ses condamnations précédentes. Il était proche d'un mariage, tenait un snack "où je faisais 1000 € de caisse par jour, c'était bien." "Casinos, jeux de hasard, sorties en boîte..." énumère-t-il. "Avant, j'étais condamnable par rapport à la religion du lever au coucher du soleil." Abrini est volubile, se gratte régulièrement la barbe lorsqu'il réfléchit. La présidente l'interroge sur ses qualités: "je faisais beaucoup de cadeaux. Mais c'est facile quand l'argent est sale." Ses défauts? "J'en ai des millions. Je commets trop de péchés, Madame..." Est-il influençable? "Oui, je suis d'accord avec ça..."
Abdeslam explique pourquoi il n'a pas été en appel à Paris
Son copain de toujours, son voisin de Molenbeek, son voisin du box des accusés à Bruxelles et à Paris, c'est Salah Abdeslam. Dans cette pièce de théâtre, il refuse d'y jouer un rôle en vue. Condamné à Paris à la perpétuité avec une peine incompressible, Salah Abdeslam a expliqué pourquoi il n'avait pas été en appel de cette peine suprême. "Comme l'a dit Abrini, on était au bout du rouleau après 10 mois de procès. J'ai été filmé pendant 6 ans et demi à la prison de Fleury-Mérogis. Si j'allais en appel, je devais y rester incarcérer et les caméras allaient perdurer..." C'est la première fois qu'une explication est donnée sur les raisons de son absence d'appel, alors qu'il avait tout à gagner.
Par rapport au procès à Bruxelles, il estime que "c'est une injustice d'être dans ce box. Vous savez tous que je suis en prison depuis le 18 mars 2016. C'est à partir du moment où j'ai été arrêté que le projet a été décidé. J'étais en prison et au courant de rien." C'est d'ailleurs ce que confirment les éléments d'enquête qui ont rapporté une précipitation dans les décisions dans les heures précédent le 22 mars. "Si la cellule avait commis 10 attentats après le 18 mars, j'aurais aussi été coauteur?" interroge-t-il.

Abdeslam: un homme sans défaut?
Incarcéré à la prison de Haren cet été, Salah Abdeslam s'est ainsi rapproché de sa famille. "Elle constitue un pilier de ma survie. Je suis rentré en prison à 26 ans, maintenant j'en ai 33. C'est extrêmement difficile. Si on n'a pas de soutien, c'est compliqué." Sur cet interrogatoire de personnalité, la présidente l'interroge sur ses qualités: "je suis quelqu'un de poli, honnête, sincère. J'étais très obéissant à ma famille. J'ai toujours aimé faire le bien, c'est plus gratifiant que le mal..." Ses défauts? "Franchement, j'en connais pas...". La présidente l'aide: "influençable?" Il répond: "si c'est pour une bonne cause, oui."