L'énorme tuile pour Charleroi: pourquoi Legoland ne viendra pas en Belgique
L’affaire semblait pliée. Mais Legoland Charleroi ne verra jamais le jour. Le groupe Merlin Entertainement a annoncé qu’il jetait l’éponge. Analyse
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Publié le 24-03-2023 à 21h40
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Plus de 1000 emplois, dont 800 directs. Un investissement estimé entre 370 et 400 millions d’euros. Entre 1,5 et 2 millions de visiteurs par an…
Quand à la fin août 2022, un «head of terms», soit un protocole d’accord non contraignant, a été signé par le groupe britannique Merlin Entertainments, la Région wallonne et l’État fédéral, tout le monde pensait l’affaire pliée. Hélas, il n’en était rien. Ce vendredi, Merlin a officialisé sa décision : Legoland ne verra pas le jour sur l’ancien site de Caterpillar Gosselies.
«Après un examen approfondi, y compris une évaluation complète de notre portefeuille Legoland actuel et futur, nous avons décidé de ne pas développer un nouveau parc en Belgique, explique Merlin Entertainments dans un communiqué. Notre société a décidé stratégiquement de recentrer ses investissements dans nos Legoland européens et mondiaux actuels, y compris les trois parcs dont l’ouverture est prévue en Chine à partir de 2025.»
Dans une formule de politesse «so British», Merlin ajoute avoir été «très impressionné par le professionnalisme et la collaboration de tous les niveaux de gouvernement.» Une phrase que l’on pourrait résumer par un simple et très cynique «Thank you & Goodbye.»
Faut-il voir derrière ce changement l’arrivée en novembre 2022 de Scott O’Neil à la tête de Merlin Entertainements? Ce dernier pourrait, en tout cas, avoir joué un rôle majeur dans le choix de revoir la stratégie du groupe.
Le monde politique sous le choc
Chez les principaux acteurs qui ont négocié avec Merlin la venue de Legoland, c’est la stupéfaction.
Le secrétaire d’État PS à la relance, Thomas Dermine (PS), qui a coordonné le plan «Catch» après la fermeture de Caterpillar, affirme ressentir «un dépit profond».
Un sentiment partagé par le ministre wallon de l’Economie. «C’est une déception, car c’est un projet sur lequel nous avons beaucoup travaillé», concède Willy Borsus (MR). «Mais c’est une décision transversale du groupe Merlin et nous sommes quelque part victimes de ce choix de réorientation au niveau mondial, sachant que la qualité du dossier belge n’est pas en cause.»
Pour rappel, l’investissement devait théoriquement être réparti entre Merlin et la Wallonie qui allait, via la Sogepa, investir 100 millions dans le projet.
Un montage qui, s’il n’a pas vu le jour, n’a pas été remis en cause.
«L’attitude de Merlin n’est pas liée à des éléments de la négociation. C’est véritablement au niveau de la stratégie mondiale du groupe qu’il y a eu un changement, ajoute Willy Borsus. Nous étions en contact constant avec Merlin et nous savions qu’une décision devait se prendre suite à un réexamen de cette stratégie. Mais on ne connaissait pas l’issue de ces réflexions.»
L’opposition critique sur la méthode employée
Depuis les rangs de l’opposition, on se montre critique face à ce nouveau camouflet. «C’est la deuxième fois – après l’épisode Thunder Power – qu’il y a des annonces et des promesses qui font rêver mais qui n’aboutissent pas, analyse François Desquesnes, député Les Engagés. Rêver, ça ne crée pas d’emploi. Il faut changer de perspective et de méthode. Tout miser sur un investisseur providentiel qui va créer 1000 ou 2000 emplois, ça ne fonctionne pas».
Pour Germain Mugemangango du PTB, il faut également «changer de stratégie» : «Donner les manettes aux multinationales pour l’emploi ne fonctionne pas, estime Germain Mugemangango. Les Carolos méritent des emplois publics, stables et de qualité.»
À la recherche d’un nouveau projet
C’est en décembre 2017 que les derniers travailleurs de Caterpillar ont quitté le site, qui a été cédé à la Région wallonne. S’il est déçu par la tournure des événements, Willy Borsus compte repartir à la recherche d’investisseurs.
«C’est un terrain de près de 100 hectares avec une localisation stratégique, nous rappelle Willy Borsus. Dès la semaine prochaine, je rassemblerai toutes les parties concernées. Il faut noter que depuis l’annonce, une société a remanifesté un intérêt. Nous allons réexplorer tous les contacts antérieurs qui n’ont pas abouti. Enfin, depuis la crise sanitaire, il y a un mouvement de réindustraliation de l’Europe, et de la Wallonie, qui est devenu prioritaire. C’est un élément qui, me semble-t-il, doit aussi être étudié en profondeur.»
Le Professeur Giuseppe Pagano l'affirme: "Le site de Gosselies reste intéressant et bien situé"Au fait, ça ressemble à quoi, un parc Legoland?
Le premier Legoland a ouvert ses portes à Billund au Danemark, juste à côté de l’usine Lego. Depuis, le concept a été dupliqué.

C’est le 7 juin 1968 que le premier parc Legoland a ouvert ses portes à Billund, au Danemark. Depuis, près de 50 millions de visiteurs ont franchi les tourniquets de ce parc. Face à un succès d’envergure, le concept a été dupliqué. En 1996, un second parc a été ouvert à Windsor (Londres). Depuis, la famille Legoland s’est agrandie et accueille des visiteurs en Californie, en Allemagne, en Floride, à Dubai ou encore au Japon.
Si Kirkbi, la holding qui détient Lego, a dû se séparer des parcs en 2005, elle est redevenue l’actionnaire principale de Merlin, le géant britannique qui exploite les Legoland à travers le monde.
La recette d’un Legoland
Vous n’avez jamais mis un orteil dans un Legoland ? Avec un bouquet d’attractions très familiales, Legoland s’adresse principalement à des 6-12 ans, mais aussi évidemment aux grands enfants. Si les amateurs de sensations fortes resteront peut-être sur leur faim, on retrouve toujours des montagnes russes. Comme dans d’autres parcs du même type, les Legoland sont divisés en «territoires» axés autour d’un même thème : Lego city, Pirates, Royaume des pharaons, Ninjago… Et l’on retrouve aussi systématiquement un «Miniland». Un espace, similaire à Mini-Europe, qui permet aux visiteurs de retrouver des villes, espaces et monuments du monde entier reproduits en Lego.
Avec l’abandon du projet carolo, les Belges qui voudront tenter l’aventure Legoland sans parcourir trop de kilomètres devront se rabattre sur Guntzbourg (Bavière – Allemagne) ou simplement sur Windsor (Londres – Royaume-Uni).