Faillite de SVB : quel risque pour les banques européennes, et donc pour mon épargne ?
L’effondrement de la Silicon Valley Bank pourrait-elle avoir des conséquences en cascade ? Les autorités veulent rassurer les investisseurs et les épargnants. Et les économistes semblent unanimes : par son côté singulier et non systémique, la faillite de SVB ne représenterait pas un risque significatif pour l’Europe et ses banques. Décryptage
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Publié le 13-03-2023 à 20h44 - Mis à jour le 13-03-2023 à 20h48
Un vent de panique sème le trouble sur les marchés. Derrière celui-ci, on retrouve la faillite de trois banques américaines : Silicon Valley Bank, mais aussi Signature Bank et Silvergate. Une situation qui, si elle rappelle la crise de 2008, se démarque par sa singularité.
1. Faillite de SVB : aux origines de la tempête
La faillite de SVB a fait grand bruit. Vendredi, l’établissement bancaire a été fermé par les autorités américaines car il ne parvenait plus à faire face aux retraits massifs de ses clients, principalement des acteurs de la tech, et ses ultimes tentatives de lever de l’argent frais n’ont pas abouti.
Dimanche, les autorités ont décidé de permettre aux clients de retirer l’intégralité de leurs dépôts. Une mesure prise par la secrétaire au Trésor, Janet Yellen, et annoncée conjointement avec la Réserve fédérale (Fed) et l’Agence de garantie des dépôts (FDIC).
“SVB était spécialisée dans la fourniture de services bancaires aux entreprises technologiques”, explique Philippe Ledent, économiste chez ING. “Disposant de dépôts importants, la banque avait investi, dans une situation où les taux étaient bas, dans des obligations à long terme peu risquées. Avec la remontée des taux, ces obligations ont perdu de leur valeur. La banque s’est retrouvée coincée. D’un côté, il y avait des actifs qu’il fallait revendre sur le marché secondaire et qui ne rapportaient plus rien. Et de l’autre, des clients qui voulaient effectuer des retraits”.
2. Quel risque pour les autres banques ?
Personne n’a oublié la faillite de Lehman Brothers en 2008.
Les économistes semblent unanimes : la faillite de SVB ne représenterait pas un risque significatif pour l’Europe et ses banques, et donc pour votre épargne.
“Il faut séparer deux choses : le problème initial et le risque de contagion”, précise Philippe Ledent. “Il faut comprendre que par la structure de son bilan, SVB était une banque très particulière. Dans une banque classique, la masse de dépôts est de nature stable et variée. Chez SVB, il s’agissait beaucoup de fonds, levés à un moment clé par des start-ups, qui sont ensuite utilisés sur une longue période.”
Le risque de contagion dépend surtout du climat de confiance.
“Quand, globalement, les investisseurs n’ont plus confiance, un petit problème peut se transformer en tsunami. Et les périodes de hausses des taux sont généralement plus turbulentes”, conclut Philippe Ledent. “C’est la raison pour laquelle les autorités multiplient les efforts et les signaux pour éviter qu’un problème auquel on peut s’attendre ne se transforme en contagion.”
Enfin, rappelons qu’en Belgique, les dépôts bancaires sont garantis à concurrence de 100 000 euros par personne et par banque.
Joe Biden, Europe, Banque nationale… Ils envoient des signaux rassurants
Ce lundi matin, Joe Biden a voulu rassurer les investisseurs. Il l’assure : le système bancaire US est “solide”.
“Grâce à l’action rapide de mon administration au cours des derniers jours, les Américains peuvent avoir confiance dans la sécurité du système bancaire”, a déclaré Joe Biden. “Vos dépôts seront là quand vous en aurez besoin.”
Dans son allocution, le président américain a fait savoir qu’il demanderait au Congrès de légiférer pour “renforcer” la régulation bancaire. Cette dernière avait été durcie après la débâcle de Lehman Brothers en 2008, mais allégée ensuite par Donald Trump.
En Europe aussi, de nombreux signaux ont été envoyés pour rassurer les investisseurs. “La réalité, c’est que le système bancaire français n’est pas exposé à la SVB. Il n’y a pas de liens entre les différentes situations”, a par exemple affirmé le ministre de l’Économie français, Bruno Lemaire, alors qu’il était interrogé à Bruxelles sur la chute des actions bancaires européennes.
De son côté, le commissaire européen à l’Economie, Paolo Gentolini, a assuré suivre la situation de près : “Il n’y a pas de contagion directe et la possibilité d’un impact indirect est quelque chose que nous devons surveiller, mais pour le moment nous ne voyons pas de risque significatif”.
La BNB veut rassurer
En Belgique, la Banque nationale annonce également suivre la situation de près. Dans un entretien au Tijd, Tom Dechaene, l’un des directeurs de la BNB, rappelle que le modèle économique de nos banques n’est pas comparable. L’ampleur de l’exposition des banques belges et des sociétés technologiques belges à la SVB et à Signature Bank doit encore être déterminée, mais la BNB est convaincue qu’elle est très limitée. Le gouvernement américain a en outre décidé que tous les avoirs au sein de ces deux banques seraient libérés, ce qui devrait permettre aux entreprises de récupérer leur argent.
En Europe, les marchés ont fini en forte baisse ce lundi. Le BEL 20 a perdu de 2,32 % en clôturant à 3660 points avec 13 de ses éléments en baisse, dont KBC (62,28 €) largement en tête avec une décote de 5,75 %.
Mais les mesures et les annonces américaines semblent avoir permis à Wall Street de se stabiliser. “Fondamentalement, ce genre de situation génère de la volatilité”, analyse Philippe Ledent, économiste chez ING. “Je ne prendrais pas ce petit rebond pour argent comptant.” Reste à voir si ces signaux permettront de rassurer les investisseurs.