Transparence sur les cadeaux et lobbies: "Un garde-fou pour la démocratie"
François Desquesnes et Anne-Catherine Goffinet (Les Engagés) proposent d’instaurer un registre des cadeaux et un dispositif de vigilance face au lobbying pour les élus wallons. Exercice de transparence.
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Publié le 08-03-2023 à 04h00
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C’était une simple discussion en commission Environnement, il y a deux ans, au Parlement wallon. Christophe Bastin (Les Engagés, opposition), évoque la transparence sur les lobbies. Quel groupe d’influence rencontre quel ministre ? "La ministre Tellier avait répondu de manière positive, invitant le députés à travailler dans ce sens ", raconte la députée wallonne Anne-Catherine Goffinet (Les Engagés). "Mais c’est vrai que le Qatargate a accéléré la réflexion ", ajoute le chef de groupe François Desquesnes.
Ensemble, ils présentent quatre textes, incluant notamment la mise en place d’un registre de cadeaux pour les ministres et les députés wallons et un système de contrôle de l’activité de lobbying auprès du gouvernement et du Parlement.
1. Les cadeaux
En 2010, le Parlement wallon fêtait ses 30 ans. Sous la présidence de l’Écolo Emily Hoyos, les 75 députés wallons reçoivent une montre Ice-Watch, produit phare de l’entrepreneur Jean-Pierre Lutgen (frère du cdH Benoît Lutgen), achetées par l’assemblée elle-même pour ses membres. Assumé à l’époque. Et tout à fait légal.Rien n’interdit aux députés de recevoir des cadeaux. Mais ce que proposent Les Engagés en 2023, c’est justement de tracer un cadre obligatoire: un registre public des cadeaux, consultable en ligne comme il en existe aux Pays-Bas, au Grand-Duché du Luxembourg (ci-contre) ou au Royaume-Uni, à remplir obligatoirement sous peine de sanction.
2. Pour qui ?
Pour le gouvernement, pour les députés, pour les membres des cabinets ministériels et pour les membres de l’administration. "Toute personne qui détient un pouvoir au niveau wallon", résume François Desquesnes. Le registre doit lister le nom du député (ou du ministre, ou…), le cadeau (un objet, des places pour un festival, un voyage, etc.), l’institution qui octroie le cadeau, sa valeur estimée ("qui peut être revue à tout moment") et son caractère symbolique ou non. Et on précisera si on conserve le cadeau ou pas.
"Il est aussi bon de rappeler qu’il est interdit de recevoir un cadeau contre service rendu", précise François Desquesnes. "En plus de la transparence, le registre permettrait aussi aux élus de se poser la question du cadeau. Ce n’est pas toujours aussi anodin qu’on le pense, note Anne-Catherine Goffinet. Et puis, les temps changent. Le niveau d’exigence des citoyens aussi."
3. La sanction
"Une règle sans sanction ne constitue qu’un modeste encouragement ", soulignent les deux députés. Les deux députés proposent de 50 à 500 € d’amende (augmentée des décimes additionnels, donc fois 8) pour les ministres. Et pour les députés, il s’agirait de prélever sur leur indemnité le montant équivalent à la valeur du cadeau.
4. Le lobbying
"On sait que des États, des entreprises, des fédérations professionnelles veulent nous influencer. C’est normal de travailler avec eux, d’avoir des échanges ", relève François Desquesnes.
"Mais la transparence est la meilleure protection. On ne sait pas toujours non plus à qui on a affaire. Parfois c’est très clair. Parfois pas. Pour les ministres, le députés, les membres de l’administration et les cabinets, c’est de la prévention, un garde-foupour la démocratie", développe-t-il. Qui propose donc d’instaurer un registre public des représentants d’intérêt, pour l’exécutif comme pour le Parlement.
"Il faut jouer cartes sur table: le registre reprendrait le nom du lobby, ses coordonnées, l’adresse, le numéro d’entreprise, etc. ", déroule Anne-Catherine Goffinet.
5. Cosmétique ?
Et avec ça on évite le cash dans des enveloppes ? Ne vise-t-on pas juste le sommet de l’iceberg ? "Le type qui veut tricher y arrivera toujours. Mais il s’agit d’établir une transparence très en amont, se défendent les deux députés. Avec un cadre, des sanctions, on peut savoir quand la limite est franchie." Ces propositions seront prises en considération ce 8 mars.