Réforme fiscale: Van Peteghem propose une réduction de charges de près de 6 milliards
Le ministre des Finances Vincent Van Peteghem propose à ses partenaires de gouvernement de procéder à une réforme fiscale qui devrait réduire les charges de près de 6 milliards d'euros, annonce-t-il jeudi.
Publié le 02-03-2023 à 07h13 - Mis à jour le 02-03-2023 à 13h32
:focal(251x175.5:261x165.5)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/VG75ZNE7SRH53I5HGQMHYIM5PU.jpg)
L'objectif affiché est "d'augmenter la partie nette du revenu de tous ceux qui travaillent" et de mettre en place "une contribution équitable" sur les patrimoines.
Parmi les mesures phares avancées, le vice-Premier CD&V évoque une augmentation de la quotité exemptée d'impôts, qui passerait de 10.160 à 15.200 euros, et un relèvement du plafond de la tranche de 45% à l'Impôt des Personnes Physiques (IPP), qui passerait, elle, de 46.440 euros à 60.000 euros. Seuls les euros gagnés au-delà de 60.000 euros seraient dès lors imposés au taux de 50%. Afin d'éviter les "pièges à la promotion", la réforme prévoit une suppression plus lente du bonus à l'emploi.
Le ministre propose également une réforme du taux réduit de TVA. Les taux réduits de 6% et 12% disparaitraient au profit d'un taux réduit unique de 9%. Un taux de 0% serait toutefois appliqué pour les légumes et les fruits, les médicaments, les couches et les produits pour la protection de l'hygiène intime et les transports en commun. La TVA à 6% serait maintenue pour le gaz naturel et l'électricité ainsi que pour l'eau de distribution et le chauffage domestique. La TVA réduite sur la démolition-reconstruction serait aussi maintenue. Le taux normal resterait, lui, à 21%.
La réforme fiscale envisagée ambitionne également d'éliminer autant que possible des différences entre les couples et les personnes isolées. Ainsi, le quotient conjugal serait progressivement supprimé sur une période de 20 ans. Pour les couples divorcés, le système de la pension alimentaire disparaitrait de la fiscalité avec une période transitoire de 20 ans pour les personnes qui utilisent le système aujourd'hui. Par ailleurs, le ministre souhaite encore augmenter la déductibilité fiscale des frais de garde d'enfant et la porter à 24,70 euros par enfant et par jour. Enfin, les revenus des pensions d'orphelins, du travail étudiant ou d'étudiant entrepreneur ne seraient plus pris en compte pour définir si un enfant est ou non à charge.
Pour les entreprises, la réforme proposée prévoit une réforme des plans d'option, permettant à un travailleur de devenir actionnaire de son entreprise, ainsi qu'un alignement du traitement fiscal et ONSS des avantages de toute nature. La déduction fiscale pour des investissements durables serait également renforcée tandis que les subventions actuelles en faveur des combustibles fossiles seraient revues à la baisse et alignées sur les pays voisins. Par exemple, le taux de TVA réduit sur le charbon serait supprimé.
Du côté des recettes, la réforme évoque l'introduction d'un impôt minimal de 15% sur les multinationales, à réaliser dans un cadre international, ou encore le doublement de la taxe annuelle sur les comptes-titres (de 0,15% à 0,30%). Les accises sur le tabac seraient une nouvelle fois augmentées.
Une simplification de la déclaration fiscale est également annoncée avec la suppression de 70 codes.
Selon le ministre des Finances, la réforme envisagée "ne doit pas être considérée comme un moyen de renflouer le budget", rappelant les projets de réforme en matière de pensions, de soins de santé ou de marché du travail. "Si, à un moment donné, les mesures de financement devaient rapporter plus que prévu, ces recettes supplémentaires devront être utilisées pour augmenter les salaires nets", a défendu Vincent Van Peteghem, lors d'un briefing avec la presse organisé mercredi après-midi. La réduction de charges de près de 6 milliards d'euros est estimée sur une période de 3 ans, de 2024 à 2026. Les contributions des revenus du patrimoine devraient rapporter aux alentours de 2 milliards d'euros, tandis que la réforme du taux réduit de TVA devrait rapporter 1,777 milliard d'euros. Le ministre compte également sur des effets retours dits "raisonnables".
Les mesures annoncées sont fondées sur l'épure présentée en juillet dernier sur base notamment du rapport du professeur de l'UGent Mark Delanote. Lors du dernier conclave budgétaire, en octobre dernier, le gouvernement fédéral avait confirmé son intention de procéder encore sous cette législature à une "première phase" de la réforme fiscale.
La proposition doit désormais être discutée au sein de la coalition Vivaldi.
Le ministre vise une entrée en vigueur de la réforme au 1er janvier 2024.
La "deuxième phase", elle, ne sera par contre discutée que dans le cadre de l'accord du prochain gouvernement issu des élections prévues en 2024. Plusieurs mesures comme la taxation des loyers ou la mise en place d'un impôt proportionnel sur les plus-values, ne figurent pas dans la proposition.
Groen veut se mettre rapidement autour de la table pour réaliser la réforme fiscale
"Cette proposition constitue une bonne base, mais réunissons-nous rapidement pour prendre des décisions", a réagi M. Vaneeckhout.
La baisse du prix des tickets de transport en commun ainsi que celle d'une alimentation saine, une hausse de la contribution des grosses fortunes et une baisse d'impôt sur le travail des bas et moyens revenus constituent les "éléments cruciaux" pour Groen, résume-t-il. "Nous devons les mettre en oeuvre sous cette législature", insiste le co-président des écologistes flamands.
La deuxième phase doit, elle, faire l'objet de négociations gouvernementales après les élections de 2024, selon l'actuel ministre des Finances. Vincent Van Peteghem vise par exemple l'introduction d'un impôt sur les plus-values, proposition pour laquelle le temps manque selon lui.
Pour les socialistes flamands, la proposition Van Peteghem "pourrait être plus ambitieuse"
À l'instar de Groen, son partenaire de coalition au fédéral Vooruit estime que la proposition de réforme fiscale du ministre des Finances, Vincent Van Peteghem (CD&V), forme "une bonne base". Mais "cela pourrait être plus ambitieux", avec moins d'impôts sur le panier de courses et plus sur les grandes fortunes, a réagi le député fédéral Joris Vandenbroucke.
Tout cela forme une bonne base, aux yeux des socialistes flamands, pour qui c'est maintenant le temps de la décision au sein du gouvernement fédéral. "Car celui qui travaille dans ce pays paie depuis des années déjà trop d'impôts parce que certains ne contribuent que trop peu. Énormément de choses sont possibles si chacun fait sa juste part. En ce compris les grandes fortunes. Les salaires net pourraient augmenter, sans impôts supplémentaires sur le panier de courses", estime-t-on au sein de Vooruit.
Le président de l'Open VLD nuancé
Pour le président de l'Open VLD, Egbert Lachaert, la proposition de réforme fiscale du ministre des Finances, Vincent Van Peteghem (CD&V), rencontre les préoccupations des libéraux sur un certain nombre de points mais sur d'autres éléments, de plus amples négociations sont nécessaires.
Du côté des recettes, la réforme évoque l'introduction d'un impôt minimal de 15% sur les multinationales, à réaliser dans un cadre international, ou encore le doublement de la taxe annuelle sur les comptes-titres (de 0,15% à 0,30%).
Ce dernier point a déjà été rejeté par le MR, son président, Georges-Louis Bouchez, ayant fait savoir sur Twitter que le MR refusait d'augmenter la taxe sur les comptes-titres. De manière générale, "il faut baisser les impôts, pas les augmenter", affirme encore Georges-Louis Bouchez sur Twitter.
Dans une réaction, le président des libéraux flamands, qui a récemment estimé dans la presse que "la grande réforme avec laquelle on va contenter les gens" n'était plus pour cette législature, indique être encore en train d'analyser la proposition de M. Van Peteghem. "À première vue", souligne M. Lachaert, cette proposition rencontre les préoccupations des libéraux dans un certain nombre de domaines.
Mais, tempère, le président de l'Open VLD, d'autres aspects sont plus difficiles. "Nous devons veiller à ce que les PME et entreprises qui investissent et procurent de l'emploi ne paient pas la facture. A cet égard, nous avons encore besoin d'éclaircissement."
La N-VA salue l'allègement de la charge sur le travail mais attend plus que des paroles
"Nous pouvons évidemment être d'accord avec la partie de la réforme fiscale qui allège la charge sur le travail. Mais il est difficile d'évaluer le texte sans que le parlement ait eu l'occasion de l'examiner pleinement", a réagi jeudi le chef de groupe de la N-VA à la Chambre, Peter De Roover. "De ce que nous savons déjà, nous craignons que les entreprises et les retraités doivent payer la facture alors que rien n'est fait, par exemple, par rapport aux différents mécanismes d'allocations qui maintiennent les gens au chômage", a-t-il ajouté.
La N-VA s'interroge par ailleurs sur la capacité du ministre Van Peteghem à passer de la parole aux actes. "La question est en effet de savoir si cette réforme est plus qu'une prise de position politique du ministre qui a déjà annoncé à plusieurs reprises des réformes sans jamais être suivi par ses partenaires de la majorité", a poursuivi Peter De Roover.