Sébastien Courtoy était une figure incontournable de la justice pénale bruxelloise

L’avocat Sébastien Courtoy a été retrouvé sans vie à son domicile, a-t-on appris ce lundi 20 février 2023. Le pénaliste assurait actuellement la défense de Smail Farisi dans l’un des plus importants procès de l’histoire judiciaire belge, celui des attentats du 22 mars 2016, à la cour d’assises de Bruxelles.

Belga
 Sébastien Courtoy
Sébastien Courtoy ©BELGA

La disparition soudaine de l’avocat pénaliste Sébastien Courtoy, annoncée lundi soir, a provoqué une onde de choc dans le milieu judiciaire bruxellois. Ce pénaliste, l’un des plus connus du barreau de Bruxelles, était notamment spécialisé dans les dossiers de terrorisme. Il a été retrouvé sans vie à son domicile de Lasne, en Brabant wallon, lundi. Il aurait été victime d’un malaise cardiaque, mais les causes exactes de son décès ne sont pas encore connues, selon l’un de ses plus proches confrères, Me Henri Laquay. Me Courtoy ne cachait pas souffrir de troubles affectant le cœur.

L’avocat, âgé d’une quarantaine d’années, assurait actuellement la défense de Smail Farisi dans l’un des plus importants procès de l’histoire judiciaire belge, celui des attentats du 22 mars 2016, à la cour d’assises de Bruxelles. Les audiences reprendront lundi après une semaine congé, sans discontinuité dans la défense de Smail Farisi puisque ce dernier est aussi défendu par Me Michel Degrève. Néanmoins, ce dernier pourrait demander un délai à la cour afin de réorganiser cette défense, qui était portée par Me Courtoy. Le pénaliste avait déjà défendu Smail Farisi lors du procès "Paris bis", relatif à l’enquête belge sur les attentats à Paris, devant le tribunal correctionnel de Bruxelles. Il avait obtenu l’acquittement de son client en juin dernier. C’est également ce qu’il réclamait devant cette cour d’assises.

Son décès survient quelques jours après sa dernière intervention dans ce procès fleuve, au cours de laquelle sa verve a marqué l’audience à une ultime reprise, via ses questions détaillées, affûtées et déterminées à l’adresse des enquêteurs. Des interrogations et des commentaires écorchant l’enquête et l’accusation, jouant volontairement à outrance l’indignation, mais bel et bien pertinentes.

Sébastien Courtoy avait auparavant défendu Mehdi Nemmouche, l’auteur de l’attentat au Musée Juif de Belgique, commis le 24 mai 2014, devant cette même cour d’assises. Le procès avait débuté le 10 janvier 2019 et s’était achevé le 12 mars suivant avec la condamnation de Nemmouche à la réclusion à perpétuité pour cette attaque terroriste qui a coûté la vie à quatre personnes.

L’avocat défunt est aussi connu pour avoir représenté les intérêts de Jean-Louis Denis, un prédicateur musulman médiatisé. Le 29 janvier 2016, cet homme avait été condamné à 10 ans de prison pour participation aux activités d’un groupe terroriste en tant que dirigeant, suspecté d’avoir recruté, en 2013, plusieurs jeunes pour aller se battre en Syrie aux côtés de groupes islamistes radicaux armés. Sa peine avait ensuite été réduite à cinq ans de prison, le 18 novembre 2016, par la cour d’appel, qui avait suivi l’argumentation de Me Courtoy.

Il a également été le conseil de plusieurs personnages controversés, comme l’humoriste Dieudonné, auteur de propos antisémites. Le conseil de discipline de l’Ordre français du barreau de Bruxelles lui avait ordonné une suspension d’exercer pendant deux mois, avec sursis, pour avoir posé sur une photo aux côtés de Dieudonné, faisant une "quenelle", geste assimilé à un salut hitlérien.

Enfin, Sébastien Courtoy a été le défenseur attitré de l’ancien député fédéral Laurent Louis. Ce dernier avait été condamné par le tribunal correctionnel de Bruxelles à une peine de huit mois de prison avec sursis pour calomnies envers diverses personnes, dont Elio Di Rupo lorsqu’il était Premier ministre. En appel, la cour s’était déclarée incompétente pour juger certaines de ces préventions et avait acquitté Laurent Louis pour le surplus, mais elle l’avait condamné pour avoir tenu des propos antisémites et négationnistes. L’ancien député a bénéficié de la suspension du prononcé de la condamnation, contre une peine de six mois de prison en première instance, à la condition de se rendre une fois par an dans des camps d’extermination à Auschwitz, Birkenau, Majdanek, Treblinka et Dachau, telle que l’avait proposée Me Courtoy lui-même dans sa plaidoirie.

Le pénaliste, très cultivé et bon orateur, avait la réputation de défendre ses clients avec acharnement, plaidant parfois de très longues heures. Son côté provocateur, parfois à l’extrême, en faisait une personnalité atypique du barreau bruxellois. Son parler sans langue de bois, son humour mordant et son style rebelle étaient appréciés par les uns, moins par les autres, lorsque certaines de ses interventions devenaient irrespectueuses. À une reprise, une telle intervention, l’affaire dite de la quenelle, lui a donc valu une sanction par le Conseil de discipline du barreau.

"C’était le Bergerac du barreau", a confié mardi à Belga Me Laquay, très affecté par le décès de son confrère. "C’est un homme qui osait prendre des coups, qui en donnait beaucoup aussi, mais toujours dans l’intérêt exclusif de son client. C’était un plaideur exceptionnel, flamboyant, qui vous emportait dans sa plaidoirie et qui parvenait à vous convaincre. La preuve en est, il a obtenu des résultats excellents".

Vous êtes hors-ligne
Connexion rétablie...