Redonner du punch à la fonction publique locale: les petites révolutions de 2023
On ne se bouscule pas pour entrer dans la fonction publique locale. Carrières plates, zéro promotion pour la majorité du personnel… Le ministre wallon des Pouvoirs locaux Christophe Collignon veut réformer le modèle. Ce sera un des chantiers wallons pour 2023. Il vient de présenter son plan au gouvernement wallon.
Publié le 23-01-2023 à 04h00
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Au printemps dernier, le ministre wallon des Pouvoirs locaux Christophe Collignon faisait la tournée des communes de moins de 12 000 habitants.
Cette large consultation, toujours en cours, a déjà fait remonter un paquet de priorités portées par les bourgmestres et leurs équipes: rendre la fonction publique locale plus attractive pour faciliter les recrutements, simplifier la vie des collèges ensevelis dans des tâches administratives d’un autre âge et des normes en expansion permanente, réguler l’afflux étouffant d’appels d’offres et, bien sûr, soutenir les finances communales.
Dans la foulée, le ministre wallon a présenté son plan de réforme de la fonction publique lors du dernier gouvernement (voir les points 1 et 2 ci-dessous).
Et il a d’autres projets dans ses cartons pour 2023.
1. Fonction publique: donner envie
Sur les 76 000 agents communaux et CPAS en Wallonie, on ne compte que 16,1% de statutaires (chiffres au 31 décembre 2021). "Le taux de nomination fond comme neige au soleil ", constate Christophe Collignon. Dans la sphère des pouvoirs locaux, il n’y a guère que les Provinces pour compter encore plus de 63% de fonctionnaires nommés parmi ses 10 285 agents.
"Et puis les barèmes sont lourds, il faut parfois 6 mois pour recruter certains agents, on ne trouve pas les profils requis…" énumère le ministre PS. Les problèmes sont connus, ils ont été discutés à la mi-décembre en comité C, le lieu de négociation des syndicats et de la Région. Le protocole qui a permis d’orienter la note stratégique du ministre prévoit entre autres de faciliter les recrutements.
"On ne doit pas continuer à tout baser uniquement sur le diplôme", annonce le ministre. L’idée, c’est de créer de nouveaux titres de compétence, avec des profils plus polyvalents comme on en recherche aujourd’hui sur le terrain communal. Ouvrier forestier, par exemple.
"Il faut aussi valoriser toute l’ancienneté acquise (NDLR: y compris dans le privé ou en tant qu’indépendant) et ne pas la limiter à 10 ans comme aujourd’hui. On change de logiciel. C’est nécessaire si on veut donner envie aux jeunes de se tourner vers ces emplois ", résume-t-il. On n’attrape pas les mouches avec du vinaigre.
2. Fonction publique (bis): grandir dans « l’entreprise »
"Il y a une sorte de rupture idéologique, note Christophe Collignon. Avant, on entrait à la Commune et on espérait être nommé un jour. Or, les Communes ne nomment plus."
Il s’agit de donner des perspectives d’évolution de carrière à tous, y compris aux contractuels. Les postes à promotion leur seront ouverts
On l’a vu, à l’échelon communal, les contractuels sont majoritaires. Pourtant, seuls les statutaires ont accès aux postes à promotion.
"On va changer ça. Il s’agit de donner des perspectives d’évolution de carrière à tous, y compris aux contractuels. Les postes à promotion leur seront ouverts. C’est une petite révolution", se réjouit-il. Le ministre insiste aussi sur la révision de certaines échelles barémiques trop basses, sur la mobilité interne et sur le décloisonnement des carrières: aujourd’hui, on est ouvrier, on est administratif ou on est technicien mais chacun reste dans sa trajectoire bien étanche. À l’heure des équipes multidisciplinaires, ces barrières sont dépassées, affirme le ministre wallon.
"Bref, s i on veut d’une part attirer les talents et d’autre part motiver les agents, il faut leur permettre d’avoir les clés pour grandir dans l’entreprise."
3. Supracommunalité: autoriser le co-emploi
"Je ne désespère pas de donner un cadre légal à la supracommunalité", avance Christophe Collignon. Il y croit beaucoup. Plus qu’à la fusion des communes. Mais aujourd’hui, deux communes ne peuvent toujours pas co-employer un architecte, par exemple. L’objectif est donc de faciliter la mutualisation des ressources via le co-emploi. Ou encore d’autoriser un ouvrier paveur, par exemple, à exercer une fonction équivalente dans l’entité voisine, sans avoir à refaire ses preuves de A à Z au moment du recrutement.
4. Simplification administrative: une tutelle plus light
C’est une critique récurrente des communes: la tutelle régionale est trop lourde, complexe, trop orientée "contrôle". Bien reçu: le ministre des Pouvoirs locaux a déjà produit un décret de simplification administrative et il poursuit avec l’allégement de la tutelle. "Je voudrais que l’administration wallonne se concentre davantage sur l’accompagnement. "
Traduire: on doit faire plus confiance aux communes.
Sur le feu (décrétal), il s’agit de faire entrer une série d’éléments dans le code de la démocratie locale: la signature électronique, les actes notariés par visioconférence, etc. Moins de rapports à produire, notamment sur les synergies CPAS/communes ( "c’est inutile et personne ne les lit…"), lever la tutelle sur les comptes, etc. Un chapelet de petites mesures qui vont simplifier la vie des communes.
"On est arrivé à un niveau d’asphyxie pour la Région comme pour les communes, qui ont l’impression d’être paralysée dans leur gestion quotidienne." Tout est désormais une question de curseur: ne pas abandonner tout contrôle et mais laisser les collèges respirer.