Les piscines menacées de fermeture en Wallonie et à Bruxelles
Face à l’explosion des dépenses énergétiques, les gestionnaires des piscines sont très inquiets. Le risque de fermeture est bien présent : un établissement public sur deux y songe.
Publié le 20-01-2023 à 17h58 - Mis à jour le 21-01-2023 à 14h23
À Saint-Hubert, le père Noël était bel et bien une ordure pour les nageurs. Le 23 décembre, les responsables de la piscine ont dû fermer le bassin de natation. “Le Conseil d’administration de l’ASBL Sports et Culture se trouve face à des difficultés financières inédites et imprévisibles en cette fin d’année 2022 et ce, pour plusieurs semaines à venir.” Une décision qui ne surprend pas les responsables de l’association des établissements sportifs (AES). Dans le courant du mois d’octobre, l’association avait interrogé les gestionnaires des complexes sportifs.
Preuve de l’intérêt et de l’inquiétude générale, près de la moitié des responsables ont pris la peine de répondre aux questions. Et les résultats sont sans appel :
La cause ? La hausse vertigineuse des prix de l’énergie. Pour la centaine de gestionnaires ayant répondu, les coûts de l’énergie ont augmenté de 155 %. Concrètement, cela représente 300 000 € supplémentaires. “Quand on sait qu’en temps normal, le prix d’entrée ne compense pas le coût réel de l’infrastructure, vous imaginez comme les piscines sont dans une situation compliquée avec la hausse des coûts de l’énergie”, explique Florian Giraudo, directeur adjoint de l’AES. Selon l’enquête de l’association, un tiers des piscines a d’ailleurs augmenté le prix d’entrée. Une hausse moyenne de l’ordre de 30 %.
Bruxelles adapte le prix de ses piscines, Els Ampe (Open-VLD) dénonce “une politique contre la classe moyenne””Mais la solution ne passera pas par l’augmentation du prix d’entrée. Si celui-ci devrait couvrir les coûts, il serait impayable. Les gestionnaires se sentent pris entre le marteau et l’enclume. “D’autant que ces augmentations de tarifs surviennent dans un contexte particulier : “les tarifs ont été gelés en 2020, 2021 et 2022, c’était l’une des conditions pour que les clubs de la commune du centre sportif bénéficient des subsides covid de 40€/affilié”, précise le directeur adjoint. Un des intervenants que nous avons interviewés estime que si le prix d’entrée devait couvrir les frais, l’entrée se chiffrerait à plus de 10 €.
Crise de l’énergie : diminuer la température des piscines pour des économies aux clubs”Étant donné l’explosion des coûts, il ne faudrait pas croire qu’il suffit juste d’augmenter les entrées et baisser la température du bassin de 2 degrés (ce qui est énorme vis-à-vis du ressenti des baigneurs car même un demi-degré, les nageurs le ressentent immédiatement) et l’affaire est dans le sac”, souligne Florian Giraudo.
À Marche, les 100.000 usagers annuels de la piscine ont dû avoir des frissons. Pas à cause d’une baisse de la température de l’eau mais parce que les responsables ont envisagé la fermeture du site, face aux coûts colossaux de l’énergie. “Elle est alimentée en gaz de ville, dont le prix a été multiplié par 4, sans compter la hausse du coût de l’électricité”, expliquait Christian Ngongang, échevin des Sports, dans nos colonnes, fin novembre. Ici aussi, une hausse des prix a été appliquée début novembre. Et comme dans d’autres piscines, les personnes n’habitant pas la commune doivent payer plus cher. Une mesure qui toucherait un usager sur deux.
Des mesures qui ne sont cependant pas suffisantes et la fermeture complète de la piscine de Marche a été mise sur la table. Une option qu’a voulu éviter le collège communal en “consentant un effort”. Finalement, la piscine ne fermera que le dimanche. Fermer certains jours, une solution qui n’en serait pas une, estime Gaëtan Gérard, l’échevin des Sports de Ciney, ville qui a baissé de 1 degré la température de l’eau de la piscine depuis septembre. “Oui, il y a une économie en termes de personnel mais on ne va pas baisser la température de l’eau pour la remonter le lendemain.” Il nous a expliqué les mesures structurelles que va mettre en place
Sur base du questionnaire de l’AES, 10% des gestionnaires annoncent une fermeture des piscines. Un chiffre que Florian Giraudo contextualise: «les fermetures annoncées se font sur base de plusieurs sources (travaux...).»
À l’heure actuelle, la piscine de Saint-Hubert serait la seule à devoir fermer uniquement à cause de la crise énergétique: «Les pistes de financement pour faire face à cette crise ont été explorées, mais ne permettront pas de faire face à ces coûts. La Commune, elle-même confrontée à la même situation, ne pourra pas n on plus couvrir l’ensemble de cette charge exceptionnelle due à la crise, temporaire, nous l’espérons.» La piscine devrait rouvrir en mars, juste après les vacances de carnaval. D’autres risquent-elles de lui emboîter le pas d’ici-là ?