Trois PME sur dix, saines au début 2022, sont désormais en difficulté
Comment nos PME ont-elles résisté aux chocs (énergie et indexation salariale) de l’année 2022 ? Pas très bien selon le dernier rapport PME.
Publié le 05-01-2023 à 17h16
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L’UCM, l’Unizo et la société Graydon CreditSafe ont pris le pouls économique et financier des PME (petites et moyennes entreprises) belges, après une année marquée par le choc énergétique, par l’inflation et l’indexation automatique des salaires. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que nos PME – essentiel du paysage entrepreneurial belge – ont la gueule de bois avant d’entamer 2023.
Suite à la présentation jeudi du "Rapport PME 2022", 12e édition du genre, les représentants des classes moyennes tirent la sonnette d’alarme: "Les PME saines sont en train de sombrer et un nombre croissant est en détresse professionnelle".
Et pourtant, 2021 avait permis le retour des bénéfices et la reconstitution d’une partie des réserves pour les PME, notamment grâce aux aides publiques suite au Covid. Mais c’était sans compter sur 2022 et son nouveau "choc économique" : l’explosion des coûts énergétiques, l’inflation galopante et par là, la pression des salaires vers le haut.
"Si le choc Covid a impacté le chiffre d’affaires des entreprises – ce qui a pu être maîtrisé – les chocs actuels (énergie et salaire) attaquent les frais et c’est plus difficile à contrôler", explique Éric Van den Broele de Graydon, fournisseur de données commerciales.
Résilience
Plus que la "santé financière" des PME, le rapport pose la question de la capacité de résistance des PME aux chocs.
Or, selon le rapport, trois PME belges (moins de 50 travailleurs) sur 10 qui, il y a un an étaient parfaitement "saines", sont désormais en difficulté et ont un besoin urgent d’injection de liquidités. Sous peine de voir leur survie compromise et de ne plus pouvoir faire face à de nouveaux chocs économiques.
Ce sont les PME de 1 à 4 travailleurs qui sont les plus touchées: 47,5% d’entre elles sont en difficulté aujourd’hui alors qu’elles n’avaient pas de problème début 2022.
Les PME unipersonnelles montrent une meilleure résistance mais ne sont pas à l’abri: un quart de ces PME sans salarié, considérées comme saines au départ, tirent désormais la langue.
Des nuances régionales
Quelques nuances régionales sont à souligner. À Bruxelles, parmi les PME saines au 1er janvier 2022, 31,9% sont désormais à bout de souffle. C’est un peu plus qu’en Wallonie (29,3%) et qu’en Flandre (27,3%).
Si l’on zoome sur la Wallonie, c’est dans le Hainaut que les PME ont le plus souffert: 29,2% de PME – saines au début 2022 – sont désormais en grandes difficultés. Contre 28% à Namur, 27,9% à Liège, 26,1% en Brabant wallon et 23,1% dans la province de Luxembourg.
En Wallonie et à Bruxelles, c’est au niveau des PME de 1 à 4 travailleurs que le problème est le plus aigu. Alors qu’en Flandre, ce sont les PME avec 20-49 travailleurs qui sont les plus menacées: 45% d’entre elles ont vu leurs réserves fondre suite aux chocs 2022.
Pour les trois Régions, ce sont les entrepreneurs solos qui s’en sortent le mieux: mais 21,6% (Wallonie), 25% (Bruxelles) et 22,3% (Flandre) d’entre eux sont désormais en difficulté alors qu’ils ne l’étaient pas un an plus tôt.
Résultat: de plus en plus de PME "déclarent devoir réduire leurs activités, leurs investissements et parfois même leur personnel, note le rapport. Elles ne peuvent pas toutes répercuter intégralement les hausses de coûts sur leurs clients en augmentant leurs prix de vente. Les PME font également face aux retards de paiement de leurs clients".
Mesures d’aide
Face à ce sombre tableau, l’UCM plaide pour le renforcement des mesures de soutien, le versement rapide des aides directes et la poursuite du dialogue avec les fournisseurs d’énergie. "Si les prix ont diminué par rapport à août 2022, ils sont encore cinq fois plus élevés qu’avant la crise. Et les fournisseurs tardent à répercuter ces diminutions sur les contrats", pointe Arnaud Deplae, secrétaire général de l’UCM, qui souhaite également "une gestion de crise adaptée aux PME" et promouvoir une culture de l’anticipation et de la gestion des risques au sein des PME. "Cette crise aujourd’hui me semble plus grave qu’en 2020, car il n’y a pas de fin prévisible", estime Arnaud Deplae.
D’autant qu’il faudra "encore s’attendre à des chocs, assure Éric Van den Broele (Graydon). Il y a actuellement beaucoup d’incertitudes au niveau de la situation sanitaire en Chine ou de la guerre en Ukraine…"
De son côté, l’organisation patronale flamande Unizo ne veut plus "d’indexation automatique des salaires dans le reste de l’année 2023", demande que soit prolongée la réduction de cotisations patronales ou encore d’augmenter la déductibilité pour investissement économiseur d’énergie (à 45,5% comme aux Pays-Bas).