Covid: sommes-nous prêts à encaisser le choc chinois ?
La stratégie zéro Covid a implosé, en Chine. Ce qui provoque une vague inédite de contaminations. Or, les frontières s’ouvrent à nouveau. De quoi déclencher un cocktail viral ingérable chez nous ? On fait le point avec le médecin épidémiologiste Yves Coppieters.
Publié le 28-12-2022 à 17h34 - Mis à jour le 29-12-2022 à 11h05
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En Chine, la stratégie zéro Covid a été abandonnée d’un coup, au début du mois de décembre. Les derniers verrous sont en train de sauter. Relâchement complet des mesures, hormis le masque que les gens continuent à porter. Or, l’épidémie flambe littéralement dans le pays.
"Les autorités, qui n’ont aucune vision de la santé publique, avaient maintenu cette stratégie zéro Covid pour des raisons politiques. Et c’est encore la politique qui justifie l’abandon des mesures, sous la pression populaire", analyse l’épidémiologiste Yves Coppieters, directeur du centre de recherche Épidémiologie et biostatistique de l’École de santé publique de l’ULB.
Le gros problème, ajoute-t-il, c’est que les autorités sont passées d’un extrême à l’autre sans transition. "Mais cette transition aurait été bien nécessaire pour augmenter la couverture vaccinale pour la population en général et pour les plus fragiles en particulier. Selon les chiffres disponibles, il n’y a que 30% des plus de 80 ans qui sont vaccinés en Chine. Il aurait fallu reprendre les activités avec les gestes barrière, gérer les cas graves de façon plus étalée dans le temps", énumère Yves Coppieters.
Quelles conséquences chez nous ? Faut-il s’attendre à un choc des variants ?
La sous-souche Omicron
Le virus qui circule en Chine et qui est responsable de millions de contaminations au quotidien, de milliers de décès (officiellement 6 ou 7) et d’une saturation des hôpitaux, c’est le BF.7, sous-souche du variant Omicron. "Ce n’est pas un grand danger pour nous. Nous avons une bonne immunité vaccinale (NDLR: 76% de couverture vaccinale des +18 ans jusqu’au premier booster et 41% jusqu’au 2e booster, selon Sciensano) ou acquise", estime l’épidémiologiste.
En Chine, c’est une autre paire de manches. Si le variant passe "quasiment inaperçu" dans une population bien protégée, "le BF.7, dont la capacité de transmission est plus forte que d’autres souches de l’Omicron, arrive en Chine dans une population très vierge sur le plan immunitaire. C’est pour ça que les cas explosent ", explique Yves Coppieters.
Le détricotage brutal des mesures sanitaires en Chine s’accompagne d’une réouverture des frontières. Les touristes peuvent revenir dans le pays, mais les Chinois pourront aussi à nouveau voyager dès le mois de janvier.
On relève le pont-levis
La nouvelle a entraîné une réaction en chaîne dans le monde entier. Taïwan, le Japon, l’Inde et la Malaisie ont été les premiers à remettre au goût du jour l’obligation des tests PCR pour les voyageurs venant de Chine. Les États-Unis envisagent de se calquer sur ce modèle. En Europe, l’Italie a aussitôt embrayé.
En Belgique, le bourgmestre de Bruges, ville très prisée par les touristes chinois qui entreprennent un périple en Europe, a déjà annoncé qu’il plaidait pour des restrictions à l’étage européen.
Yves Coppieters n’y voit rien de disproportionné: "Les pays qui vont recevoir ces touristes doivent en effet augmenter la surveillance aux frontières: politique de tests, d’isolement et de quarantaine. C’est la base. L’Europe va probablement s’aligner. Mais les pays occidentaux doivent aussi accroître l’identification des souches qui circulent", prévient-il.
Veiller au grain
Ce n’est pas parce que le virus qui fait flamber la Chine ne représente pas un risque majeur chez nous qu’il faut faire l’économie de la surveillance, insiste le spécialiste. "C’est valable pour le Covid, mais aussi pour toutes les maladies infectieuses. Il faut investir davantage dans la vigilance. On n’est jamais à l’abri d’un mauvais scénario. "