Démission « collective » au Bureau du Parlement wallon: la stratégie pour que personne ne perde la face
Il ne veut pas donner l’impression qu’il a commis une faute. Mais Jean-Claude Marcourt consent à quitter la présidence du Parlement wallon pour permettre un renouvellement du Bureau. Les partenaires MR et Écolo partent aussi, Et personne n’a rien à se reprocher…
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Publié le 12-12-2022 à 21h08 - Mis à jour le 12-12-2022 à 21h23
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L’annonce est tombée lundi en début de soirée. Le président du Parlement wallon Jean-Claude Marcourt (PS) est d’accord pour faire ce fameux pas de côté, si c’est pour permettre le renouvellement du Bureau. Mais pas question d’un départ en solo.
Il confie au Soir: "Il est hors de question pour moi de démissionner seul et de donner l’idée qu’une faute a été commise de ma part. Mais par contre, je m’inscris dans la demande d’une démission collective du Bureau. Afin de la rendre possible, je suis donc disponible pour démissionner spontanément." Pas limpide, limpide… Mais c’est le signal que les autres partis de la majorité attendaient.
PS: « C’était nécessaire »
Marcourt répond donc à 100% à l’appel de son président de parti, Paul Magnette. Le même qui, jeudi soir considérait qu’aucune faute personnelle n’avait été commise dans le chef du socialiste liégeois. Et qui, 24 heures plus tard, mettait la pression sur l’ensemble du Bureau du Parlement wallon (composé aussi de députés MR et Écolo) en réclamant une démission collective.
Bref. Sur Twitter, Paul Magnette s’empresse de confirmer tant que c’est chaud. Il "salue " la décision du président du Parlement "de démissionner afin de rendre possible le renouvellement du Bureau", écrit-il.
"Cet acte était nécessaire pour rétablir la crédibilité de l’institution et restaurer la confiance entre les citoyens wallons et leurs élu(e)s." Et la stratégie du boulevard de l’Empereur de "mouiller tout le monde pour ne pas mouiller que le PS" atteint ainsi ses objectifs.
Seule la socialiste Sophie Pécriaux avait déjà annoncé qu’elle faisait ses paquets, après la tirade de Magnette vendredi soir. Désormais, "tous les socialistes du Bureau (NDLR: Marcourt et Pécriaux donc) ont pris la mesure des événements. J’appelle les membres des autres partis à faire de même afin de pouvoir constituer un nouveau Bureau, élargi à l’opposition".
Chez Écolo et au MR, on a passé le week-end à charger Marcourt. Comment atterrir sans donner l’impression d’obéir à Marcourt ?
Écolo: « Ma décision »
L’Écolo Manu Disabato prend en tout cas acte. Et il ne cache pas sa satisfaction: "Le président Marcourt prend enfin la mesure de sa responsabilité première dans l’affaire du greffier et des dépenses du Parlement. Je m’en réjouis car c’était devenu indispensable".
Il ajoute: "Dans ce contexte et pour ce qui me concerne, je pense nécessaire que l’ensemble du Bureau soit renouvelé, afin que le Parlement retrouve la sérénité. J’ai donc communiqué à la greffière ma décision de m’en retirer. C’est ma décision ". Pas celle du président du Bureau. Il ne suit donc pas une condition émise par le président Marcourt: "Mon seul collectif, c’est la famille Écolo. Pas ceux qui m’ont entravé dans le travail de réforme que je voulais mener ". Un petit tacle du député Écolo pour le socialiste liégeois avant de partir…
"J’ai vu à quel point les gens étaient heurtés par ce qui s’est passé. Maintenant, poursuit Disabato, on va pouvoir construire les choses différemment ". Plus depuis le cercle restreint du Bureau, donc. "Non, mais je vais continuer à travailler et j’offrirai mon expérience à celui ou celle qui siégera au Bureau au nom d’Écolo. Moi, je ne suis pas accroché à mon poste".
MR: « Une réforme complète »
Au MR, la décision tombe dans la foulée: "Le MR se réjouit de pouvoir travailler à un nouveau Bureau avec un nouveau président qui devront réformer complètement le greffe et son fonctionnement", réagit Georges-Louis Bouchez sur Twitter. Qui juge aussi que la démission de Marcourt était "indispensable" pour "rendre la sérénité au Parlement wallon".
Et la confiance qu’il disait avoir envers les deux députées MR Jacqueline Galant et Sybille de Coster-Bauchau qui siégeaient elles aussi au Bureau ? "Elles l’ont toujours eue, elles l’ont et elles l’auront toujours. On travaillera à un nouveau Bureau et nous désignerons qui nous estimons devoir désigner", expédie le président du MR.
Au final, on se retrouve non pas avec une démission collective, mais avec une suite de démissions plus ou moins individuelles. Le résultat est le même, mais personne ne perd tout à fait la face.
Engagés: toujours prêts
Par ailleurs, ce futur Bureau devrait en principe s’ouvrir pleinement à l’opposition Les Engagés et le PTB (lire ci-contre). Chacun va venir avec son plan de bataille.
Avant même les annonces de la soirée, Les Engagés faisaient connaître leurs conditions: pas d’ancien membre du Bureau démissionnaire dans le nouveau, "des décisions accessibles à tous les députés et, dans le respect des règles RGPD, à tous les citoyens via internet", énumère le chef de groupe François Desquesnes, "tout dépassement budgétaire à soumettre à une décision publique de réallocation ou de modification budgétaire", et tout le monde au même régime de contrôle pour les missions à l’étranger, député ou greffier
Enfin, les anciens cdH veulent réduire les dépenses de fonctionnement du Bureau, du parlement et le salaire des députés.
Une partie de ces demandes pourraient croiser celles d’Écolo, notamment en ce qui concerne les missions à l’étranger et la réduction des indemnités des parlementaires. Écolo veut aussi concrétiser la procédure disciplinaire à l’égard de Frédéric Janssens et un relevé précis des dépenses de celui-ci.
PTB: « Le minimum » »
Au PTB, on se réjouit surtout de la démission de Marcourt: "C’était bien le minimum vu ce trip à Dubaï à 20 000 € ", résume le chef de groupe Germain Mugemangango. Le groupe en profite pour réclamer la fin du bonus salarial des membres du Bureau et une limitation drastique du salaire des députés. Tout ça promet des discussions intéressantes pour ceux qui prendront la succession de l’équipe démissionnaire.