Faut-il généraliser la troisième dose de vaccin?
Pour l’heure, seuls les immunodéprimés sont appelés à recevoir une troisième dose. Pour certains spécialistes, il faut élargir le spectre. Sans tarder.
- Publié le 04-09-2021 à 07h00
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Romain (prénom d’emprunt) est infirmer dans un hôpital de la région liégeoise. Doublement vacciné depuis plusieurs mois, il vient récemment de contracter le Covid. Le soignant a souffert d’un état grippal, et non d’une forme sévère de la maladie. Néanmoins, la présence du variant Delta, très contagieux, et la baisse potentielle de la protection immunitaire conférée par le vaccin posent question.
Faudrait-il, dès lors, généraliser la troisième dose de vaccin pour enrayer la propagation du virus? En Belgique, pour l’instant, seules les personnes immunodéprimées sont appelées à recevoir une troisième dose.
Concernant l'efficacité d'une telle injection pour d'autres catégories de la population, et notamment les personnes âgées, la Belgique souhaite attendre les résultats d'études cliniques avant toute prise de décision. «Le Conseil supérieur de la santé doit rendre un avis à la mi-septembre à propos des personnes âgées à risque », détaille Yves Van Laethem, infectiologue et porte-parole interfédéral Covid-19. «Par ailleurs, sur l'intérêt de la troisième dose non pas pour diminuer les infections sévères mais pour diminuer la transmission chez les gens plus jeunes, et notamment le personnel de santé, je pense qu'un avis interviendra plus tard. Les travailleurs de santé font partie des personnes auxquelles on songe, mais pas dans l'immédiat. »
«Ne plus attendre»
La Belgique peut se targuer d’arborer, à l’exception de Bruxelles, une excellente couverture vaccinale. Quant à l’administration d’une troisième dose, le professeur émérite d’immunologie Michel Goldman (ULB) estime qu’il ne faut pas tarder, particulièrement pour les seniors vaccinés il y a plus de six mois et qui souffrent de comorbidités. Au fil des semaines, l’administration d’une troisième injection pourrait être étendue à d’autres strates de la population.
« Une étude à large échelle menée sous l'égide du ministère de la Santé en Israël indique que la troisième dose administrée chez les plus de 60 ans, vaccinés il y a plus de six mois, réduit de dix fois leur risque de développer une forme sévère du Covid-19. Une étude parallèle [...] démontre que cette troisième dose est nécessaire pour pallier la diminution progressive de la protection assurée par le vaccin Pfizer qui se marque au-delà de six mois après la deuxième dose chez les personnes de plus de 60 ans [...] »
De telles études donnent évidemment matière à réflexion. «C'est vrai qu'il n'y a pas d'urgence extrême chez nous, encore que la situation des hôpitaux bruxellois devient préoccupante. Mais pourquoi attendre d'avoir des gens très malades pour organiser l'administration de la troisième dose chez ceux qui en ont besoin, alors que les données israéliennes démontrent son action positive. » Le spécialiste est formel: il faut se préparer dès maintenant à cette troisième dose, et en expliquer les raisons à la population. «En fait, chacun comprendra qu'il s'agit d'assurer le maintien de la protection vaccinale, en rappelant qu'elle est extrêmement efficace dans les premiers mois qui suivent la vaccination mais qu'elle s'atténue chez certains au fil du temps.»
Pas que les plus âgés
Au-delà des personnes plus âgées ou à risque, cette injection ne serait pas dénuée d’intérêt chez les plus jeunes.
« Si je reprends l'exemple de votre infirmier, même si on ne parle pas d'une forme grave du Covid, cette personne doit observer strictement la quarantaine pour protéger les patients dont il a la charge. En particulier dans les hôpitaux mais aussi dans les entreprises, ces quarantaines perturbent considérablement l'organisation du travail et a des conséquences économiques non négligeables.»