Hôpitaux: «Des turbulences d’une ampleur sans précédent»
La situation financière des hôpitaux, très précaire, a encore été plombée par la crise sanitaire. Dans ce contexte, l’intervention des pouvoirs publics s’avère cruciale.
Publié le 18-11-2020 à 18h23
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Alors que la trésorerie des hôpitaux belges était déjà préoccupante en 2019 (lire ci-contre), la crise sanitaire n’a, évidemment, rien arrangé.
Dans son rapport sur la situation financière des hôpitaux belges, la banque Belfius dévoile une série de constats interpellants pour l'année 2020. «Les premières projections laissent entrevoir, avec les précautions d'usage, des turbulences d'une ampleur sans précédent pour le secteur», indique la banque.
Lors de la première vague épidémique, les plans d’urgence mis en place dans les structures hospitalières ont entraîné la disparition de multiples revenus. À titre d’exemple, le nombre de consultations a chuté de 43% entre la mi-mars et le début du mois de mai. Un contexte délétère, qui allait encore s’accentuer quelques mois plus tard.
En effet, la seconde vague que nous connaissons actuellement a plombé les finances des hôpitaux. Le nombre d’hospitalisations et de patients en soins intensifs s’avère plus élevé qu’au printemps. Et, contrairement à la première phase qui présentait de grandes disparités régionales, cette fois-ci, aucun hôpital n’est épargné.
Une deuxième vague plus coûteuse
Pour les structures hospitalières, la coupe est pleine. Celles-ci ont, en effet, dû faire face à des surcoûts non négligeables: achat de matériel de protection, recours à du personnel intérimaire, etc. À cette difficulté s’ajoute une diminution des recettes: moins d’honoraires d’opérations, de consultations, mais aussi la perte de revenus pour les pharmacies et les parkings payants.
Résultat? «Ces différents surcoûts et la baisse de recettes liée à la diminution de l'activité normale ont entraîné une contraction du chiffre d'affaires de 8,1% au premier semestre 2020», précise la banque. Dans l'hypothèse d'une seconde vague identique à la première, cette baisse pourrait être extrapolée à l'ensemble de l'année 2020.
Le hic, c'est que «la deuxième vague est nettement plus lourde et généralisée». En toute logique, son impact financier devrait donc être plus important. Dans le cadre de ce scénario plus pessimiste, les projections tablent sur une perte de chiffre d'affaires de 10,4% en 2020.
Le résultat courant plongerait à 11,2% par rapport au chiffre d’affaires, soit une perte de plus de 2 milliards d’euros pour les hôpitaux.
Tirer les leçons
«Il s'agit ici d'un premier exercice qui a le mérite de montrer l'ampleur des difficultés pour les hôpitaux, affirme Arnaud Dessoy, senior analyst chez Belfius. Nous pensons désormais que l'enjeu majeur portera sur le degré effectif des compensations accordées par les pouvoirs publics. Et ce quel que soit le niveau réel du déficit.» Pour l'heure, le fédéral a prévu plusieurs aides: une avance de trésorerie de 2 milliards d'euros, l'indemnisation des surcoûts exceptionnels liés à la crise (masques, etc.), de même qu'une compensation pour les pertes d'activités (opérations annulées, produits pharmaceutiques non délivrés, etc.).
Cette intervention sera bien sûr essentielle pour affronter la crise. «Mais à moyen terme, il conviendra aussi de tier les leçons de celle-ci, quant à la fragilité, à la variabilité du système de financement des hôpitaux. Il s'agira donc de repenser fondamentalement le système afin d'améliorer sa résilience.»