La Vivaldi tiendra-t-elle jusqu’en 2024?
Si un gouvernement voit bien le jour, les divisions ne s’évaporeront pas pour autant. Analyse avec la politologue Catherine Xhardez.
Publié le 26-09-2020 à 06h00
Les négociations se poursuivent entre partis de la Vivaldi (PS, sp.a, MR, Open Vld, Écolo, Groen et CD&V) avec l’objectif de présenter une déclaration de gouvernement jeudi. Le Parlement a déjà établi un programme. En cas de fumée blanche, la déclaration gouvernementale du 1er octobre se déroulera exceptionnellement dans l’hémicycle du Parlement européen à Bruxelles. Cela permettra à tous les députés d’être présents tout en respectant les mesures sanitaires. Les débats politiques se tiendront vendredi et un vote de confiance samedi.
À plus long terme, la question se pose déjà de savoir si la Vivaldi pourra tenir jusqu’à la date présumée des prochaines élections fédérales, en 2024. Les lignes de fracture sont nombreuses et des fissures peuvent apparaître à tous niveaux.
«Le capital de confiance entre partenaires est limité. On n'est plus du tout dans cet aspect euphorique d'après les élections, lorsqu'on repart sur de nouvelles bases», explique Catherine Xhardez, politologue à la VUB et à l'université Concordia (Montréal). «Et puis ce long délai d'attente a créé beaucoup… d'attentes, justement.» Face aux enjeux, le gouvernement sera-t-il au rendez-vous? À l'inverse, on peut aussi considérer que ces longues négociations ont permis à chaque formation de passablement dégrossir le travail.
Pressions de toutes parts
«Il ne faut pas croire que les tensions communautaires ont disparu», poursuit Catherine Xhardez. À l'intérieur même de la Vivaldi, les aspirations du nord et du sud pourront être contradictoires. Et des pressions s'exerceront depuis l'opposition par le Vlaams Belang et la N-VA d'un côté, et le PTB de l'autre.
À cela s'ajoutent «des tensions entre partis de chaque côté de la frontière linguistique». Open Vld et CD&V, qui gouvernent avec la N-VA à la Région, risquent de se tirer la bourre. Entre PS, MR et Écolo, comme on l'a vu ces derniers jours, de vives divergences peuvent survenir également, tant entre les personnes que sur le contenu de la politique menée.
Les partis politiques sont soumis à leurs propres tensions. «C'est un défi de légitimité par rapport à l'extérieur du parti, mais aussi en interne, où ils ont leurs propres frictions. Chaque parti va devoir défendre l'accord devant ses électeurs, ses membres, ses mandataires. Il y aura un accord, mais sept discours différents», chacun étant amené à argumenter sur ses petites victoires.
Débrancher, c’est risqué
Le gouvernement tiendra-t-il jusqu'en 2024? «C'est "la" grande question, sourit la politologue. Tout dépendra de la déclaration. L'histoire récente démontre que ceux qui débranchent la prise ne tirent pas leur épingle du jeu.» Rappelons que c'est un certain Alexander De Croo (Open Vld), actuel coformateur, qui avait fait chuter le gouvernement Leterme en 2010, avant de perdre des plumes dans les urnes. La N-VA a sonné le glas de la Suédoise fin 2018. Elle reste le premier parti de Flandre, mais a perdu huit députés lors du dernier scrutin fédéral. On se souvient aussi du débranchement orchestré par Benoît Lutgen (cdH) aux Régions wallonne et bruxelloise. Une opération qui n'a pas bénéficié à son parti dans les urnes.