Ces partis qui changent de nom: pari gagnant?
Le sp.a n’est pas le premier parti politique à vouloir changer de nom. Un pari risqué, et moins anodin qu’il n’y paraît.
- Publié le 10-09-2020 à 18h10
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Le parti socialiste flamand s'offrira, d'ici la fin de l'année, un petit lifting. Son jeune président, Conner Rousseau, l'a annoncé hier sur les réseaux sociaux: le sp.a sera rebaptisé «Vooruit» («en avant», en français ). Une manière de traduire un renouvellement du parti «pour en faire un mouvement d'aujourd'hui».
Le sp.a n'est évidemment pas le premier parti politique à changer de nom. Mais alors, pourquoi les partis s'adonnent-ils à de telles modifications, a priori cosmétiques? «Je dirais qu'il y a d'abord une question de timing. Les noms des partis politiques fonctionnent un peu comme des marques, et témoignent d'un cycle de vie limité», observe Nicolas Baygert, professeur de communication politique à l'IHECS et à Sciences Po (Paris). Certaines de ces marques peuvent, au fil du temps, s'avérer obsolètes. «D'où la volonté de les mettre à jour en laissant dès lors transparaître cette forme d'introspection, et cette volonté de renouveler son projet politique. »
Ce changement peut également résulter d'une crise identitaire, d'un essoufflement de la formation politique. «Aujourd'hui, en Europe, c'est d'ailleurs le cas des partis sociaux-démocrates. C'est assez évident en Allemagne, mais aussi en France, par exemple.»
Changement payant?
À l'arrivée, un changement de nom est-il vraiment payant pour les partis? Pas forcément. Un exemple: le PSC, devenu cdH. En se séparant du pilier chrétien, le Centre démocrate humaniste a abandonné un marqueur symbolique important. «Ce n'est pas qu'un nom, car il y a tout un discours qui se développe autour de cela. À l'époque, les jeunes cdH reléguaient cet aspect chrétien au passé.» Une nouvelle étiquette qui n'a pas vraiment fait mouche en termes de résultats électoraux. «Le parti s'est coupé de sa tradition idéologique. L'électeur peut se sentir délaissé. C'était un choix courageux, catégorique, mais qui n'est pas parvenu à placer cette formation politique au sein du paysage démocratique.»
D'autres partis s'en sont néanmoins mieux sortis, à l'instar du Mouvement réformateur, qui est parvenu à rassembler, sous un même nom, une constellation de formations libérales (PRL-FDF-MCC). «Il fallait trouver une sorte d'emballage satisfaisant pour l'ensemble de ces formations qui ne fonctionnaient pas forcément sur la même base idéologique, ni sur la même tradition en termes d'engagement et de valeurs. L'idée de mettre en avant la réforme et le terme "mouvement" plutôt que "parti" permettait une certaine flexibilité. Ce changement de marque, ce "rebranding ", a plutôt fonctionné pour le MR.» Dans une volonté de simplification, l'évolution d'Agalev – «dont personne ne comprenait la signification» – en Groen, au nord du pays, s'est aussi révélée pertinente.
Encore faut-il préciser que ces nouvelles identités impliquent rarement une révolution idéologique. «L'organisation en tant que telle ne change pas réellement, mais traduit surtout la volonté d'un président, d'une nouvelle équipe, d'imprimer ses propres inflexions sur la vie du parti, et de signifier un nouveau cap.»