Le sang des Wallons à la loupe: la biosurveillance humaine s’invite chez nous
C’est la première campagne de ce type en Wallonie: près de 1 000 échantillons de sang et d’urine vont être prélevés et analysés. On va pouvoir mesurer les substances chimiques ou les polluants présents dans nos corps.
Publié le 18-01-2020 à 07h00
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Pour la première fois en Wallonie, une étude de grande ampleur va permettre de mesurer avec précision notre exposition à une série de substances dangereuses ou à tout le moins préoccupantes pour la santé (lire en P.3).
La première phase concerne 900 personnes. Les recrutements et les prélèvements ont commencé. Ils se terminent en mars. Environ 200 Wallons participent déjà à cette campagne de biosurveillance humaine. Les résultats seront connus dans les 2 ans.
1.Limiterles risques
Les États-Unis pratiquent la biosurveillance humaine depuis plusieurs décennies. L’Europe s’y est largement mise aussi. En Wallonie, sur base du Plan Environnement-Santé (ENVIeS) adopté fin 2018, l’Institut scientifique de service public, l’ISSeP, a été mandaté pour mener la première campagne de biosurveillance wallonne, avec le CHU de Liège et l’UCLouvain.
2.Cibler les plus vulnérables
Suzanne Remy coordonne le biomonitoring à l'Institut. «Dans un premier temps, on recrute dans trois classes d'âge: les nouveau-nés via le sang de cordon, les ados (12-19 ans) et les adultes (20-39 ans)», présente-t-elle. Pourquoi ces tranches d'âge-là? «Parce que ce sont les catégories les plus vulnérables, notamment face aux perturbateurs endocriniens et aux pesticides. Même chose pour les femmes enceintes: tout passe de la mère au bébé et on retrouve une série de substances chimiques dans le cordon ombilical », explique la ministre Écolo Céline Tellier (Environnement).
3.Ce qu'on cherche
On sait déjà qu'on va retrouver l'une ou l'autre rock star parmi les polluants, anciens ou plus récents: le plomb, l'arsenic, le glyphosate, le bisphénol, le DDT, des hydrocarbures, etc. Le tout est de savoir en quelle quantité et de pouvoir observer les variations selon l'âge, le sexe, la catégorie socioprofessionnelle, le lieu de vie, les habitudes alimentaires, le temps passé dans les embouteillages, etc. Il sera aussi possible de comparer les données wallonnes avec celle d'autres pays européens.
4.Pas un one shot
C'est sur base des résultats que des réponses politiques pourront être apportées ou ajustées. «Ce programme est fait pour s'inscrire dans la durée C'est un outil à long terme, assure Céline Tellier. Un million d'euros ont déjà été libérés sous la précédente législature et un autre million est prévu pour la deuxième phase. Le lien entre santé et environnement est essentiel, pour moi. Il faut aller au-delà de la "simple" mesure scientifique pour apporter des réponses politiques. Selon l'OMS, 25 % des maladies sont évitables. C'est colossal. »
5.«D'abord faire notre job»
Ce n'est pas sa collègue Christie Morreale qui la contredira. En tant que députée, elle s'était déjà beaucoup investie dans la bagarre contre le glyphosate en Wallonie. La socialiste est aujourd'hui ministre wallonne de la Santé. Mais depuis les longs débats sur le glyphosate, une chose n'a pas changé: la Région n'est toujours pas compétente pour interdire la mise sur le marché d'un produit, quel qu'il soit. Christie Morreale est d'accord: «Tout ne relève pas de la Région. Mais avant de rejeter la responsabilité sur les autres, on va d'abord essayer de faire notre job. Il y a plein de choses à faire pour assurer une meilleure prévention.»
Les recrutements ne sont pas organisés sur base spontanée mais via des organismes répartis sur tout le territoire: écoles, maternités, centres de formation, etc. Infos sur www.issep.be/biomonitoring