La mer du Nord se réchauffe quatre fois plus vite

Peu profonde, la mer du Nord s’est réchauffé quatre fois plus vite que la moyenne mondiale au cours des quatre dernières décennies.

Dominique Wauthy
La mer du Nord se réchauffe quatre fois plus vite
BELGIUM OOSTENDE NICE WEATHER ©Belga

La température de l’eau de la mer du Nord se réchauffe actuellement à une vitesse comprise entre 0,023°C par an dans la partie septentrionale, et 0,053 °C par an dans sa partie centrale et méridionale. Ce réchauffement rapide pousse déjà des populations de crevettes grises (en diminution) à migrer vers des zones plus froides de notre mer nationale.

On doit notamment le réchauffement de nos eaux côtières peu profondes (souvent moins de 100 m) à la clémence de nos hivers, à la circulation atmosphérique, aux vents et courants marins comme le Gulf Stream transportant les eaux chaudes des tropiques et empêchant la formation de glaces le long des côtes norvégiennes. Entre 1971 et 2010, les océans ont absorbé 93% du surplus d’énergie engendré par le réchauffement climatique; les sols ont absorbé 3%, la fonte des glaces 3% et l’atmosphère le pourcent restant.

«Un seul degré de plus en moyenne par an en mer du Nord entraîne un remplacement des espèces de planctons subarctiques par des espèces caractéristiques des zones tempérées. Déjà, on constate que les morues manquent de proies. Ce phénomène les pousse à migrer vers le nord», explique Grégory Beaugrand, biologiste marin membre d'Eur-Océans.

La crevette migre plus au Nord

En fonction du scénario retenu, une élévation de la température de l’eau de mer de 2,5°C à 3,5°C est prévue d’ici 2100. Avec une augmentation attendue de 1,8 °C de la température de l’eau d’ici 50 ans, le nombre d’aiglefins, de plies ou encore de limande-soles accuserait bientôt une nette diminution de leur population en mer du Nord. C’est ce qu’avance une étude menée par des scientifiques de l’Université d’Exeter (sud de l’Angleterre).

En hiver, quand l’océan se refroidit en surface, les eaux froides superficielles, plus denses, plongent et sont remplacées par des eaux plus profondes, plus chaudes et moins denses. En Atlantique Nord, des chercheurs de l’Ifremer Brest ont confirmé les tendances au réchauffement dans les couches de surface.

Huîtres au lieu de moules

L’augmentation de la température de l’eau de 1°C a déjà permis à l’huître creuse du Pacifique de s’installer et de prospérer au large de notre littoral; elle entre maintenant en compétition avec nos moules. L’espèce s’est ainsi progressivement implantée en mer du Nord, après être arrivée dans les ballasts (réservoirs d’eau) de bateaux en provenance d’eaux plus chaudes. Son intégration est également favorisée par l’absence de prédateur, contrairement aux moules locales qui doivent affronter étoiles de mer et crabes. Sur des bouées au large d’Ostende, s’accrochent aussi parfois des balanes. Des crustacés que l’on rencontre d’ordinaire des Açores à l’Afrique du Sud. Si les Anglais craignent pour le «fish and chips» des filets panés d’aiglefin, on aurait aussi beaucoup à craindre pour l’avenir de nos moules frites ou autres tomates crevettes.

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