L’IVG médicamenteuse à domicile a été boostée par le Covid
Contrairement à la France, la Belgique tarde à faciliter l’IVG médicamenteuse à domicile, pourtant largement pratiquée pendant la pandémie de Covid.
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- Publié le 19-09-2023 à 07h00
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En matière d’interruption volontaire de grossesse, le Covid a quelque peu changé la donne en obligeant les centres de planning familial à recourir davantage à l’IVG médicamenteuse à domicile puisque les contacts et les déplacements étaient réduits au strict minimum.
L’avortement médicamenteux, pratiqué généralement jusqu’à 7 semaines de grossesse, consiste à administrer deux médicaments à 24 ou 48 heures d’intervalle (lire par ailleurs), six jours après un premier rendez-vous dans un centre de planning familial, avec une visite de contrôle.
Ratio inversé
Avant la pandémie de Covid, les IVG se répartissaient comme suit: 60% d’IVG chirurgicales (aspiration sous anesthésie locale) et 40% d’IVG médicamenteuses (dont 3% réalisées à domicile). Après la pandémie, la proportion s’est inversée: 40% d’IVG chirurgicales pour 60% d’IVG médicamenteuses dont 80% effectuées en partie à domicile, moyennant un suivi téléphonique par une personne du planning familial.
"Et là, on s’est rendu compte que les patientes étaient très contentes et que cela fonctionnait hyper bien, souligne le Dr Yannick Manigart, gynécologue obstétricien, responsable du City Planning du CHU Saint-Pierre à Bruxelles. L’IVG médicamenteuse à domicile ne pose aucun souci a posteriori comme l’a démontré une vaste étude menée sur des milliers de femmes en Angleterre où l’IVG médicamenteuse en téléconsultation est pratiquée jusqu’à 12 semaines, les médicaments étant envoyés par la poste. Il n’y a pas eu plus de complications que si ces IVG avaient été réalisées dans des centres. La téléconsultation, sans aucun contact même par après, ce n’est pas mon type de médecine, mais l’exemple anglais prouve que l’IVG médicamenteuse à domicile est sûre. Les complications sont exceptionnelles".
"Option intéressante"
Pour Cécile Olin, directrice du centre Louise Michel à Liège, l’IVG médicamenteuse à domicile "reste une option intéressante pour autant que les conditions soient réunies et que les femmes reviennent pour un contrôle. Pour certaines d’entre elles, c’est un confort supplémentaire, notamment pour celles qui ont des soucis de mobilité ou qui se sentent plus à l’aise chez elles, pour autant qu’elles soient accompagnées d’une personne de confiance".
Après la pandémie, plusieurs pays européens ont légalisé la pratique de l’IVG médicamenteuse à domicile. En France, elle est autorisée via une téléconsultation jusqu’à 7 semaines de grossesse. Elle peut être prescrite et pratiquée par une sage-femme. Au Royaume-Uni, une loi votée en août 2022 autorise les avortements médicamenteux à domicile après une téléconsultation jusqu’à 10 semaines de grossesse.
La Belgique à la traîne
Dans son rapport publié en mars dernier, le groupe d’experts chargé par la Vivaldi d’évaluer la pratique et la législation IVG recommandait, outre l’extension de la limite maximale pour avorter à 18 semaines de grossesse, la suppression des 6 jours de réflexion ou encore la reconnaissance de l’avortement comme soin de santé, la possibilité d’offrir un suivi à distance pour l’IVG médicamenteuse, permettant à la patiente de suivre la deuxième étape de la procédure d’avortement à domicile, avec la possibilité de conseils par téléphone depuis les centres d’avortement.
"On doit clarifier les choses et donner aux femmes les moyens d’avorter de la manière la moins difficile possible", argumente le Dr Manigart.
Pour le chef de clinique du CHU Saint-Pierre, la téléconsultation peut être une solution dans les régions où les centres de planning familial sont peu accessibles ainsi que pour les femmes, qui peuvent difficilement quitter le domicile parce qu’elles sont surveillées par leur mari. "Elles peuvent poser leurs questions, être encouragées mais il est toujours préférable d’avoir un contact humain au préalable."