Gros coup de chaud sur le procès des attentats
Le débat sur les peines a pris un coup de chaud en raison de la panne de la climatisation mais aussi de l’extrême complexité juridique du dossier lié à l’absorption des peines entre les attentats de Paris et de Bruxelles.
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- Publié le 08-09-2023 à 16h13
- Mis à jour le 08-09-2023 à 20h20
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Les esprits se sont échauffés au procès des attentats de Bruxelles. Et la panne de la climatisation n’est pas forcément responsable de la complexité du dossier qui surchauffe les cerveaux de toutes les parties au procès.
Devant un ventilateur permettant aux avocats de la défense d’aérer leurs idées, les conseils des accusés tentent de faire jaillir le droit dans le débat sur l’absorption des peines entre les procès des attentats de Bruxelles et de Paris ainsi que sur le concours d’infractions.
Derrière leur éventail, les jurés décrochent probablement de ce débat complexe puisque même la Cour s’est déclarée incompétente pour tirer cet aspect capital au clair. Ce sera donc lors de la délibération que la décision sera tranchée. Tout en sachant que la défense, notamment celle de Salah Abdeslam, a déjà agité le pourvoi en cassation. Parquet, Cour et avocats : chacun y va de son analyse et de ses interrogations “On est dans un cas unique “, dit une avocate.
Même la défense n’est pas alignée : entre Delphine Paci et Gisèle Stuyck, respectivement avocates d’Abdeslam et de Krayem, la tension était réelle après que l’avocate du Suédois ait pris le contre-pied de l’analyse faite par la majorité de ses collègues de la défense. Ça chauffe, on vous le confirme. “Il fait 29,6 °“, suffoque la présidente en regardant un thermomètre posé devant elle.
La “perpétuité compulsive” reprochée au parquet
Ce vendredi, ce sont les défenses d’Osama Krayem, de Sofien Ayari et d’Hervé Bayingana qui ont pris la parole pour plaider sur les peines. Bayingana et Ayari sont assez sereins dans ce dossier puisque leur culpabilité n’a été reconnue que pour la participation aux activités d’un groupe terroriste. Des assassinats, ils ont été acquittés. Ils ne risquent donc que 10 ans maximum et sont en prison depuis 7 ans et 5 mois (sauf qu’Ayari a été condamné à 30 ans pour les attentats de Paris).
Isa Gultaslar, avocat d’Ayari, a alors joué la carte du collectif. Puisqu’il n’y avait pas grand-chose à plaider pour son client, il s’est levé contre le parquet fédéral qui, lors de son réquisitoire, a demandé la peine maximum pour chacun des gars et n’a trouvé aucune circonstance atténuante. Il a évoqué une “perpétuité compulsive “et a demandé de la nuance au jury. “Ce n’est pas parce qu’on jette tout le monde par-dessus bord que la croisière sera plus agréable,” dit-il en comparant les accusés aux voyageurs en fond de cale d’un paquebot.
Osama Krayem est un des accusés de ce procès qui pourrait être le premier à être jeté par-dessus bord. Tout comme Abrini, il était porteur d’un sac d’explosif le 22 mars 2016 mais a finalement fait demi-tour et a désamorcé sa bombe. “Si vous prononcez la peine maximale à l’encontre de quelqu’un qui renonce, quelle aurait été la peine de celui qui serait allé au bout (et qui n’aurait pas perdu la vie) ?” questionne Me Jane Peissel.
Bayingana libéré et renvoyé au Rwanda ?
Hervé Bayigana pourrait sortir libre de ce procès. Mais la partie n’est pas jouée pour autant pour le réfugié d’origine rwandaise. Lors de son réquisitoire, le parquet fédéral a réclamé sa déchéance de nationalité belge. “Le ciel m’est tombé sur la tête, s’offusque l’avocat Lurquin. Si Hervé est libéré le jour du prononcé, quand il va sortir de ce box, des policiers vont le menotter et le conduire au centre fermé de Steenokerzeel dans l’attente d’un rapatriement vers le Rwanda…” C’est le scénario le plus sombre auquel l’avocat ne veut pas croire et il demande, une dernière fois au juré : “C’est vous qui avez les clés du box, je vous demande de l’ouvrir”.
Lundi, dernière plaidoirie de la défense sur la peine avec Ali El Haddad Asufi. Le jury se retirera ensuite pour délibérer sur les peines.