Procès des attentats | Abrini : “J’aurais dû prendre le temps”
Abrini et Abdeslam peuvent-ils éviter la perpétuité. Les avocats de la défense ont joué leur dernier va-tout en refusant une double peine qui s’additionnerait à celle des attentats de Paris.
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- Publié le 07-09-2023 à 14h37
- Mis à jour le 07-09-2023 à 19h44
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Mohamed Abrini ? Un gars comme tous les autres, ou presque… C’est le portrait que son avocate Laura Pinilla a tenté de dresser de lui au cours d’un dernier baroud dans sa plaidoirie sur les peines. Pour convaincre le jury de la normalité de son client, elle évoque sa première rencontre avec le terroriste alors qu’elle n’avait “que deux semaines de stage” comme bagage en tant qu’avocate. À la barre de la cour d’assises, elle se rappelle : “Je ressors de la prison d’Arlon dans un état d’incompréhension. Comment est-ce possible que ‘l’homme au chapeau’ me ressemble tellement et qu’il soit comme moi ? “Et dans la foulée : “Je suis persuadé qu’il faut passer par la destruction du mythe avant de comprendre le pourquoi”.
Abrini : un homme banal ?
Abrini, ce n’est pas qu’un mythe, c’est aussi un individu qui a été reconnu coupable des attentats de Bruxelles. L’avocate tente de réhumaniser le gaillard en insistant sur “la réalité de sa banalité”. “Ce qu’il a commis n’est pas banal mais l’homme peut être banal. Pourquoi, alors, certains flanchent et d’autres pas ? “Elle rappelle le contexte de sa vie : le décrochage scolaire, la prison, la dynamique de quartier. Autant d’éléments qui ont mené Abrini au radicalisme violent du groupe Daech.
C’est allé vite pour Abrini. L’avocate rapporte ce que son client lui aurait confié : “J’ai foncé en passant d’un extrême à l’autre. J’aurais dû prendre du temps “.
L’élément essentiel de la défense, c’est son renoncement à se faire exploser à Zaventem. L’avocate avance les circonstances atténuantes : “Sa décision a permis de limiter les dégâts humains. Nous ne pouvons pas croire que le refus d’actionner sa bombe n’a pas d’importance”.
Laura Pinilla conclut alors par la lecture d’un mot confié par Mohamed Abrini lui-même. Celui-ci comprend que les années de prison qui l’attendent “ne ramèneront pas les morts". Mais il confie souhaiter vouloir “écrire un livre pour les jeunes des quartiers et pour que ça ne se reproduise pas, pour qu’ils prennent du recul". "Peut-être que ce serait, pour moi, une manière d’apporter ma pierre à l’édifice. “
La défense d’Abdeslam agite le pourvoi en cassation
La plaidoirie de défense de Salah Abdeslam a été nettement plus ramassée. L’avocate Delphine Paci est revenue sur la peine belge qui pourrait s’additionner à la peine incompressible pour laquelle il a été condamné pour les attentats de Paris. Autant les défenses d’Abdeslam que d’Abrini plaident pour que leurs clients n’écopent pas d’une peine supplémentaire. “La peine française sanctionne les faits pour lesquels vous avez déclaré coupable Monsieur Abrini,” avait insisté l’avocat Stanislas Eskenazi.
Pour l’avocate de Salah Abdeslam, “la double perpétuité, c’est indécent”. Et de citer des exemples qui ont marqué l’histoire judiciaire de la Belgique : “Les CCC (groupe d’extrême-gauche actif dans les années 80) ont commis 21 attentats. Marc Dutroux a commis des crimes en cascade.” Sa conclusion : les coupables de ces faits n’ont écopé que d’une seule peine. Évoquant la “peine illégale “requise par le parquet fédéral, l’avocate met en garde le jury : “Je pense que votre arrêt serait sanctionné si vous ne nous suivez pas”. Le risque ? un pourvoi en cassation. “Je vous demande la répression à la hauteur d’un homme qui n’a qu’une seule vie”, conclut l’avocate.