Trop de médecins étrangers en Belgique ?
Plus de 10 000 médecins étrangers exercent en Belgique, certains d’entre eux maîtriseraient mal la langue. La faute à un manque de contrôle, aux quotas Inami trop stricts, à une mauvaise gestion du politique ?
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- Publié le 25-08-2023 à 07h00
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Au nord du pays, on s’est alarmé récemment du nombre toujours plus élevé de médecins formés à l’étranger. Quelques jours avant que 4 300 jeunes belges affrontent le premier concours d’entrée en faculté de médecine et de dentisterie, organisé ce vendredi.
Ils seraient ainsi plus de 10 000 à pratiquer en Belgique, contre 5 300 en 2016. En vingt ans, leur ratio a plus que triplé, passant de 4 sur 100 à 14 sur 100. Problème: certains ne maîtriseraient pas suffisamment le néerlandais.
L’association des médecins généralistes flamands, Domus Medica, préconise une immersion linguistique et un test de connaissances pour tout médecin diplômé à l’étranger désireux de s’installer en Belgique.
Le ministre de la Santé planche actuellement sur une révision de la réglementation pour leur imposer la connaissance d’une des trois langues nationales.
"On n’est pas assez exigeant"
Du côté des organisations syndicales, on ne s’oppose pas à cette mesure. "C’est un problème connu depuis très longtemps, souligne Le Dr Paul De Munck, président du Groupement des omnipraticiens (GBO). Il y a des filtres pour les médecins formés en dehors de l’Union européenne qui veulent exercer en Belgique. Ils doivent prouver qu’ils maîtrisent la langue. Cela étant, c’est vrai qu’il y a des problèmes de langue… On n’est probablement pas assez exigeant alors que la relation et le dialogue sont cruciaux dans la relation thérapeutique."
Le problème des médecins qui ne maîtrisent pas bien la langue se pose surtout dans le milieu hospitalier où, pour faire face à la pénurie, on engage beaucoup de médecins formés dans des pays de l’Est dont certains ne maîtrisent pas toujours l’une des trois langues nationales, note Luc Herry, président de l’Absym Wallonie.
Imposer un test linguistique aux médecins diplômés à l’étranger est une bonne chose, admet-il "mais la problématique est multiple. Ce n’est pas seulement qu’il manque de médecins, les hôpitaux fonctionnent avec des budgets de plus en plus étriqués, beaucoup sont dans le rouge. Forcément, ils essaient d’engager des médecins qui acceptent une moindre rémunération et les médecins étrangers sont moins exigeants que les Belges".
Augmenter les quotas ou pas ?
Augmenter les quotas de numéros Inami n’est pas la solution, tant pour le GBO que pour l’Absym Wallonie. "La Belgique est l’un des pays de l’UE qui forment le plus de médecins (NDLR: 5e dans le classement de l’OCDE) mais si on regarde les praticiens actifs par tranche d’âge, en dessous de 35 ans on est bien en dessous de la moyenne européenne, argumente Luc Herry. Bon nombre de jeunes médecins belges partent exercer à l’étranger, au Canada, en Suisse, aux États-Unis… ou au Luxembourg. Un médecin qui envisage d’aller travailler à Arlon, sera vite tenté de traverser la frontière pour bénéficier d’un salaire supérieur et d’une fiscalité avantageuse. La Belgique offre des soins de qualité mais la considération des médecins diminue d’année en année. À un moment donné, il faudra que les politiciens se rendent compte qu’il est indispensable de revaloriser la profession de soignant et pas seulement celle de médecin".
La députée fédérale Catherine Fonck (Les Engagés) dénonce le surréalisme de la situation actuelle: "Certains hôpitaux paient des boîtes privées pour recruter des médecins à l’étranger en leur offrant un package all-in, numéro Inami compris. Pendant ce temps-là, vous avez des jeunes belges motivés qui ont la capacité de faire des études de médecine mais à qui on en interdit l’accès. Bien sûr, il faut un nombre raisonnable pour garantir la qualité de la formation mais les quotas tels qu’ils sont fixés aujourd’hui sont une aberration".