Ces réglementations "vertes" européennes menacées
À un an de la fin de la législature européenne, l’enthousiasme autour de certaines réglementations du pacte vert se heurte à de sérieux accrocs.
Publié le 25-05-2023 à 18h00 - Mis à jour le 25-05-2023 à 18h01
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Après l’enthousiasme succédant à l’adoption du pacte vert pour l’Europe en 2019 semble s’ouvrir une période de doutes, que reflètent les récentes déclarations d’Emmanuel Macron ou d’Alexander de Croo - ces derniers appelant de concert à une "pause" dans la conception de certaines réglementations environnementales à venir.
Si le chef de l’État français s’est montré sibyllin quant aux réglementations visées, Alexander de Croo a, lui, clairement désigné le projet de loi de restauration de la nature, lequel propose entre autres choses de réduire l’usage de pesticides en Europe de 50 % d’ici à 2030. Un projet de réglementation largement brocardé par les acteurs industriels, et qui vient de prendre du plomb dans l’aile sur la scène politique européenne. Passé, en début de semaine, à la moulinette des commissions parlementaires AGRI (pour agriculture) et PECH (pour pêche), le texte a été purement et simplement rejeté.
De quoi réjouir la droite européenne (PPE), mais aussi certains centristes (Renew), qui mettent en ballotage défavorable cette proposition de loi. "Fait inédit, pour la première fois depuis des années, la commission de l’Agriculture du Parlement européen a voté contre une proposition de la Commission européenne. Il s’agit de la loi sur la restauration de la nature", se sont réjouis en début de semaine les conservateurs du PPE, qui parlent de cette proposition de loi comme d’une "provocation".
Position "anti-nature"
En ce qui concerne le vote négatif (à une voix près) du côté de la commission pêche, l’alliance entre le centre, la droite et l’extrême-droite pour torpiller le texte a fait sortir de leurs gonds les associations environnementales, qui dénoncent "une position désastreuse anti-nature et anti-Green Deal". "Aujourd’hui (24 mai), la commission de la pêche du Parlement européen a entièrement rejeté la loi sur la restauration de la nature par une différence de seulement 1 voix (15 pour le rejet, 13 contre)", se désolent ainsi des ONG de défense du milieu marin (Bloom, Client Earth, Oceana, etc.). Lesquelles estiment que "cela menace directement les objectifs du Green Deal européen consistant à mettre l’UE sur la voie d’une transition verte et juste."
Rien n’est perdu, toutefois, pour le projet de loi : c’est bien la Commission Envi (pour Environnement), qui tranchera par un vote, mi-juin, sur l’avenir du texte (si celui-ci est rejeté, la Commission européenne, qui l’a rédigé devra revoir sa copie).
Reach, ça coince
L’autre réglementation très attendue, c’est la révision du réglement REACH, qui évalue et classe les substances chimiques afin de réduire les risques pour la santé des citoyens européens (en vigueur depuis 2007).
Alors que cette révision devait être présnetée début 2023, la présentation du texte a finalement été décalée, suscitant l’inquiétude des ONG de défense de l’environnement, qui craignent que le temps manque pour avaliser le texte avant les prochaines élections en 2024.
Également dans le viseur du Premier ministre belge, le projet de révision de REACH a aussi été passé à la moulinette des acteurs de l’industrie chimique. Ce qui est, en soi, tout à fait normal : cette régulation est fondée sur une bonne collaboration entre l’agence chargée de faire respecter le réglement (l’ECHA), et les industriels, qui sont donc invités à se prononcer sur le projet de réglement. Interrogés l’an passé, certains, tel l’allemand Bayer, s’étaient inquiétés d’une "révision menée à une vitesse sans précédent", et avaient argué qu’il n’y "a pas assez de temps à la disposition de toutes les parties prenantes concernées pour participer à ce processus"… Message reçu par la Commission européenne, qui avait donc décalé la présentation du texte. Mais celui-ci pourrait toutefois être finalisé à l’été. À moins que les doléances des acteurs industriels ne l’emportent ?