Agression du maire de Saint-Brévin et manifestation néonazie : le gouvernement Français paralysé par l’extrême droite
La montée en puissance de groupuscules d’extrême droite suscite des réactions très tièdes de la part de l’exécutif français, qui entend avancer sur sa loi immigration.
Publié le 11-05-2023 à 13h25 - Mis à jour le 11-05-2023 à 13h26
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Ces dernières semaines ont mis à rude épreuve les nerfs du gouvernement français, pris en tenaille entre sa volonté de maintenir l’ordre public en marge des contestations de la réforme des retraites et une montée en puissance de mouvements et groupuscules d’extrême droite.
Un maire visé
Mercredi, Yannick Morez, maire (Divers Droite) de Saint-Brévin-les-Pins, une petite bourgade de l’ouest du pays, a annoncé sa décision de lâcher les commandes de la mairie et de quitter la ville. Ce qui est "entièrement liée", dixit le maire, à une attaque subie fin mars dernier, suite à un projet d’implantation d’un centre d’accueil de demandeurs d’asile (CADA) sur la commune, ce qui lui a valu de voir la façade de sa maison incendiée, tout comme les voitures de sa famille.
L’exécutif français est pointé du doigt par le maire, qui fait part d’un manifeste manque de soutien, alors même que l’État était associé au projet.
Si les auteurs de cet acte sont pour l’heure toujours recherchés, tous les yeux sont braqués à l’extrême droite de l’échiquier du pays. Quelques semaines avant l’incendie, des partisans d’Éric Zemmour (Reconquête) avaient manifesté leur mécontentement. Depuis, les menaces ont été nombreuses à l’encontre de la famille et n’ont, semble-t-il, jamais cessé, malgré l’abandon du projet.
Macron et Borne tout en pudeur
Après plus d’un mois et demi de silence, l’exécutif français a fini par sortir de son mutisme ce jeudi. D’abord par la voix de la Première ministre Élisabeth Borne, qui a implicitement dressé un parallèle entre cet acte et les heurts ayant émaillé les manifestations contre la réforme des retraites, jugeant que "cela montre qu’il y a une montée de l’extrémisme dans [le] pays."
Le président Macron lui a emboîté le pas via un message laconique sur Twitter : "Les attaques contre Yannick Morez, maire de Saint-Brevin-les-Pins, et contre sa famille, sont indignes. À cet élu de la République, à son épouse et ses enfants, je redis ma solidarité et celle de la Nation." Le président français n’avait jusqu’ici jamais exprimé publiquement son soutien au maire.
Des néonazis en plein Paris
Le coup de tonnerre de Saint-Brévin intervient alors qu’une manifestation rassemblant un demi-millier de néofascistes en plein Paris le 6 mai dernier n’avait suscité qu’une timide réaction de la part du gouvernement français, qui n’avait vu là aucun motif d’interdiction. Le thème de la manifestation était pourtant sans ambiguïté : il s’agissait d’un hommage à l’Œuvre française, mouvement ultranationaliste et antisémite, pourtant dissous depuis 2013.
Ni le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, ni le préfet de Paris Laurent Nunez, n’avaient alors jugé impérieux de produire un arrêté d’interdiction. Le ministre a, depuis, fait marche arrière, demandant aux préfets d’interdire les manifestations "d’ultra-droite" tout en laissant aux tribunaux le soin d’évaluer la jurisprudence applicable.
Des propos qui ont surpris et choqué l’opposition à gauche, certains dénonçant un deux poids de mesures alors que les interdictions de manifester contre la réforme des retraites se sont multipliées ces dernières semaines.
"Il y a un contraste saisissant", observait, voilà quelques jours, le premier secrétaire du PS, Olivier Faure. "D’un côté on n’a pas le droit de défiler avec des casseroles, et de l’autre on peut défiler avec des croix celtiques".
Un loi immigration en préparation
La timidité du trio Macron-Borne-Darmanin sur ces événements tient certainement au calendrier : le gouvernement entend présenter son projet de loi immigration d’ici juillet, après avoir hésité à le repousser à l’automne. Mais, mis sous pression par leurs alliés à droite de l’Assemblée Nationale (LR) et désireux de clôturer le chapitre "retraites", l’exécutif fonce bille en tête, quitte à écourter la séquence de consultations prévues.
Alors qu’il est avéré que le Rassemblement National de Marine Le Pen entretient des liens de longue date avec certains groupuscules et individus présents à la manifestation du 6 mai dernier, la présidente du parti d’extrême droite s’est payé le luxe, ce jeudi, de rappeler son opposition aux "méfaits" de groupes extrémistes, sans distinguer ce qui relèverait de l’extrême droite ou de l’extrême gauche. Un point de vue semblable à la posture de la Première ministre française...