Atteint de la myopathie de Duchenne, Gary témoigne sans militer: " Difficile de manifester en chaise roulante"
Gary Vanden Berghe n’est pas un militant, juste un homme qui raconte sa vie. Et qui nous fait ouvrir grand les yeux sur le handicap et les problèmes d’intégration quand on est moins valide.
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Publié le 30-04-2023 à 07h44 - Mis à jour le 30-04-2023 à 07h50
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La myopathie de Duchenne touche une fille sur 50 millions, un garçon sur 4 000. Parmi ces 4 000 garçons, il y a Gary Vanden Berghe, 42 ans. Son quotidien avec cette maladie dégénérative est rythmé par des étapes assez dures: la chaise roulante dès 10 ans, sonde urinaire en secondaire, la trachéotomie à 27 ans…
"Je peux bouger le bout des doigts", nous dit-il en joignant le geste à la parole. Cette micromobilité lui permet de conduire sa chaise, mais aussi d’écrire le livre que son entourage lui réclamait, après un premier livre pour enfant écrit avec Christian Merveille. Grâce à une tablette, un clavier virtuel, un ordinateur, et avec l’aide de Karen Kandiyoti et Geneviève Damas.
Une enfance sous le signe de la colère
Dans son livre, Gary Vanden Berghe décrit un gamin révolté. "Même si j’étais souvent en colère, j’étais un enfant joyeux. J’ai le sentiment d’avoir eu une enfance heureuse… Mais certains jours, il y avait trop de frustrations."
Les frustrations ne naissent pas forcément des limites que lui impose son handicap, mais aussi du comportement des autres, notamment son institutrice de 4e primaire, qui refuse de changer de classe pour un local de plain-pied, et oblige le garçon à se relever seul quand il tombe dans la cour, interdisant aux copains de l’aider, sous peine de punition. Jusqu’à un jour où il doit ramper devant tous dans la cour pour rejoindre sa classe. "C’est la pire humiliation, le pire rejet que j’ai vécu, reconnaît Gary, avec le recul. Il y a eu des insultes… Mais les enfants sont souvent plus tolérants que les adultes. Quand ils rejettent, c’est lié aux adultes que les entourent. Les insultes ne venaient pas de mes copains de classe, mais des plus grands, ceux que je ne connaissais pas. "
L’acceptation à l’adolescence
"À l’adolescence, l’acné me gênait plus que le handicap. À 13 ans, j’ai eu un épisode de grande tristesse: on était parti en voyage de ski, et je restais seul à l’hôtel pendant que les autres descendaient les pistes. Cela a été incroyablement difficile à vivre, un moment d’intense solitude."
"À 14 ans, j’avais accepté mon handicap. J’ai été opéré du dos, j’ai perdu 35 kg, j’étais mieux dans ma peau. Bien sûr, on se compare avec les autres, il y a des moments difficiles. On voit que les autres ont des copines, on se demande comment ça marche."
Le livre fait une allusion sobre à l’amour et aux auxiliaires de vie. Un court regard sur sa vie intime, sans tabous, qui ne fait que le rendre plus humain.
Voyages et amour
La famille de Gary joue un rôle fondateur dans sa vie: une complicité avec son grand-père, deux frères dont il est proche. "Et Maman est quelqu’un de très dynamique, à vouloir qu’on fasse des activités."
Des activités au quotidien, comme tondre la pelouse, mais aussi les vacances en mobil-home en Scandinavie, des promenades en Suisse, sur le dos de son papa (il fait alors 35 kg, bel exploit), et même au Congo ou en Floride. Son père et son frère le hissent en chaise roulante en haut de l’Acropole, des militaires égyptiens aident à le débarquer à Assouan… jusqu’à 2006, pour son dernier vol en avion. "À cause du changement de pression, j’ai fait une décompression respiratoire. Je n’ai plus jamais pris l’avion."
Les voyages lui permettent de découvrir que le regard sur le handicap est différent ailleurs. "Au Danemark, tout est adapté. Ici, les nouveaux bâtiments doivent présenter une accessibilité pour les personnes à mobilité réduite, mais les choses changent très lentement… Et quand on refait un trottoir, il est parfois encore moins adapté qu’avant ! J’ai participé au conseil consultatif de la personne handicapée, mais les documents que j’ai remis sur l’accessibilité des trottoirs n’ont jamais été pris en compte. Une question de moyens…"