Le Conseil supérieur de la santé prône l’interdiction des filtres à cigarettes
Le Conseil supérieur de la santé (CSS) recommande l’interdiction générale des filtres à cigarettes pour deux raisons : ils ne réduisent pas les effets nocifs du tabac sur la santé et les mégots génèrent une pollution importante.
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- Publié le 26-04-2023 à 12h00
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Contrairement aux allégations de l’industrie cigarettière, le filtre à cigarette ne protège pas le fumeur des effets toxiques de la fumée du tabac. "L’introduction du filtre à cigarettes était un outil marketing qui consistait à faire croire aux gens que la cigarette était moins nocive avec ce filtre", affirme le Pr Nicolas Van Larebeke, l’un des experts mandaté par le CSS. Il a enseigné la cancérologie expérimentale à l’Université de Gand et est actuellement conseiller scientifique à la VUB.
Risque de mutations dans l’ADN plus élevé
Si le filtre retient bien une partie de la nicotine et des particules de suie, la modification du mode de combustion (trous microscopiques dans le filtre) augmente la quantité de substances carcinogènes (qui peuvent causer un cancer).
"Une étude coréenne basée sur la fumée de cigarette produite dans une machine à fumer, montre que par milligramme de condensat les filtres ventilés produisent une quantité de nitrosamines cancérigènes et une mutagénicité (NDLR: capacité d’une substance à induire des mutations dans l’ADN) plus importante (+ 48%) que les cigarettes sans filtre".
On trouve chez le fumeur de cigarettes à bout filtré environ la même quantité de nicotine dans le sang que chez le fumeur de cigarettes sans filtre. "La nicotine est une substance qui rend très dépendant. Le fumeur inhale plus fréquemment et/ou plus profondément pour compenser la réduction de l’apport de nicotine due au filtre. Et puis, la fumée d’une cigarette à filtre a un meilleur goût, elle est aussi moins irritante, moins agressive".
Plus d’adénocarcinomes, moins de carcinomes épidermoïdes
Au lieu de protéger du cancer du poumon, l’utilisation accrue de cigarettes avec filtre serait en grande partie responsable d’un changement de sous-type du cancer du poumon : l’adénocarcinome est désormais le cancer le plus répandu, en lieu et place du carcinome épidermoïde, prédominant dans les années 1950 à 1970.
En 2020, la part des cas d’adénocarcinome chez les patients belges de moins de 50 ans était presque deux fois supérieure à celle des cas de carcinome épidermoïde. "Le cancer adénocarcinome a un pronostic légèrement meilleur que le carcinome mais il se déclare quelques années plus tôt", précise le Pr Van Larebeke.
4,5 milliards de mégots
Le Conseil supérieur de la Santé avance un autre argument pour convaincre les responsables politiques d’interdire la vente de cigarettes à bout filtré: la pollution générée par les mégots constitués de fibres d’acétate de cellulose.
Selon les estimations mondiales, 4,5 milliards de mégots de cigarettes se retrouvent chaque année dans l’environnement. Les filtres usagers représentent 41% des déchets flamands selon l’Openbare Vlaamse Afvalstoffenmaatschappij.
La décomposition très lente des fibres d’acétate de cellulose finit par générer des microplastiques dont on ignore encore l’impact exact sur l’homme et l’environnement. Les résidus toxiques contenus dans les filtres usagés ont des effets négatifs sur des organismes aquatiques, la germination et la croissance des plantes… L’OMS appelle les décideurs politiques à considérer les filtres à cigarettes pour ce qu’ils sont, à savoir des plastiques à usage unique !
Dans son avis, le CSS avance encore que l’interdiction des filtres à cigarettes contribuerait à réduire le nombre de fumeurs en rendant l’acte de fumer moins agréable. Conscient du caractère international de cette problématique, le CSS demande que cette interdiction soit mise en œuvre tant au niveau national, qu’international et donc européen.