Les généralistes rejettent la réforme des gardes de nuit
La réorganisation des postes de garde qui se profile fâche l’Absym Wallonie. Le syndicat des médecins wallons pointe le gaspillage des ressources humaines et des deniers de l’Etat ainsi que l’accélération de la désertification dans les zones déjà en pénurie de généralistes.
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- Publié le 13-04-2023 à 18h38
- Mis à jour le 13-04-2023 à 19h35
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Des postes de garde médicale accessibles en soirée et la nuit, avec deux médecins sur le pont: l’un sur place pour les consultations, l’autre pour les visites à domicile. Et, pour la Wallonie, la fin du tri spécifique à la nuit noire effectué au départ du 1733 (numéro destiné à l’aide médicale non urgente) qui limitait drastiquement les déplacements à domicile.
Cette nouvelle organisation, officialisée par deux circulaires du SPF Santé, suscite la colère dans bon nombre de cercles de médecine générale du sud du pays. A tel point que dans un communiqué, le syndicat des médecins wallons (Absym Wallonie) n’écarte pas la possibilité d’une grève de la garde de nuit.
Des voix s’élèvent également pour dénoncer une fois de plus une politique de santé flamande, essentiellement urbaine, qui ne tiendrait pas compte comme pour les quotas Inami des particularités rurales du pays. En d’autres mots, de la Wallonie.
Tri spécifique en Wallonie
Contrairement à la Flandre et à Bruxelles, la Wallonie a mis en place dès 2012 le tri spécifique à la nuit noire via le 1733. Jusqu’en novembre dernier, entre 23 heures et 8 heures du matin, le préposé au 1733 n’envoyait le médecin de garde au domicile que dans quatre situations précises: le patient réside en maison de repos, bénéficie de soins palliatifs, souffre de douleurs intolérables ou vient de mourir et il faut rédiger un certificat de décès.
"Les autres appels sont envoyés vers un service d’urgence si l’état de la personne le nécessite mais cela représente en tout et pour tout 1 ou 2 cas pour 100 000 habitants et pas forcément toutes les nuits, c’est donc extrêmement limité", argumente le Dr David Simon, administrateur de l’Absym Wallonie. Actuellement, le médecin de garde gère ces situations sans que cela pose problème. Avoir une structure ouverte qui ne fonctionne pratiquement pas, ce n’est pas rentable et cela engendre une dépense injustifiée pour l’État belge: un poste de garde ouvert coûte plus ou moins 300 000 € par an. C’est un gaspillage de ressources humaines et d’argent."
Accélération de la désertification
Un médecin généraliste sur trois quitte la profession au cours des 5 premières années, rappelle le Dr David Simon. La multiplication des gardes pourrait encore accélérer la pénurie récurrente dans le sud du pays "En Wallonie, dans les régions à faible densité, il y a peu de médecins qui s’y installent. Si en plus, on leur impose non plus une garde par mois mais une par semaine voire deux, ils préféreront s’installer en ville où ils ne devront assurer qu’une garde tous les 2 mois. On va assister à une désertification accélérée de la province du Luxembourg et d’autres régions".
La nouvelle organisation serait ni plus ni moins qu’un retour en arrière. "Le fait d’avoir inscrit la garde de nuit avec uniquement les quatre exceptions a permis de proposer aux jeunes médecins des gardes pas trop lourdes. Ils ont le droit légitime comme toute profession d’avoir une vie privée. Le médecin est un indépendant et ne peut pas avoir des jours de récupération payés. Il faut qu’il puisse gérer cela au mieux c’est-à-dire dans la mesure de ses capacités."
Bon nombre de médecins ont prévenu qu’ils ne feraient plus de gardes dans les conditions imposées par le ministre de la Santé. Dans un communiqué, l’Absym Wallonie demande à ce dernier de restaurer le tri de nuit noire au sud du pays via l’opérateur de la centrale 1733 ainsi que le rétablissement du droit de fermer les postes de garde le soir et la nuit en ne gardant qu’un seul médecin de garde pour les visites à domicile.