Procès des attentats : "Ma fille a développé des peurs et des tocs"
Sa petite fille souffre de peurs multiples, de tocs suite au décès de sa grand-mère à Zaventem. Thomas Savary l’a exprimé au travers d’un bricolage réalisé par sa fille.
Publié le 15-03-2023 à 14h07 - Mis à jour le 15-03-2023 à 14h08
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Si le 22 mars 2016 a bouleversé l’équilibre familial des Vansteenkiste, le témoignage qu’ils ont livré côte à côte ce jeudi illustre la cohésion de leurs membres. En souvenir de Fabienne, employée à l’aéroport, six membres de la famille sont venus témoigner au procès des attentats. Ils étaient soudés avant les attentats, ils le sont toujours 7 ans après. Mais ils sont profondément meurtris...
Thomas Savary, le beau-fils, a illustré comment le traumatisme peut percoler à tous les niveaux de la famille. Il parle ainsi de sa fille qui "était fusionnelle avec Fabienne. " Mais depuis le décès de "moeke", elle "a développé des peurs, des tocs." (troubles obsessionnels compulsifs)
Pour sortir de cette impasse, la petite suit alors des sessions d’art-thérapie. Son papa demande alors à montrer un masque réalisé par sa fille. Mais il craint que la pièce ne soit saisie pour être versée au dossier. Les différentes parties conviennent que le témoin pourra retourner avec le bricolage.
Thomas Savary le sort de son sac et présente un masque décoré des deux côtés. À l’intérieur, les couleurs sont plus sombres. La petite fille y a exprimé les peurs, la tristesse et le stress. Et, "à l’extérieur, c’est ce qu’elle veut montrer. Ce masque, elle l’a appelé ‘super moeke’. "

Voir sa famille fragilisée de cette manière perturbe les valeurs auxquelles on croit. "Si les accusés sont coupables, je veux qu’on les oublie et qu’on ait aucune notion du fait qu’ils ont existé."
Philippe Vansteenkiste, le frère de Fabienne, parle aussi au nom des absents. "Le plus important, c’est d’être ici en famille, dit-il à la présidente. Mais il manque quelqu’un : c’est mon papa. Pour les victimes qui ne viennent pas témoigner, ce n’est pas par manque de courage mais parce qu’ils doivent survivre."
S’interdire de pleurer pour ne pas donner raison à Daech
Le directeur de l’association de victimes V-Europe détaille comment les valeurs inculquées par l’éducation de ses parents, dont sa maman de 86 ans présente à ses côtés, peuvent "s ’écrouler quand on est victime d’un attentat terroriste. "
Il se refuse à pleurer et à souffrir "car je ne veux pas donner raison à Daech. Si on pleure, on donne satisfaction à ceux qui ont fait ces actes de terreur." Philippe Vansteenkiste exprime la difficulté de réprimer ses sentiments, de les refouler, de s’imposer une nouvelle souffrance juste pour ne pas que Daech triomphe. Mais il tend la main en évoquant le pardon : "quand on travaille dans la justice réparative, il faut que les deux parties soient d’accord. Mais, si on ne demande pas le pardon, c’est difficile de le donner..."