Mais au fait, que veulent les Géorgiens?
Les aspirations pro-européennes d’une partie du pays mettent en difficulté le Premier ministre et son gouvernement, sous étroite surveillance russe.
Publié le 13-03-2023 à 16h42 - Mis à jour le 13-03-2023 à 16h43
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Si la Géorgie rejoint un jour l’UE, les images de la foule pro-européenne et pro-occidentale qui a manifesté ces jours-ci dans les rues de la capitale géorgienne Tblissi sont appelées à faire date. D’autant que les autorités se sont empressées d’éteindre l’événement à coups de canons à eau et de gaz lacrymogène, arrêtant au passage près d’une centaine de personnes dont des journalistes. De quoi déplaire aux ONG de défense des droits humains, telle Amnesty International, qui y a vu une réaction "ni proportionné ni nécessaire ".
Revirement
D’un autre côté, le projet de loi qui a provoqué ces manifestations a été rayé d’un trait de plume vendredi dernier: celui-ci visait à qualifier d’agents étrangers certaines organisations susceptibles de froisser les autorités, une législation qui ressemble trait pour trait à une loi russe appliquée depuis 2012...
Si la présidente pro-UE du pays, Salomé Zourabichvili, avait annoncé qu’elle mettrait son veto au projet du gouvernement, son rôle demeure symbolique dans un pays où le pouvoir est principalement exercé par le Premier ministre, Irakli Garibachvili, en poste depuis un peu plus de deux, après avoir déjà occupé ce fauteuil de 2013 à 2015.
Depuis le début de la guerre russe contre l’Ukraine, Garibachvili, joue une partition ambiguë, tolérant d’un côté, du bout des lèvres, les aspirations d’une partie du peuple géorgien à rejoindre l’UE et l’OTAN, tout en veillant à ne pas froisser le voisin russe, lequel voit d’un très mauvais œil les aspirations pro-européennes d’une partie du pays.
"L’opposition géorgienne est non seulement autorisée mais obligée de faire ce qu’elle veut" a prévenu le ministre russe des Affaires Étrangères Sergueï Lavrov, suggérant par cette formule alambiquée que ce sont les Occidentaux téléguident les aspirations géorgiennes. Lesquelles ne sauraient se réduire aux dernières manifestations en date. Mais qu’en est-il exactement ?
Pro-Europe, pro-OTAN
Selon les plus récentes enquêtes d’opinion (fin 2022), une majorité de Géorgiens sont attachés à rejoindre l’UE. D’après l’ONG américaine National Démocratic Institute (NDI), en collaboration avec le Caucasus Research Resource Centers, 81 % d’entre eux "sont attachés à l’intégration européenne du pays. Même tendance en ce qui concerne l’OTAN, 73% des personnes interrogées sont favorables à l’adhésion du pays à l’Alliance de l’Atlantique Nord."
Toutefois, les préoccupations géorgiennes semblent principalement économiques, et il en résulte que "le mécontentement de la population envers les partis au pouvoir" comme "d’opposition a augmenté." "La plupart des personnes interrogées sont préoccupées par la hausse des prix/l’inflation, le chômage, la pauvreté et les bas salaires" ponctue l’enquête.
Plus généralement, les Géorgiens sont pessimistes sur leur avenir. Un constat corroboré par une autre enquête, celle de l’IRI (International Republican Institute), qui relève non seulement que "la majeure partie de la population géorgienne estime que le pays va dans la mauvaise direction", "s’inquiète de l’état de l’économie" et "est sceptique quant au statut de candidat de la Géorgie à l’UE en 2023", mais que la révolte gronde passablement, avec 72% des sondés qui déclarent "vouloir voir de nouveaux partis politiques pour les prochaines élections." Celles-ci sont prévues pour 2024.