Greffier du Parlement wallon: perquisitions massives, plus de 120 policiers mobilisés et des masses de documents embarqués
Journée agitée ce jeudi au square Arthur Masson à Namur, siège de la présidence du Parlement wallon, et ancien bureau du greffier Frédéric Janssens. "Ils ont tout retourné", nous confie un témoin. Plusieurs perquisitions ont eu lieu en même temps sur une vingtaine de sites, en plus du Parlement. Dont le domicile du greffier et deux de ses résidences.
Publié le 09-03-2023 à 10h10 - Mis à jour le 09-03-2023 à 21h17
À la fin du mois de janvier, une juge d’instruction était désignée pour prendre en charge le volet pénal concernant le greffier du Parlement wallon, Frédéric Janssens. L’enquête, centrée sur la légalité d’une série de marchés publics, était restée discrète jusqu’à présent.
Mais ce jeudi matin, l’enquête a pris un tournant majeur.
C’est une cinquantaine de policiers de la PJ Fédérale de Namur qui ont débarqué pour une perquisition au Parlement wallon. Pas au bâtiment où se réunissent habituellement les députés wallons (le Saint-Gilles) mais au square Arthur Masson, à quelques centaines de mètres de là, où se situent la présidence, les bureaux du greffe et ceux du greffier avant sa suspension.

Mais même si le bâtiment était en quelque sorte la pièce maîtresse de l’opération, les recherches s’étendaient bien au-delà de ce périmètre. Au total, une vingtaine de perquisitions étaient à l’œuvre, mobilisant plus de 120 policiers, en Wallonie, à Bruxelles et aussi… dans le sud de la France, où le greffier a une résidence.
"Ils ont tout retourné et tout emporté"
À Wavre, à Auderghem et… à Rousset-les-Vignes (en France, dans la Drôme provençale), les résidences et le domicile de Frédéric Janssens ont fait l’objet aussi d’une perquisition.
D’autres acteurs des marchés publics et des cadres du greffe ont aussi reçu la visite des policiers à leur domicile.
Selon un communiqué commun du parquet de Namur et de la Police Judiciaire Fédérale de Namur, les policiers de la PJF de Namur avaient du renfort pour mener à bien toutes ces opérations simultanées: "Les PJF de Bruxelles et de Liège, ainsi que de représentants d’autres entités de la DGJ (Direction générale de la Police Judiciaire) dont l’Office Central de Répression de la Corruption (OCRC) et la Federal Computer Unit (FCCU, en charge de la lutte contre la criminalité informatique), ainsi que de membres du corps d’intervention de la DCA de Namur".
Et "ils ont tout retourné et tout emporté", selon un des témoins sur place, vidant les armoires, les tiroirs, les ordinateurs… "Ils ont littéralement siphonné tout ce qu’il y avait dans les PC !"
Plusieurs semaines pour tout décortiquer
En fin de journée, les perquisitions étaient toujours en cours, "et du matériel informatique ainsi que des dossiers ont déjà été emportés ", poursuivaient le parquet et la PJF.
Des caisses et des caisses… De quoi déjà remplir une grosse camionnette, alors que les recherches devaient encore se poursuivre pendant plusieurs heures.
"L’examen des pièces saisies afin d’établir d’éventuelles irrégularités, prendra plusieurs jours voire plusieurs semaines. Il est également procédé à l’audition de divers intervenants, notamment à titre de témoins".
Logiciel informatique
Un des premiers à avoir été informé de cette "descente" matinale, c’est un des agents du service informatique du Parlement wallon que les enquêteurs sont allés réveiller chez lui à 6 heures du matin, avant de l’emmener sous bonne escorte jusqu’à son lieu de travail, au square Arthur Masson.

Ce qui intéresse les enquêteurs, c’est notamment un marché public concernant un nouveau logiciel informatique au greffe du Parlement wallon.
La procédure pourrait avoir privilégié le candidat qui a obtenu ce marché, estimé à plus de 400 000 €. Plusieurs courriers anonymes avaient alerté la Police fédérale il y a des mois, et plus précisément la section OCRC. À la grande surprise des anciens membres du Bureau du Parlement, présidé par Jean-Claude Marcourt, qui affirmaient n’être au courant de rien. Une fois alertés sur la part de flou qui pèse sur ce marché, ils décidaient de communiquer le dossier au parquet de Namur.
Le coût des chantiers
L’instruction porte aussi sur la gestion des marchés liés aux extensions immobilières du Parlement wallon. Le coût de ces travaux avait largement dépassé les prévisions, sans que le Bureau semble informé des différentes étapes de l’engagement des dépenses et des décisions prises.
Le greffier avait en effet reçu une délégation de pouvoir très large de la part du Bureau du Parlement. Il avait donc toute latitude (ou presque) pour prendre des décisions, y compris sur des montants importants, puisqu’aucun plafond n’avait été défini.
Les agents du greffe (une centaine de personnes) ont d’abord été rassemblés dans une salle, une fois leur identité contrôlée. Une grande partie d’entre eux a pu s’en aller vers 10 h 30. Seuls les agents dont la présence était requise pour certaines investigations, notamment informatiques, ont été priés de rester.